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Foodsaga – Sole à la normande

Par Gourmets&co

En gastronomie, si je vous dis « Normandie », vous pensez aux poissons, aux crustacés, au beurre et à la crème. C’est exactement ce que veut dire la locution culinaire « à la normande ».

Origine

L’expression apparaît pour la première fois au début du XIXème siècle, un siècle qui va définir pendant longtemps l’histoire de la cuisine française, qui passe alors de la disparition de la noblesse à l’arrivée en force de la bourgeoisie. Une prise de pouvoir qui lancera la cuisine de restaurants par opposition aux nobles qui possédaient chez eux chefs cuisiniers, sauciers et pâtissiers. Peu après la Révolution de 1789, tous ces cuisiniers vont perdre leur emploi et vont ouvrir des restaurants un peu partout dans la capitale.

Comme souvent dans l’histoire de la cuisine française, au commencement était Antonin Carême. On trouve dans son fameux ouvrage « L’Art de la Cuisine Française au XIXème siècle » édité en 1833, un Ragoût de matelote normande. Cette recette va largement inspirer le chef Langlais qui officie dans un des restaurants les plus connus et les plus courus de la capitale, Au Rocher de Cancale, où se rencontre chaque soir l’élite des gourmands et des gourmets dont Grimod de la Reynière, célèbre critique gastronomique, qui y tenait régulièrement son « Jury de dégustateurs ».

Au Rocher de Cancale

Il ouvre ses portes en 1794, en pleine Révolution et peu de temps après une des grandes disettes des parisiens en 1793. Il se trouve dans les Halles, angle rue Montorgeuil (à la hauteur du n°59) et rue Mandar. Au départ, son propriétaire Alexis Belaine y vendait surtout des huîtres qui arrivaient toutes fraiches chaque matin ou presque dans les Halles voisines. Il devint très vite la meilleure adresse de Paris pour la dégustation d’huîtres et autres crustacés.
Mais, sous l’Empire, c’est l’arrivée du chef Langlais qui va le propulser parmi les meilleures tables de Paris, spécialisée dans les poissons et les crustacés. Le diner d’inauguration de Langlais, en 1805, atteint les sommets du parisianisme déjà en liesse quelques jours après la victoire de Napoléon à Austerlitz. On surnomme le restaurant « le Pic de Ténériffe de l’Univers Gourmand ou le « Temple du Goût ». Dans « La Comédie Humaine » de Balzac, c’est le lieu de rendez-vous des personnages, et le restaurant le plus cité par l’auteur. L’équivalent de nos jours serait un des plus grands trois étoiles Michelin de Paris.
Après le départ de Langlais et sa notoriété faiblissant, il fermera définitivement en 1847 après une faillite. Il rouvrira un temps rue de Richelieu, puis le nouveau propriétaire revint rue Montorgeuil mais cette fois au n°78 où il se trouve actuellement. C’est un café-restaurant où l’on peut voir encore à l’étage quelques gravures originales d’époque ornant les murs et l’ancien plafond en poutres.

Sole à la normande

C’est au sommet de sa célébrité, en 1837, que Langlais créé sa Sole à la Normande. Une belle sole beurrée, cuite au four au vin blanc, crème, et garniture huîtres pochées, moules, champignons, éperlans frits et croutons de pain beurrés des deux côtés et passés au four.. Plus tard, les éperlans devenus rares seront remplacés par des crevettes roses.
A cette époque, comme aujourd’hui, la sole (venant du latin solea qui veut dire sandale) est un poisson très recherché et cher. Elle était déjà « met royal » sous Louis XIV. Noble elle est, noble elle restera tout au long du XIXème siècle. Harengs et sardines pour le bas peuple, sole et turbot pour les élites. Elle sera le poisson favori des cuisiniers du Second Empire avec des célèbres recettes comme la « Sole à la Dugléré », chef prestigieux de l’époque, et notre bonne Sole à la normande.
La recette est officialisée et écrite par Jules Gouffé, célèbre cuisinier et pâtissier, dans son « Livre de Cuisine », édité en 1867. La recette deviendra une des recettes les plus célèbres de la gastronomie française jusqu’au milieu du XXème siècle et l’arrivée de la Nouvelle Cuisine. On la retrouve aujourd’hui au restaurant « Helen », à Paris, avec une magnifique interprétation du chef Sébastien Carmona Porto.

Accord plat & vins

Vigneronne : Marie-Hélène Lévêque
Château de Chantegrive
Graves

Le domaine de 96 hectares se situe sur l’AOC des Graves, située au sud de Bordeaux entre la forêt des Landes et la Garonne.
Cuvée Caroline, blanc, 2018
Cépages : sémillon, sauvignon blanc, sauvignon gris.
Le Château de Chantegrive se distingue par sa cuvée Caroline, un des fleurons de ce domaine.
Un soin particulier est apporté aux blancs et la cuvée Caroline en est un parfait exemple. Vendanges manuelles sur cette parcelle de 15 hectares, travaillée en culture raisonnée. Un nez subtil d’agrumes, et une bouche d’une belle fraicheur, un peu boisé mais sans excès, une belle minéralité et du fruit, du fruit…
Une cuvée, servie à 11°, qui se mariera avec beaucoup de plats : poissons, crustacés, et volailles Prix : 15 €

Château de Chantegrive, blanc, 2019
Cépages : sauvignon, sémillon.
Un des classiques de la maison dont on ne se lasse pas surtout le millésime 2019 qui allie avec bonheur, densité, fraicheur, et une légère minéralité bienvenue. Un vin parfait ? Pas loin. Servir à 11°. Prix : 10 €, environ. Une bonne affaire !


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