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"Brutal changement de Mileí : en accord avec Trump, il retire son appui à l'Ukraine", dit le gros titre au-dessus d'une photo relative aux prières pour le rétablissement du pape Cliquez sur l'image pour une plus haute résolution |
En suiveur servile de son idole, Donald Trump, Mileí vient de faire
s’abstenir l’Argentine lors d’un vote à l’Assemblée
générale de l’ONU : une résolution présentée hier,
troisième anniversaire de l’invasion à grande échelle, par
l’Ukraine et une cinquantaine de pays partenaires pour réclamer le
départ des troupes russes du territoire ukrainien et l’instauration
d’une paix juste et durable dans le respect de l’intégrité
territoriale du pays agressé.
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Quelques députés de la droite libérale (Macri) contestaient hier le changement diplomatique de l'Argentine Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution |
Cette abstention constitue un changement radical de la position
argentine qui avait toujours soutenu que la Russie avait déclenché
une guerre illégale en février 2022 et que le droit international
devait s’appliquer. Une position d’autant plus importante que
l’Argentine s’est toujours appuyée sur le concept
d’inviolabilité des frontières pour contester au Royaume-Uni sa
souveraineté sur les îles Malouines (et d’autres archipels de
l’Atlantique sud) puisque la Grande-Bretagne ne doit sa position
sur ces terres qu’à un coup de main de la Royal Navy en 1833, sans
avoir au préalable déclaré la guerre à l’Argentine que Londres
avait reconnue en 1824, à une époque où la déclaration de guerre
était une condition sine qua non pour qu’une guerre soit légitime
et puisse, après la fin des hostilités, aboutir à des cessions
territoriales entérinées par un traité de paix, négocié par tous
les belligérants concernés. Ainsi donc, non seulement Mileí trahit
l’Ukraine dont il n’a cessé de se dire le partisan indéfectible
depuis le début de sa campagne électorale mais il a encore un peu
plus fragilisé la diplomatie de son pays, déjà bien compromise par
ses pitreries indécentes et par le récent scandale de la
crypto-monnaie, qui a prouvé aux yeux de tous son insondable
incompétence en économie.
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L'information est annoncée en haut au centre (avec une photo de Zelensky bras le long du corps) De son côté, l'opposition péroniste se réorganise et reprend du poil de la bête Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution |
Ce matin, la presse nationale argentine réagit assez vertement à ce
changement de cap. Même Página/12, assez hostile à
l’Ukraine et plutôt poutinien par anti-américanisme, traite
l’information en une. Hier soir, juste après le vote, les articles
en ligne soulignaient tous, encore plus fortement qu’aujourd’hui,
le caractère de trahison que revêt cette nouvelle posture
internationale et la servilité dont elle témoigne à l’égard de
Trump, un président américain dont aucune rédaction n’approuve
le moindre comportement depuis le 20 janvier.
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Une députée d'un groupe d'opposition à éclipse proteste vertement contre l'abstention de l'Argentine à l'ONU "Les affaires étrangères, c'est de la politique de l'Etat, pas du copinage du président" Cliquez sur l'image pour une meilleure résolution |
La Nación publie même aujourd’hui deux articles sur le
sujet. Au-delà de l’analyse du vote lui-même, qui place
l’Argentine du côté des gouvernements mis au ban de la communauté
internationale (Biélorussie, Cuba, Venezuela, Iran ou Corée du
Nord), le quotidien de la droite libérale et démocratique bien
élevée, celle du patriciat argentin éduqué et raisonnablement
cultivé, rappelle toutes les déclarations officielles à travers
lesquelles, pendant plus d’un an de mandat, Mileí s’était
offert le luxe de se présenter comme le premier des défenseurs de
l’Ukraine, ce qui est mensonger. Cette auto-présentation vient
probablement d’une rivalité mesquine avec le jeune président
chilien, Gabriel Boric, une des voix respectées et respectables de
la gauche sud-américaine, qui s’était dignement prononcé pour
l’Ukraine, avant l’élection de Mileí, lors d’un sommet des
pays hispanophones, où il avait laissé éclater sa colère contre
l’aveuglement de ses homologues de gauche (en particulier le
président colombien) et la tiédeur de la posture neutre adoptée
par un Alberto Fernández qui n’a jamais eu les moyens politiques
d’imposer quoi que ce soit à sa majorité dominée par Cristina
Kirchner, inconditionnelle russophile.
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L'information est signalée dans la colonne de droite en haut, sous les deux petites photos Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
Le quotidien de droite passe en revue les trois rencontres entre
Mileí et Zelensky, à Buenos Aires, le 10 décembre 2023, en Suisse
en juin dernier (1), puis à Davos, il y a un mois. A
chaque fois, Mileí avait bombé le torse en jurant fidélité
éternelle à la noble cause ukrainienne. Et il a tourné casaque au
premier coup de sifflet de Trump lorsque la semaine dernière, il a
insulté Zelensky et répété comme un perroquet la plus grossière
propagande russe.
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Réaction de la députée d'opposition sociale-démocrate Margarita Stolbizer, outrée "Et ça se dit leader mondial !" Elle parle de la trahison de l'Ukraine (traicionar a Ucrania) Remarquez la photo ! Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
En ce qui me concerne, il m’avait toujours semblé que le postulat
pro-ukrainien de Mileí était une imposture. Durant sa campagne, il
me paraissait en effet évident qu’il ne cherchait qu’à afficher
des positions systématiquement opposées à celle de Fernández,
alors très impopulaire, ce qui était un moyen de se faire élire à
peu de frais intellectuels (son opposition était générale, y
compris sur le covid). Après l’élection, Zelensky est resté
silencieux pendant deux jours avant de lui téléphoner pour lui
adresser ses félicitations officielles. Ce que j’ai interprété
comme une réserve ou une hésitation de sa part puisque ce n’est
pas dans ses habitudes diplomatiques.
Puis il a assisté à la prestation de serment de Mileí le 10
décembre 2023. De toute évidence, pour Zelensky, c’était une
occasion à ne pas manquer : c’était la première fois qu’un
chef d’État ukrainien était invité à fouler le sol
sud-américain, ce qui ne peut pas se refuser surtout dans les
circonstances politiques traversées par son pays et cette invitation
lui offrait en outre le cadre de nouveaux entretiens avec ses
homologues régionaux, présidents en exercice du Chili (à gauche),
de l’Uruguay, du Pérou, de l’Équateur,
du Guatemala et du San Salvador (droite, voire extrême-droite), tous
soutiens de l’Ukraine dans la faible limite des moyens de leurs
pays. Gouvernés à gauche et de ce fait hostiles à l’Ukraine pour
le seul motif celle-ci était vilipendée par leur cher Poutine et
soutenue par les vilains États-Unis,
ni le Brésil ni la Colombie n’étaient représentés à haut
niveau puisque Mileí avaient insultés ces deux présidents tout au
long de sa campagne (avant de tâcher de corriger le tir dans les
jours qui ont suivi sa prestation de serment).
Cette investiture avait été marqué par un geste saugrenu de
Mileí : dans des circonstances où il n’y a pas d’échange
de cadeaux diplomatiques, à son homologue ukrainien, qui refuse
systématiquement de faire mention de sa judéité dans la vie
publique, que ce soit dans sa carrière artistique ou sur la scène
politique, le nouveau président avait tendu un chandelier rituel
juif, qui plus est de taille gigantesque et de style hideux. C’était
totalement déplacé à l’égard du président d’un pays en
guerre qui pousse sa communication politique jusqu’à afficher le
conflit en cours dans sa tenue vestimentaire.
Le mois suivant, il y a eu une non-rencontre significative à Davos
où tous les chefs d’État et de gouvernement de pays démocratiques
présents ont soigneusement évité de croiser Mileí dans les
couloirs. Le tout nouveau président argentin, déjà pestiféré aux
yeux des démocrates du monde entier, n’y a eu d’entretien
qu’avec le ministre des Affaires étrangères britannique (à ce
stade précoce de son mandat, cet admirateur de Thatcher tenait à
courtiser les conservateurs britanniques), la directrice du FMI (pour
quémander un nouveau prêt) et la reine des Pays-Bas qui est
d’origine argentine et rencontre, pour cette raison, tous les chefs
d’État de son pays natal quelle que soit leur positionnement
politique ou idéologique. A Davos, elle remplit une mission des
Nations-Unies : sensibiliser les dirigeants politiques et
économiques au besoin d’instaurer une plus juste répartition des
richesses sur cette planète détruite par l’âpreté au gain d’un
petit nombre (bien représenté sur place). Avec Mileí, elle n’a
pas dû s’amuser ! En ce tout début d’année 2024, celui-ci
n’a passé qu’une douzaine d’heures à Davos, au cours
desquelles il a réussi l’exploit de faire rire son auditoire
compassé et clairsemé avec son discours officiel, où il a, comme
Vance à Munich, déversé des propos insultants contre les
démocraties, toutes accusées d’être rongées par le « cancer
du communisme ».
En juin, on a eu droit au grand n’importe quoi du sommet sur la
Paix, puis en janvier, à une rencontre à Davos fort peu commentée
par les Ukrainiens comme par les Argentins, déjà largement
désabusés. A cette occasion, il semble que la séance photo ait
donné lieu à deux clichés, que l’on retrouve dans la presse
argentine de ce jour : sur l’un seul, on voit Mileí faire son
signe-slogan avec les deux pouces levés tandis que Zelensky se tient
souriant à ses côtés les deux bras le long du corps comme
d’habitude ; sur l’autre, l’Ukrainien lève lui aussi les
pouces (que les photographes aient réclamé le geste à grands cris
ne m’étonnerait pas : Zelensky semble tout faire pour éviter
ces exercices de communication puérils et grotesques).
Entre temps, un accord commercial avait été signé entre les
ministres de la défense des deux pays pour la production de
munitions dans une usine argentine dont le personnel aurait sûrement
été très heureux d’honorer cette commande mais le gouvernement
était décidé à privatiser toutes les entreprises nationales et
celle-là fait sans doute partie de tout ce dont ils veulent se
délester. Toujours est-il que l’accord prometteur est resté
lettre morte. L’Argentine s’est contentée de livrer quelques
hélicoptères. Cela aura été la seule aide militaire concrète de
ce gouvernement si fier de son supposé soutien. Plusieurs
invitations ont aussi été lancées à Mileí pour qu’il se rende
à Kiyv comme le font tant d’ardents défenseurs de la cause
ukrainienne. A chaque fois, il avait promis de faire le voyage.
Personne ne l’a encore vu ni à Kiyv ni ailleurs en Ukraine.
Dans ses rencontres avec la presse latino-américaine, jusqu’au
bout, Zelensky a tenté de ménager la susceptibilité de son
homologue en limitant ses attentes officielles à son égard. En
vain ! Il n’aura rien obtenu.
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Tableau du vote à l'ONU de la résolution proposée par l'Ukraine et cinquante de ses partenaires cliquez sur l'image pour une haute résolution (la photo complète vient de l'agence de presse Ukrinform) |
Si Mileí voulait Zelensky à son investiture, ai-je tendance à
penser, c’était pour deux raisons : 1) c’était une
célébrité internationale très admirée dont la présence à
Buenos Aires ce jour-là pouvait projeter son arrivée au pouvoir à
la une des médias du monde entier, ce qui flattait la fatuité de
cet imbécile, et hélas, ça a marché ; 2) Très probablement,
jusqu’au 10 décembre 2023, Mileí aura cultivé un intérêt
malsain pour Zelensky à cause de sa judéité parce que le président
argentin éprouve pour cette religion, qui plus est dans une version
très rétrograde, une fascination à la fois immature et peu
sincère, alors qu’il ne respecte même pas le chabbat (2).
Or cet intérêt a dû s’évaporer lorsque Mileí a constaté que
a) Zelensky refuse ce positionnement confessionnel (ce qui n’est
pas difficile à découvrir en le suivant d’un peu près) et b)
qu’il n’a rien d’un admirateur inconditionnel d’Israël,
tandis que l’Argentin se veut à tu et à toi avec Netanyahu et ses
alliés d’extrême-droite. Dès lors, Mileí n’avait plus qu’un
seul motif de soutenir l’Ukraine, et encore du bout des doigts :
l’imitation aveugle et inconditionnelle de la diplomatie
washingtonienne, qui vient de tourner casaque.
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L'information est présentée en bas à droite Cliquez sur l'image pour une haute résolution |
© Denise Anne Clavilier
Pour aller plus loin :
(1) Ce qu’oublie de dire le ou la journaliste, c’est que Mileí
avait déjà flanché à ce moment-là puisqu’après avoir annoncé
dans un premier temps qu’il se rendrait au sommet sur la Paix
organisé par les Suisses, il avait fait savoir quelques jours plus
tard que finalement il ne s’y rendrait pas, avant de changer à
nouveau d’avis après un coup de fil de Zelensky. Et, ô surprise,
on avait assisté sur place à un spectacle surprenant :
Zelensky avait décoré Mileí, ce qu’il n’avait pas fait avec
les autres participants dont la plupart se sont rendus une ou
plusieurs fois à Kiyv et ont reçu sur place différentes marques de
gratitude de l’État ukrainien. De là à subodorer que pour le
faire participer à la conférence internationale, Zelensky l’ait
appâté avec ce hochet, il n’y a qu’un pas. Mileí court
derrière toutes les décorations et tous les prix, partout sur la
planète, prenant tout ce qui se présente sans aucune
discrimination. Cette décoration ukrainienne est sans nul doute la
plus respectable et la plus prestigieuse de sa collection, constituée
de tas de bricoles sans aucun caractère officiel, décernées par
des institutions privées la plupart du temps d’extrême-droite.
(2) Le vendredi 1er
mars 2024, il a décalé à 21h au lieu de l’horaire traditionnel
de midi son discours d’ouverture de la session parlementaire alors
qu’en s’exprimant à midi, il n’aurait aucunement enfreint le
repos hebdomadaire scrupuleusement respecté par tous les
pratiquants. Donc il se moque du monde et diverses associations
confessionnelles juives le lui ont reproché dès le surlendemain.