Rencontre avec la comédienne Suzanne Jouannet pour La Voie Royale

lundi 14 août

Elle n'a tourné que deux longs métrages et pourtant Suzanne Jouannet a déjà tout d'une très grande.  

Formée au Cours Florent de 2016 à 2019 puis élève de la Classe libre promotion XL, la comédienne est repérée par un agent lors d’une pièce de théâtre

Alors qu’elle n’a aucune expérience devant la caméra et n’a jamais passé de casting, la jeune femme envoie une vidéo de ses essais et décroche le premier rôle féminin des Choses Humaines d’Yvan Attal dans lequel elle explose totalement et vole même la vedette à Charlotte Gainsbourg, Pierre Arditi, Ben Attal et d'autres..

Elle était présente en début de semaine sur Lyon pour défendre la voie royale, son second long métrage en salles depuis mercredi dernier  et on avait tout juste une dizaine de minutes pour échanger avec elle, ce qui a suffi pour deviner l'ambition et également l'humilité de l'actrice  : 

Deuxième role au cinéma, et une nouvelle fois,  on ne voit que vous à l'écran, comment vous vivez cela, Suzanne?

Petit à petit ca se passe pas mal pour moi c'est sur  je ne vais pas me plaindre ( rires)..

Après les choses humaines,  la voie royale  aborde une thématique différentes mais  mais très important et très contemporain  aussi, ce sont deux films dont on peut être fière dans une filmographie, je pense.. .

C'est vrai que dans le film de Frédéric Mermoud, contrairement au film d'Yvan Attal qui était un film choral, je suis de toutes les scènes, c'était un vrai défi au départ qui m'a un peu angoissée, mais Frédéric m'a énormément rassuré sur le fait que je pouvais le tenir..

Les Choses humaines vous a soudainement propulsée en haut de l’affiche, avec notamment une nomination au César du meilleur espoir féminin. A-t-il été délicat d’enchaîner avec le bon projet ?

On m’avait proposé d’autres rôles un peu similaires mais, même s’il est important d’aborder le sujet du harcèlement, il est tout aussi intéressant d’aller vers d’autres sujets, comme celui donc de « La Voie royale », qui est totalement différent et évoque le transfert de classe.

Au moment de préparer le rôle, le livre « Illégitimes » de Nesrine Slaoui m’a énormément inspirée.

Transclasse, elle a déclaré, lorsqu’elle a été prise à Science Po être « une bête dans la matrice », en faisant référence au fait qu’il est normalement impossible de modifier un programme déterminé.

La seule possibilité est d’être aiguillé par un professeur mais si on n’a aucune information, on ne connaît pas les écoles et on ne sait même pas qu’une porte de sortie existe… 

Est ce que l'on peut dire que vous avez la bosse des maths ou bien l'univers scientifique est totalement étranger pour vous? 

( rires).. Ah non on peut  même dire que je ne connais rien aux maths  ...

Au lycée j'ai fait un bac littéraire donc j’avais zéro,  en maths ou pas loin , je me souviens même avoir écrit un poème de Rimbaud sur une copie de chimie, c'est dire le niveau ( rires).. .

Alors dans le film de Frédéric, j’ai adoré dire des trucs où je ne comprenais rien à ce que je racontais et découvrir qu’on pouvait être passionné des maths comme je suis passionnée par la comédie. 

Dans ce cas, comment on se fait pour s'immerger dans ce monde si étranger des mathématiques ?

On fait en étant très bien accompagnée... J’ai eu des petits cours pendant deux semaines.

C’était court mais j’ai eu le temps d’apprendre par cœur les schémas que l’on fait au tableau pour ne pas faire d’erreurs.

Pour cela, je filmais les leçons et j’observais la manière d’agir du professeur, qui avait mon âge et qui m’expliquait des trucs assez dingues !

L’essentiel était de conserver une cohérence, que ça soit crédible à l’image.

Et même si j'ai un peu tout oublié depuis et que je serais incapable de refaire une équation devant vous, je pense qu'à l'écran ca passe pas mal ( sourires) 

C'est quoi la scène qui a été la plus éprouvante à tourner dans le film? Ca serait plutot les scènes intimistes avec vos parents à l'écran ou bien justement ces scènes plus techniques de maths ou dans la ferme? 

Ah je sais pas,  c'est une bonne question ( sourires) ...

Je crois que les scènes  ou j'ai le plus buté c'est quand  avec Marie Collomb, on devait utiliser un language de jeune fille de 17 -18 ans alors qu'on en a 25, il fallait que ca soit crédible dans notre bouche, des expressions qu'on utilise plus du tout ..

On voit que dans le film, ce qui va faire avancer Sophie dans son parcours, ce sont les rencontres comme notamment avec le professeur de maths qui va lui parler de ces classes préparatoires la première fois...

Oui tout à fait;  ce professeur là va lui prendre conscience que cela existe et lui permettre de rever plus grand, mais au départ elle n'a pas de plan de carrière. 

Sophie, c'est une battante, très attachante, très àfleur de peau... on la voit se battre constamment j'ai adoré ce trait de caractère dans le film ..

Il y a d'autres rencontres importantes dans son parcours, avec Diane aussi ( jouée par Marie Collomb)  elle va s'attacher, s'accrocher  à elle car c'est une sorte de bouée de sauvetage  même si elles sont tres différentes et qu'elle va s'en rendre compte ..

Vous vous imposez comme une actrice capable d’endosser des personnages de femmes fortes, qui tiennent tête aux hommes mais aussi aux institutions. Avez-vous cependant fait un parallèle avec le parcours de Sophie qui bataille pour s’imposer en classe préparatoire et votre parcours de jeune comédienne ?

Le parallèle, c’est la compétition, le fait de se comparer aux autres et qu’il y a peu d’élus. La seule différence entre ces deux milieux, c’est que dans les maths, c’est plutôt masculin alors qu’au cinéma, il y a beaucoup de femmes.

La pression des concours est, en revanche, omniprésente. J’en ai passé pour intégrer des écoles de théâtre et j’ai découvert un monde où la vie à côté n’existe pas.

Il ne faut faire que ça ! Désormais, je ne suis plus dans cette période « prépa » et j’espère simplement qu’il y aura encore de la place pour moi à l’avenir, tout en espérant que les autres y trouvent aussi leur compte…   

 Rencontre avec Frédéric Mermoud et Suzanne Jouannet le 7 août 2023

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