Article précédent : 3 Fatalités dans le miroir
Cet article examine les cas de figure où le reflet montre un squelette, un diable ou autre figure négative qui, de manière parfaitement rationnelle, se trouve en arrière du spectateur.
En préambule : le miroir et la Danse macabre
La Danse Macabre est elle-même un Miroir
La première Danse macabre au monde fut probablement la fresque peinte d’août 1424 à 1425 sur le mur du cimetière des Innocents à Paris .
Miroir salutaire. La Danse macabre historiée; 1486, Guyot Marchand, BNF RES-YE-189 vue 9, gallica
Lorsque Guyot Marchand en édite les images et les textes, il nomme l’ouvrage Miroir salutaire. Le mot miroir apparaît dès la première page :
Dans ce miroir , chacun peut lire
que lui-même doit danser ainsi.
Sage est celui qui s’y réfléchit bien !
Le mort fait avancer le vif.
Tu vois les plus grands commencer
Car nul n’échappe à la mort.
En ce miroer chascun peut lire,
Qui le conuient ainsi danser.
Saige est celuy qui bien si mire .
Le mort le vif fait avancer.
Tu vois les plus grands commencer
Car il n’est nul que mort ne tiere.
Danse macabre des Innocents, édition de 1485 par Guyot Marchant et Vérard
On peut comprendre que ces figures grandeur nature transformaient le cimetière en une galerie des glaces où chaque passant pouvait se reconnaître : c’est en ce sens que les Danses Macabres fonctionnent comme la simulation d’un grand miroir, impossible à réaliser avec les moyens de l’époque.
Danse macabre du Grand-Bâle, 1440, gravure de Merian, 1621
Les théoriciens de la Danse Macabre ont noté [59] que certains couples présentaient une forme de symétrie interne, ce qui donnerait un effet de miroir de second ordre, non plus entre le spectateur et son alter-ego peint, mais entre son image immédiate et son image future. La rareté de ces cas montre qu’il étaient soigneusement évités, car ils auraient donné un effet de monotonie regrettable : ils sont dûs simplement à l’inévitable duplication des attributs (le chapeau du cardinal, le moignon de l’infirme).
Le miroir fugitif
Dans la première Danse Macabre, celle du Cimetière des Innocents, il n’y a que des types d’homme, chacun formant couple avec un squelette.
La Prieure et la jeune femme
Cy est la danse macabre des femmes, 1491, BNF RES-YE-86 vue 6
Les femmes apparaissent dans un texte postérieur, La Danse Macabre des Femmes , connu grâce à une poignée de manuscrits (BNF Français 995 notamment), et qui met en scène entre 30 et 32 types de femmes. Aucune ne porte un miroir [60].
Celui-ci serait en quelque sorte parasitaire, puisque la Danse Macabre dans son ensemble est déjà un grand miroir, conçu pour aider l’homme à se préparer à la Mort.
Ainsi l’image du squelette qui tire un vivant par la main doit être lue avant tout au sens figuré : « le mort fait progresser le vif ».
La Mort, La Demoiselle et la chambière
Jean Mielot, Le mors (la morsure) de la pomme, 1468, BNF Francais 17001 fol 111r gallica
Le seul cas en France où le miroir joue un rôle central est cette illustration d’un texte qui fonctionne un peu comme une Danse Macabre, avec un dialogue entre la Mort, la Demoiselle et sa Chambrière, ponctué de citations des Psaumes :
La Mort :
Mirez vous bien et vous verrez
Quele sera vo belle face
Teles que je suys deuenrez
Car ainsi fault il quil se face
Homo vanitati similis factus est (Psaume 144,4)La demoyselle :
Je suys dolante et esperdue
Quant en moy morant je regarde
Ma beaute qui sera perdue
Las! Hemy ! trop (tard) pou y preng garde
Domine in voluntate tua prestitisti decori meo virtutem (Psaume 29)La chambriere :
Ce miroir cy est exemplaire
A tout homme qui est mortel
Bien peut pourfiter et sans plaire
A chil ky pense estre mort tel.
Et defecerunt in vanitate dies eorum (Psaume 77,33)
(les trois derniers vers manquent dans le manuscrit de la BNF).
Le miroir étant placé de manière non réaliste, rien n’empêchait le dessinateur d’y faire figurer un crâne, pour illustrer ce que dit le Mort ( « Mirez vous bien et vous verrez ce que deviendra votre belle face »), d’autant plus que la flèche fatale est déjà plantée dans le sein. Il a préféré y placer le visage de la jeune fille justement parce qu’elle ne s’est pas « bien mirée » (elle n’a pas utilisé le miroir correctement) et que maintenant il est trop tard pour faire autrement. La chambrière conclut en expliquant la bonne utilisation du miroir : Peut en profiter bien, sans souci de plaire, celui qui pense être mort tel (jeu de mot entre mortel et mort-tel, ressemblant à un mort).
Le rétroviseur de Bâle
La Femme noble, figure de La danse macabre du Grand-Bâle
Le miroir apparaît dans cette Danse Macabre comme attribut de la Femme Noble, et suit étroitement le texte (différent du texte de la Danse macabre française) :
La Mort à la Noble dame :
Laissez vos soins de femme noble,
Vous devez venir danser avec moi ;
Je n’ai pas vos blonds cheveux :
Que voyez-vous clair dans le miroir ?
Réponse de la femme noble .
Peur et détresse ! comment cela m’est-il arrivé ?
J’ai vu la mort dans le miroir;
J’ai été si effrayée par son apparence horrible
Que mon cœur dans mon corps est froid
Tod zur Edelfrau .
Vom Edel Frau last euer Pflanzen ,
Ihr müsset jeht hie mit mir tanzen ;
Ich schon nicht euers geelen Haar :
Was seht ihr in den Spiegel klar ?
Antwort der Edelfrau .
Angst und Noth ! wie ist mir b’schehen ?
Den Tod hab ich im Spiegel g’sehen ;
Mich hat erschreckt sein greulich G’stalt ,
Daß mir das herz in Leib is kalt.
On notera le détail du serpent lové dans l’herbe : il va piquer au talon la jeune femme qui recule sans le voir, obnubilée par le reflet. Cette image parfaitement rationnelle précède tous les miroirs macabres que nous avons explorés jusqu’ici :
contrairement à l’intuition, le rétroviseur, bien que plus élaboré, précède le miroir magique.
Autres miroirs dans des Danses macabres
Giacomo Borlone (attr), 1485, Oratoire des Disciplinaires, Clusone [61]
Le rétroviseur de Bâle reste très isolé : le seul autre cas pourrait être celui de la première femme qui sort de la ville, à la queue de cette danse macabre : mais il est bien plus probable qu’il s’agisse simplement de l’attribut de la coquette, et que le visage du reflet soit le sien, et non celui du squelette qui la pousse.
La Demoiselle, figure de de « Der Jüngere Todtentanz » [62]
L’objet fonctionne ici en miroir magique, et de manière tout à fait optionnelle puisque le texte qu’il illustre ne le cite pas directement :
Vous la demoiselle à la longue traîne, vous aussi vous appartenez à ma danse. Vous avez beaucoup séduit, la pudeur vous aurait mieux convenu . Vous avez porté l’arrogance sur votre tête. Suivez-moi, je vous apprendrai le meilleur tour pour toutes les danses.
Maintenant, je dois dire la vérité, je voulais vraiment plaire au monde avec de la danse et des sauts et aussi avec de beaux chants. Je l’ai beaucoup apprécié et j’ai oublié les commandements de Dieu. Ô mère de miséricorde, aidez-moi, mes péchés me font mal.
Ir iunfrauwe in dem groißen swantz , ir gehorent auch an mynen dantz . Vyl hoiffart haint ir gedriben : beßer were eß in demutikeit verliben Ir haint vff uwerm heupt gedragen hogen mut , der nit stet zu sagen . Kompt her naich, ich uch lu lere, in allen dantzen die bester kere.
Ich muss nu die warheit sagen, ich wolt de werlt zu male behagen, Mit dantzen und mit springen, und auch mit sussen singen. Vyl geungden hain ich besessen, und der geboit gots vergesse. O mutter der Bramherzigkeit, Hilff mir, myn sunde sint mir leit.
Ainsi le dessinateur de Kassel a ajouté le miroir comme attribut de la Séductrice, qui se retourne contre elle-même.
Verganglichkeitsbuch (Zimmerischer Totentanz), Wernher von Zimmern, 1540-1554
Wurttembergische Landesbibliothek Stuttgart, Cod. Don. A III 54 fol 120v
Ce texte est un développement de « Der Jüngere Todtentanz ». L’illustrateur a recopié l’image de Kassel en la mettant à la mode du temps. Il a rajouté un bouquet de fleur et une fosse fraîchement refermée (des détails qui ne sont pas dans le texte [63] ) : comme les racines des fleurs sont apparentes, il est probable que la mort désigne la terre à la fille pour lui rappeler son origine : tout comme la fleur, elle est née de la terre et elle retournera à la terre.
La Mort et la noble dame
Jakob Hiebeler, 1602, Danse macabre, St.-Anna-Kapelle (Füssen)
Le miroir fonctionne ici encore comme attribut de la Superbe. Le petit diable assis sur la robe illustre le proverbe :
Sur les longues jupes des femmes, le diable se plaît de chevaucher
Up der vruwen langhen swansen Plecht de düvel gern to draven
Tableau représentant une danse macabre (détail)
Vers 1710, Musée national, Copenhague
Le texte connexe, déchiffré par Martin Hagstrøm, est tiré d’un livre d’emblèmes [64]. Il suggère que le peintre, outrepassant ses moyens, a voulu représenter dans le miroir le visage vieilli de la femme :
Qui peut lire de cela
qui ils étaient autrefois.
Wer kann aus diesen lesen
wer sie zuvor gewesen.
4A Dans le rétro… rien
La Sirène au rétroviseur
Scylla
Peter Vischer le jeune, 1514, Germanisches National Museum, Nüremberg
Selon Ovide [65], Scylla était une nymphe d’une grande beauté (le miroir et le peigne) qui fut transformée par Circé en un monstre marin qui allait terroriser les bateaux : le dessin montre la transformation en cours (elle a déjà ses pattes palmées et sa queue) avant même que la nymphe n’en prenne conscience. Inconsciente est également la proie qui s’approche par la gauche.
Sirène
Peter Vischer le jeune, 1514–19, Sebaldusgrab, St Sebald, Nüremberg
Ce dessin a probablement servi d’étude pour la sirène qui orne le soubassement du chef d’oeuvre des Vischer père et fils : le gigantesque tombeau en bronze de Saint Sebald. On lit parfois qu’il s’agit ici encore de Scylla, et que le vieillard barbu qui arrive par la droite serait son amoureux éconduit, Glaucos, autre monstre marin qui se décrit ainsi : « j’aperçus cette barbe azurée, cette longue chevelure qui balaye les mers, ces larges épaules, ces bras de la couleur des eaux, et ces cuisses réunies, courbées en queue de poisson ».
Cette lecture savante se heurte cependant à une incohérence : lorsque Glaucos importune Scylla, celle ci n’est pas encore transformée en poisson. Si Vischer avait pour point de départ le mythe de Scylla, il l’a fusionné avec le thème bien connu de la Luxure au miroir pour le rendre intelligible à tout un chacun.
Tout comme le bateau dans le dessin, le vieillard barbu représente ici la proie inconsciente. Fasciné par la belle, il ne voit pas le squelette qui se cache sur l’autre face.
Le miroir ici ne montre rien : mais on peut supposer que la sirène y vérifie la présence de sa complice la Mort, au moment où elle se prépare à assommer sa proie avec son autre accessoire : la sphère qu’elle tient dans sa main droite.
La Mort et le Diable surprenant deux coquettes
Daniel Hopfer, 1510-15, MET, New York
Au lieu de se servir du miroir pour vérifier ses arrières, à la manière de la Prudence, la Coquette l’oriente vers la visage de sa compagne, qui le rapproche d’elle pour mieux s’y voir : ainsi ni l’une ni l’autre ne voient venir les deux compères à l’attaque.
L’image joue sur l’amplification comique (flèches bleues) :
- la Mort qui lève un genou précède le Diable, qui le lève encore plus haut ;
- le lambeau de linceul pendant précède le lambeau d’oreille ;
- le petit crapeau perché sur le crâne précède le diablotin au harpon.
S’y ajoute un effet d’écho (flèches rouge) entre les accessoires de la Coquette (les flacons et le miroir) et ceux de la Mort (le sablier et le crâne).
Vanité, 1500-1600, Allemagne, origine inconnue
Le miroir vide prouve que la femme riche (la bourse) ne voit pas la mort arriver.
Ces exemples suggèrent qu’en pays germanique, le miroir utilisé en rétroviseur est essentiellement une figure de l’Inconcience.
4B Dans le rétro… la Mort
Rétroviseur ignoré, efficace, puis contrarié (SCOOP !)
Femme au luth
Avec son le vase à parfum luxueux, la première musicienne est une allusion à Marie-Madeleine ou, du moins, à une épouse infidèle (elle porte un anneau). C’est ce qu’affirme la partition, un motet de Clément Marot publié en 1529 :
Si j’ayme mon amy / trop, plus que mon mary / Se n’est pas de mervelles“
La seconde luthiste ne porte pas de bague et lève les yeux de la partition pour fixer le spectateur, une attitude provocante tout aussi révélatrice que le motet.
Anonyme, 1525-49
La musicienne peu farouche se retrouve dans cette allégorie où un vieillard la coince entre un crâne et un miroir, celui-ci entièrement occupé par le reflet proéminent. La jeune femme ne s’y intéresse pourtant pas plus qu’à la partition, et continue de fixer le spectateur. Ce tableau, passé par la collection de Goering, puis par le Katharijneconven d’Utrecht, a été restitué à son propriétaire d’avant guerre.
La copie de Varsovie porte un texte explicatif :
Celle qui est dans les délices, est déjà morte tout en étant vivante.
Saint Paul, 1. Tim . 5. 6
Quæ (autem) in deliciis est , vivens mortua est
Le vieillard sévère, dont le crâne chauve a partie liée avec le crâne, pourrait ici être Saint Paul. Il s’est emparé du miroir de la coquette pour asséner non pas un ultime avertissement, mais la constatation d’une Vérité : la femme de délices est une morte-vivante.
Il faut cependant être prudent car une autre copie (vendue chez Christies New York le 25 mai 1991) portait une inscription différente :
Mieux vaut mourir que de vivre de façon déshonorante.
POTIVS.MORI.QVA(M). INDECORE.VIVERE
On retrouve une variante de cette phrase sur un tableau, par Pieter Coecke van Aelst, de la Lucrèce Romaine, qui préféra se suicider plutôt que d’être violée (« Satius est mori.. »). Le vieillard perd alors toute référence religieuse et personnifie plutôt la sagesse antique gourmandant la jeunesse moderne.
La composition était donc suffisamment versatile pour être personnalisée selon le commanditaire.
La luthiste et le Temps, vers 1530-40
Te voyant belle dans le miroir, prend en considération la forme
Placée derrière toi, qui dénote que tu n’es rien.
Formosam speculo te cernens, respice formam
A Tergo positam quæ notat esse nihil
Comparée à l’intransigeance de la variante précédente, celle-ci, dont on ne connaît pas l’original, fait figure de message d’espoir. La calvitie du viellard est masquée par un couvre-chef, la partition a disparu et la composition a été inversée, de manière à ce que le sens de la lecture corresponde avec la narration : la musicienne, qui remarque enfin le crâne dans le miroir, fait de la main droite un geste de terreur.
Le texte souligne la trouvaille : le miroir, enfin utilisé comme rétroviseur pour voir la forme « a tergo positam », montre désormais la tête de mort à la luthiste. L’homme barbu était autrefois interprété comme un magicien oriental, on considère maintenant qu’il s’agit du père Temps, une personnification plus édulcorée et bienveillante que le vieillard saturnien avec sa faux et son sablier.
La jeune femme et le Temps, 1540-99, collection particulière, image rdk
Cette version, dont le miroir et l’inscription ont été tronqués, est nettement plus explicite : la luthiste a la poitrine nue et la pomme du péché est posée sur sa table de toilette.
La Mort et la jeune fille (Death and the Maiden)
Ecole anglaise, vers 1570, Hall’s Croft, Stratford-upon-Avon
Cette reprise anglaise tardive semble jouer sur les deux registres : la partition est revenue et la jeune fille contitue à jouer sans regarder dans le miroir, mais sans non plus provoquer du regard le spectateur. On a l’impression d’un dernier instant d’insouciance, juste avant de basculer dans l’horreur du reflet fatal. C’est en tout cas ce que sous-entend l’inscription :
La mort est la limite ultime des choses
Horace, Epitres 1,16,79
Mors ultima linea rerum est
La coquette et l’homme au crâne
Ambrosius Benson (attr), vers 1540, collection particulière, image rdk
Cette dernière variante, dont on ne connaît que ce seul exemplaire, rompt avec les formules précédentes. La femme n’a plus de luth, et tient à la place le miroir : ce n’est pas une musicienne, mais bien une coquette. Et l’homme dans la force de l’âge n’a rien d’une allégorie : c’est un admirateur, ou un client, ou plus probablement un souteneur, qui n’a aucun intérêt à la rédemption de la fille. Aussi cache-t-il le crâne dans son dos, de sorte qu’elle est obligée de se retourner, ainsi que le lui conseille le cartouche. Le texte a en effet été subtilement modifié pour entériner ce renversement de situation :
devant le miroir tu te vois belle, regarde en arrière ce qui pourrait être : la même forme, ce qui dénote que tu n’es rien.
te speculum ante vides formosam respice quid sit est equidem formam quod notat esse nihil
Le texte prend ici l’impératif « respice » au sens littéral (regarde en arrière), tandis que dans la formule précédente il l’entendait dans son sens plus général (prends en considération).
L’absence de signature et de datation rend cette chronologie très hypothétique, mais il est clair que la version du « rétroviseur contrarié » (respice quid sit est) suppose connue la version la plus courante, celle du « rétroviseur » efficace (respice formam).
Le rétroviseur impuissant (SCOOP !)
Dans la seconde moitié du XVIème siècle, la maîtrise des positions dans l’espace permet à plusieurs artistes, notamment hollandais, d’affronter le thème de manière optiquement réaliste et symboliquement novatrice.
La Modération désarmant la Vanité
Jan van der Straet (Stradanus), 1569 (C) RMN Louvre, photo Jean-Gilles Berizzi
Sachant que le joug est l’attribut de la Modération, cette allégorie malicieuse (réalisée à Florence) peut très facilement se retourner dans tous les sens : le titre traditionnel du tableau était d’ailleurs l’inverse, La Vanité désarmant la Modération.
Pour Sylvie Beguin [66], tenante du nouveau titre, la Modération est la femme habillée qui vient de transmettre son joug à la Vanité, la femme nue qui se reflète dans le miroir et dont les accessoires inutiles viennent de tomber sur le sol.
Mais le tableau pourrait aussi être interprété comme l’Amour profane (la femme nue, soumise à la mort) et l’Amour sacré (la femme vêtue). Jacques Foucart [67] remarque que néanmoins, c’est bien cette femme vêtue qui porte les bijoux luxueux caractéristiques de la Vanité, tandis que le geste de pudeur (?) de la femme nue (la main cachant le sein) la remettrait dans le camp de la Modération. Le tableau serait en définitive une
« représentation de la Vanité transfigurée par la Modération… une figuration en quelque sorte dédoublée de la même vertu de modération. »
Je m’en tiens pour ma part à une lecture plus carrée, où chaque entité porte bien ses attributs conventionnels :
- La Modération, identifiée par son joug, foule d’un pied les colifichets de la Vanité tombés en désordre sur le sol ( colliers de perle et d’or, fiole de parfum, fleurettes).
- La Vanité, identifiée par son paon et par son miroir, regarde d’un oeil ironique cette « modération » si peu modérée qu’elle lève la cuisse en se tâtant le sein. Avec le même geste sensuel (doigts écartés en V), elle tâte derrière elle le coussin du lit sur lequel elle projette d’entraîner sa compagne, juste au dessus du couple de pigeons qui montre ce qui va se passer.
Ainsi est réhabilité le titre traditionnel du tableau : la Vanité désarmant la Modération (pour la mettre dans son lit).
Le squelette est à mon avis à comprendre avec un brin d’humour, dans le même esprit transgressif : relégué dans la ruelle, à l’emplacement favori du cocu, il observe ce couple de femmes affriolantes et tente de se faire voir dans un rétroviseur bien inutile, puisque personne ne s’intéresse à lui. Le miroir fatal fournit ici l’alibi moral permettant de montrer le tableau aux spectateurs innocents (et aux commentateurs trop sérieux)
Un couple menacé par le Temps et la Mort (Paar bedreigd door Vader Tijd en de dood )
Hieronymus Wierix, 1577-1619,Rijksmuseum
Le Temps, volant avec sa faux de moissonneur au dessus d’un champ moissonné, couronné de fruits et d’épis, atterrit devant un couple pour déposer un miroir, dans lequel on ne voit que la femme. Une bonne traduction de la légende est indispensable pour préciser de quel couple il s’agit, et comprendre les subtilités de l’image.
La Volupté, ce mal doux dont le Temps et l’Erreur
Hâtent le sort, en emporte plusieurs dans ses hameçons,
Et effémine les membres par des herbes plus intenses que la mandragore.
Luxuries predulce malum cui tempus et error
Accelerant fatum, multos imexuit hamis,
Membraque circaeis effeminat acrius herbis
Ainsi le Temps tente d’avertir la Volupté de sa fin prochaine, mais le miroir ne lui renvoie qu’elle même. Le partenaire qui la rassure en lui désignant ce reflet partiel n’est autre que l’Erreur.
Le dernier vers, qui n’a pas de rapport avec l’image, est une allusion à un passage connu de Claudien sur la Volupté :
La Volupté, ce doux mal, toujours soumis
A l’empire du corps, émousse l’esprit par son brouillard
Et effémine les membres par des herbes plus intenses que la mandragore.
Claudien, Eloge de Stilichon (De consulatu Stiliconis)
Luxuries : predulce malum que dedita semper
Corporis arbitriis, ebetat caligine sensus
Membraque circaeis effeminat acrius herbis
Allégorie de la transcience de la beauté terrestre et de l’amour,
Jacob de Backer (attr) , 1575-1600, collection particulière (Sotheby’s, 5 octobre 1995)
Ca tableau reprend la même composition en format portrait, d’où l’adjonction de Cupidon portant le cartouche : l’inscription est la même mais rendue plus difficile à comprendre par les abbréviations et l’absence de ponctuation. Les gestes aussi sont moins clairs, puisque c’est le Temps qui désigne le reflet à la Volupté, son partenaire restant passif.
Le tableau est probablement une élaboration malicieuse à partir de la gravure, destinée à fournir un double niveau de lecture :
- pour les non latinistes : un couple menacé par le Temps et la Mort ;
- pour les latinistes : la Fin prochaine de la Volupté, hâtée par le Temps et l’Erreur.
Allégorie de la Brièveté de la Vie
Cornelisz van Haarlem, 1617, Statens Museum for Kunst Copenhagen
Au siècle suivant, Cornelisz van Haarlem ne s’embarrasse plus de citations savantes et de reflets compliqués : il place un couple légitime, dans l’ordre marital ordinaire, en sandwich entre un père Temps désolé de leur annoncer la mauvaise nouvelle, et une Mort qui lève déjà sa flèche. Le rétroviseur ici ne crée pas d’effet de surprise ou de sens : bien au contraire, il contribue à édulcorer le tragique. Pas de crâne dans le reflet, et l’ensemble ressemble à une conversation sur le temps qui passe, entre gens de bonne compagnie.
Allégorie du Temps, de la Vie et de la Mort
Floris van Schooten, après 1617, collection particulière.
Dans cette reprise bienséante, cet autre peintre de Haarlem rhabille le couple et inverse la composition de Cornelisz tout en signant au même endroit : sur le rocher.
Le rétroviseur banalisé
Contemple ta gloire (beholde your glory)
Marque d’imprimeur de John Windet, 1606
On voit ici clairement l’effet rationalisant du rétroviseur qui évite le problème du reflet en vue directe : un seul crâne pour plusieurs personnages.
La Ville de Tolède
Meisner, Sciographia Cosmica. Das ist Newes Emblematisches Buchlein, edition de 1638, Volume 7, G 66
Cette curieuse encyclopédie ajoute, au premier plan de la vue de chaque ville, une allégorie morale assortie. Pour Tolède, c’est son université qui est honorée par l’image de la femme au rétroviseur, prise ici comme image de la Science et de la Prudence :
Toute la vie du savant est une méditation sur la Mort
La vie entière du prudent est une méditation sur la Mort
Tota vita sapientis est meditatio mortis.
Integra prudentis vita est meditatio mortis.
Le squelette anatomique, avec son cadran solaire, précise comment s’y prendre :
D’ici il faut observer chaque heure, chaque minute, chaque jour.
Quaeuque observanda hinc hora, minuta, dies
Allégorie de la Connaissance de Soi (Premier état)
Antonio Domenico Triva, 1683, Institut fur Kunstgeschichte der LMU Munchen
C’est ici Minerve qui montre le miroir, posé sur le sphinx (l’Enigme) et portant la chouette (la Connaissance). L’Homme mûr, dont la face est cachée en vue directe comme dans le reflet, est enseigné en latin par Socrate :
Connais-toi toi-même
Nosce te ipsum
Au mur, un tableau montre un vieillard assis lui-aussi devant un miroir, auquel le Temps donne ce bon conseil :
Quoi que tu fasses, fais-le modestement, et considère la fin
quiquid agis, pudenter agas, respice finem
Comme souvent, « respice finem » est aussi à prendre au sens propre : « regarde derrière toi la fin ».
C’est alors qu’on découvre à l’extrême-gauche le squelette, derrière trois faux amis superposés qui tentent de le masquer, et doivent être, de bas en haut, l’Envie (avec ses serpents), la Calomnie (qui hurle à l’oreille) et l’Inconscience de la jeunesse (l’Adolescent bouclé qui se tâte le coeur tandis que la main d’os caresse déjà ses cheveux).
A l’aplomb de l’Homme mûr, la tête de Janus résume son évolution :
- du côté tourné vers le Passé, un visage jeune, une vaine flûte, et un monstre au mains crochues ;
- du côté tourné vers l’Avenir, un visage barbu, les instruments de la Connaissance (livre, té, sphère, compas, fil à plomb) et le sphinx aux pattes de lion.
Les trois putti de droite, au delà du miroir de la Connaissance, évoquent probablement l’ignorance enfantine. Ils se livrent à des occupations futiles : tirer sur un fil attaché à son gros orteil, examiner son pied dans la pose du spinaire, tenir au dessus de la tête un objet indéfinissable. La signification précise de ces gestes ne devait pas être indispensable à l’interprétation puisque, dans le second état de la gravure, tronquée sur la droite, le putto debout a disparu.
Le rétroviseur modernisé
La Vérite et le Prince des mensonges
Edmund J. Sullivan, 1898, Illustration pour Sartor Resartus de Carlyle, p. 15 (photo George P. Landow)
Le miroir est ici l’attribut de la Vérité. Orienté comme il convient, il montre au lecteur le vrai visage du Chevalier.
Le critique
Herbert Cole, vers 1900
Un squelette tenant un long fume cigarette et un catalogue s’approche par derrière d’une belle femme s’admirant devant un bouquet de roses. Le vieux thème de la Coquette et la Mort est ici subverti, par la simple inscription « The critic » du verso, en une critique de la Critique, qui s’attaque sournoisement à la Beauté, pour la détruire.
Le sphinx,
Herbert Cole, vers 1900
Dans ce dessin, peut être conçu en pendant, Cole reprend les mêmes éléments, mais en les composant différemment. Le sphinx ailé, à la grecque, qui ornait le grand miroir, se trouve maintenant, à l’égyptienne, dans le paume de la femme pensive. Le miroir du fond, qui ne montrait rien, révèle maintenant au lecteur ce qui l’attend s’il s’approche de la femme fatale ; et les roses sont passées du mur à la table, posées maintenant devant le crâne comme un bouquet sur une tombe.
Le bijou qui pend comme un pendule à la verticale du globe s’oppose dans doute à la volute de fumée qui monte de la cassolette pour effleurer le hublot du miroir. La femme au sphinx, coiffée du pétase ailé d’Hermès, incarne ici le Mystère, entre la pesanteur de la Vie et la légèreté de la Mort.
Le sphinx
Herbert Cole, paru dans « Form; a monthly magazine containing poetry, sketches, » nouvelle série, volume 1 (1921-22). p 25
A noter cette autre composition de Cole sur le thème du Sphinx , qui scrute les mystères du Cosmos tandis que l’Humanité s’amuse.
Les perdants (The losers)
Couverture pour Our Fighting Forces N°164, février 1976
Le miroir fonctionne ici en rétroviseur ironique, mais à l’intention du lecteur seulement :
- « – Nous avons réussi, ramenons le miroir sacré en ville… »
- « – Oui, pas un seul allemand en vue ! »
4C Dans le rétro… le Diable
La Coquette du Ritter von Turn
Illustration pour « Der Ritter von Turn von den Exemplen der Gotzforcht vnd Erberkeit »,
Marquart von Stein, imprimé à Bâle par Michael Furter, 1493 (bois attribué à Dürer)
« D’une noble dame qui se tient devant un miroir, se brossant, et qui voit dans le miroir le Diable qui lui montre son derrière ».
« Von eyner edlen frowen wie die vor eym spiegel stund, sich mutzend vnnd sy jn dem spiegel den tüfel sach jr den hyndernzeigend »
La gravure illustre l’histoire d’une dame qui faisait attendre les paroissiens parce qu’elle mettait trop longtemps à se pomponner avant la messe :
D’une dame qui mestoit le quart du jour à appareiller
….Et si comme il pleust à Dieu, si comme pour exemplaire, ainsi comme elle se miroit à celle heure, elle vit à rebours l’ennemy ou mirouer qui lui monstroit son derrière, si lait, si orrible, que la dame issy hors de son sens comme demoniacle ; sy fut un long temps malade, et puis Dieux luy envoya santé, et se chastia si bien que elle ne mist plus grand paine à soy arroyer ne estre sy longue, mais mercya Dieu de l’avoir ainsi chastiée.
Geoffroy de La Tour Landry, Livre pour l’enseignement de ses filles, chap XXXI
Tout en suivant fidèlement le texte, l’image va plus loin que lui : elle fait du postérieur du diable une sorte d‘anti-visage féminin, où les cheveux sont remplacés par la queue, et tous les charmants orifices par la béance affreuse de l’anus.
« En permutant le haut et le bas, le miroir reflète un sexe qui montre son vrai visage, celui du désir débridé et obscène ; la belle devenue bête découvre son double menaçant, cet Autre inséparable de soi, témoin qui regarde et qui ricane créé par la conscience coupable ». [68]
Le livre étant imprimé à Bâle, il est plus que probable que cette trouvaille est un clin d’oeil au rétroviseur de la célèbre Danse macabre de la ville.
Illustration pour « Der Ritter von Turn », Strasboug, 1538
Quarante ans plus tard, l’édition strasbourgeoise reprend la même idée d’une manière plus séante, en supprimant l’anus béant.
Frontispice pour Der Zauber Teuffel (Le Diable magicien)
Ludwig Milch, 1564 Francfort
La figure du diable montrant son cul dans le miroir marque durablement les esprits, puisqu’on la retrouve dans cette composition , sans nécessité optique. Le magicien brandit à côté sa propre spécialité, un diable dans une fiole.
Le miroir est le vray cul du diable
Anonyme, 1580-1600
Cette gravure confirme que l’analogie de forme s’était hissée jusqu’à une sorte de dicton, illustré ici par la chatte à l’anus proéminent. La fonction de rétroviseur est soulignée en haut de la gravure, par l’exhortation que la coquette adresse à ses semblables :
« Le fou et moi l’un à l’autre ressemblons.
Tournez vous : le miroir montre ce que nous sommes »
Le texte du bas condamne les excès de la mode (fraises, touffes, perruques) qui ne sont que des signes de bêtise.
L’Orgueil
Stephen Batman, A Christall Glasse of Christian Reformation, 1569 (LUNA Folger Digital Image Collection)
Dans cette image édulcorée, le diable ne se présente plus à reculons. Le reflet suggère que la femme voit la main griffue, mais s’en moque. Le texte en dessous explique les détails :
« La femme signifie l’orgueil ; le miroir dans sa main la flatterie ou la tromperie ; le diable derrière, sa tentation ; la tête de mort sur laquelle elle pose le pied, signifie l’oubli de la vie à venir, d’où vient la destruction. »
Le fou repentant, Wahrmund Jocoserius, Wolgeschliffener Narren-Spiegel, 1730,
dessin de Wilhelm Stettler, gravure de Caspar Merian
Dans ce retournement de situation, le diable armé d’un éventail vient en personne exhorter la coquette à se repentir :
Je ne parle ici que des fous
Mais la femme aussi a un grain
Alors elle mérite une place.
Sont-ils égaux dans la repentance ?
On trouve les hommes à côté
pas exempts de cette faiblesse.
Ich rede hier zwar nur von Narren
doch hat ein Weibsbild einen Sparren
so schicket sie sich gleichfalls her
Sind sie dem Aufbuß gleich ergeben
findt man die Männer doch daneben
von dieser Schwachheit auch nicht leer.
4D Dans le rétro… autre chose
La Prudence
Stalle provenant du château de Gaillon, 1509-18, Basilique de Saint Denis ( [69], fig 154)
Le miroir de la Prudence reflète, autour de la Croix, trois instruments de la Passion : l’échelle, le fouet et les pièces d’argent.
La Prudence
Ethiques d’Aristote Livre II. Les vertus théologales et les vertus cardinales, 1453-54, BM Rouen, Ms I 2 fol 14v
Pour Cécile Meneau d’Anterroches [69], ce détail, parmi de nombreux autres, permet de rapprocher les vertus de Gaillon de celles du manuscrit de Echevins de Rouen. Dans les deux cas, il s’agit de souligner qu’un des aspects de la Prudence est de préparer à sa propre mort, en prenant exemples sur celle du Christ (dans le manuscrit, la Prudencetransporte en plus un cercueil posé sur sa tête, et tient un autre de des attributs courants, le crible).
Le transfert des instruments de la Passion, de l’écu au reflet, résulte d’un souci de concision graphique, mais aussi d’un évolution notable, en trois-quarts de siècle, de la symbolique du miroir : l’attribut passif de la Prudence est devenu un instrument de piété et de méditation.
vers 1470, Chantilly, Musée Condé, MS 0282 (0491) fol 240v
Cette formule funéraire de la Prudence (cercueil et instruments de la Passion) est ici clairement expliquée par les vers de l’écriteau :
De bonne coustume s’amort (se mortifie)
Qui pense souvent à sa mort
En beau miroir sa face mire
Qui son estat voit et remire,
Mémoire de la Passion,
Targe (écarte) mâle tentation.
Discrétion (discernement) est ou gredier (crible)
Quant du grain retrait le paillier (enlève la paille)
Ce n’est que peine et décevance
D’amasser planté de chevance (quantité de biens)».
La Prudence est clairement présentée comme l’antithèse de la coquette : son miroir la protège des hommes, elle discerne le bien et le mal et méprise les pierres précieuses de son sac.
La femme « idéale » (Ein weyse Frauwen)
Anton Woensam, vers 1525
On retrouve la même idée dans cette gravure allemande contemporaine : La croix qui apparaît dans la miroir transforme l’attribut de l’Orgueil en objet de piété :
« Je mépriserai l’orgueil et me regarderai dans ce miroir, par qui Dieu nous a rachetés. Que toute femme fasse ainsi, c’est mon conseil. »
Comme on pouvait s’y attendre, le cadenas sur la bouche évite les paroles « nuisibles ou blessantes pour l’honneur d’autrui ». A l’inverse, la clé sert à ouvrir les oreilles aux paroles de Dieu. Les serpents autour de la taille protègent la femme honnête « du poison du scandale, de l’amour mauvais et du jeu honteux ». Les pieds n’ont rien de diabolique : ce sont des sabots de cheval, permettant d’être « inébranlable dans l’honneur et ne pas tomber dans le péché » [70]
L’homme sage et la femme sage
Cornelis Anthonisz. Theunissen, 1550-55, British Museum
La gravure a été reprise telle quelle dans cette figuration du couple idéal : l’homme ne regarde pas pas la Croix dans le reflet, mais la porte en collier sur son coeur.
La Vue, dans la série Quinque Sensuum Figurae,
Crispijn de Passe, 1599, Cologne
Fais confiance, mais à qui ? Regarde…
FIDE , SED CUI , VIDE
En vue directe, le spectateur voit une chouette sur l’épaule de l’homme. Dans le rétroviseur, la belle comprend qu’il s’agit d’une farce (Eul in Spiegel) et fait les cornes au plaisantin.
Le petit oiseau, mon frère Iokel, ment en réjouissant tes yeux. Il ne fait pas trop confiance à la « chouette dans le miroir » , celui qui veut rester lucide.
Das Vöglin , bruder Iokel mein, treugt und erfreut die Augen dein. Der Eul in Spiegel trau nicht zu vil, wer ungenarret werden wil.
Samuel van Hoogstraten, Frontispice pour Der roomschen Uylen-Spiegel, 1671, Amsterdam
Dans cet ouvrage satirique du pasteur de Dordrecht Jacobus Lydius, le personnage traditionnel Till Eulenspiegel (littéralement Chouette-Miroir) exerce ses malices à l’encontre de l’Eglise catholique : le moine, devant la chouette facétieuse qui lui apparaît dans le miroir, se transforme en volatile et s’élève terrorisé dans le ciel.