J’avais connu Antony Hegarty grâce à Björk, sur Volta. C’était en 2007, de retour de Séville. Puis, j’ai découvert ses albums avec The Johnsons I Am A Bird Now et The Crying Light.
Quelques années plus tard, après quatre albums d’Antony And The Johnsons, mais surtout suite à ce qu’Antony allait enfin pouvoir devenir, oui enfin !, elle-même, ANOHNI déboulait, sans son groupe de toujours, et avec une nouvelle identité à la fois civile et artistique. Seule, mais toujours aussi bien accompagnée : Hudson Mohawke et Oneohtrix Point Never l’aideront pour Hopelessness et Paradise, l’album de 2016 et l’EP de l’année suivante.
Nouveau bond en avant, début juillet 2023, ANOHNI revient, et cette fois-ci, à nouveau avec The Johnsons ! L’image est importante. ANOHNI le sait, elle en a conscience depuis toujours. Et My Back Was A Bridge For You To Cross nous colle immédiatement à Paradise et sa série de portraits de « femmes », et on retrouve d’ailleurs l’une d’elle à l’intérieur du livret. Ici donc, en couverture, l’activiste féminine pour les droits humains Marsha P. Johnson. Bien entendu, je n’oublie pas, par exemple, quand ANOHNI a repris « Woman » sur l’album The Versions de Neneh Cherry l’an passé.
Anohni est, entre autres, secondé par Jimmy Hogarth – le guitariste a également aidé à la composition et à la production des onze nouvelles chansons. Tout l’engagement de l’artiste anglais installé depuis de très nombreuses années à New York transparaît encore et toujours dans ses paroles, et cela dès le titres des chansons. Pour autant, cela n’enlève absolument rien à la beauté de sa voix, ainsi qu’à celle de l’accompagnement musical, rock comme il l’avait rarement été auparavant.
My Back Was A Bridge For You To Cross réussit la prouesse de reprendre à la fois là ou ANOHNI d’abord et Antony And The Johnsons ensuite, nous avaient laissés à deux périodes-clés de l’artiste, tout en nous offrant une nouvelle palette de couleur qui, maintenant que les volets gauche et droit de ce qui ressemblerait à un triptyque musical, lui permet de créer un panneau central unificateur et révélateur de l’intensité émotionnel de l’œuvre d’ANOHNI, indépendamment de qui l’accompagne, de ce qu’elle poursuit, de qui elle est. Oui, elle a définitivement créé un pont entre nous toutes et tous.
(in Heepro Music, le 11/08/2023)
_
Voir aussi :