Un article de Henry Bonner
Les gens ont tendance à accaparer les ressources dont ils ont envie et ce afin de poursuivre les projets ou plaisirs qui leur tiennent à cœur, et c’est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit des ressources des autres : ils trouvent ainsi presque toujours le moyen de justifier l’usage de l’argent des autres pour leur propre intérêt. Au travers des âges, ils évoquent des justifications récurrentes, le tout en assurant utiliser l’argent à bon escient, que ce soit pour sauver les espèces menacées, par humanitarisme ou pour soutenir une cause, un honneur perdu ou en péril ou même pour la gloire.
Cette semaine, en visite dans la région Poitou-Charentes, je me rendais dans un concert de piano et violon organisé dans une grande propriété locale. Une centaine de personnes, peut-être, ont participé à la soirée, à savoir une performance musicale de haut vol d’une pianiste mexicaine et d’un violoncelliste français membre de la Garde républicaine, selon son introduction.
Et au passage, l’événement a aussi servi de rappel de l’importance du gouvernement à chaque tournant de la vie, peut-être même plus particulièrement à la campagne : les exploitations agricoles, expliquent beaucoup d’agriculteurs, ne marchent pas sans les subventions et distributions de la PAC. Les bâtiments des fermes portent des panneaux photovoltaïques, parfois payés par un investisseur qui partage les subventions ou la revente du courant (d’ailleurs à prix fixé par la loi) avec l’agriculteur.
De même, le concert de musique a eu lieu non pas grâce aux bénévoles et aux éventuels mécènes et à la vente de billets au public, mais bien grâce aux “largesses” d’un grand nombre d’organismes culturels.
La générosité des élus
Les associations culturelles de la commune et de la région, qui tirent leurs budgets du contribuable, semblent ainsi payer le gros des coûts de la présentation. Une grande partie de la vie tourne ainsi autour des subventions et des aides. Les musiciens et organisateurs passent dix mois de l’année, selon eux, sur la préparation du spectacle, l’organisation du programme, le recrutement des musiciens, et la paperasse des administrations.
Les spectateurs assistent ensuite à une présentation. Néanmoins, aucune des personnes sur les lieux ne paie en réalité le coût réel et complet de leur divertissement.
Les organisateurs, quant à eux, n’ont pas le souci de la rentabilité : ils peuvent dépenser plus qu’ils ne peuvent récolter en revenus de la part des spectateurs ou mécènes et le public présent ne paie qu’une fraction du coût réel de la soirée.
En revanche, la plus grande partie des gens qui couvrent la facture ne verra pas l’ombre d’un piano, et n’entendra pas de notes de musique. Cette grande majorité paiera le coût du divertissement des autres. Bien sûr, si elles sont interrogées (ce qui est rarissime), les autorités locales ou régionales lui affirmeront sans rire qu’il en a obtenu plus de culture.
L’argent des autres
En réalité, chacun peut payer les distractions qu’il souhaite. Il peut choisir de dépenser son argent sur un compte Netflix, une radio, ou s’offrir un concert de musique au prix de marché. Rien ne l’empêche d’acheter un billet à la représentation qui lui plaît. Rien n’empêche aux organisateurs de demander le juste prix aux clients.
Certes, une bonne partie des gens n’a pas assez envie d’un concert de musique (surtout au prix réel du marché), et tendra à rester chez elle. Les musiciens n’ont peut-être pas envie de faire de présentation pour le peu de rémunération qu’ils toucheront sur le marché libre. Sans les subventions, les organisateurs passeront peut-être les dix mois de préparation requis chaque année sur d’autres types d’activités. Peut-être même changeront-ils de métier, en mettant fin à la plus grande partie de ces événements.
Le contribuable typique, qui ne profite en rien de la mise en scène d’une soirée de Mozart et de Beethoven dans un village au milieu de la campagne, ne perd rien au change, lui. Il ne souffre pas de perte de culture ; il ne souffre même pas de réduction de son train de vie lorsque les aides pour la culture ne coulent plus vers une poignée de mains dans le milieu des artistes.
Pourtant, la quantité d’aides tend vigoureusement à la hausse d’année en année. Les artistes et spectateurs remercient pour leur générosité – avec l’argent des autres – les politiciens de leurs régions, et plaident bien sûr pour davantage de soutiens (lire : encore plus de générosité forcée).
En pratique, tout ceci permet à certains d’éviter les réalités parfois âpres du marché. Il en résulte alors des événements culturels, des spectacles, des panneaux photovoltaïques et des exploitations agricoles dans lesquels aucun des partis à la transaction n’a de souci pour la rentabilité économique ni pour la réalité. Tout le monde continue de vivre dans le confort des aides et allocations, et tout le monde soutient évidemment ces dépenses…
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