Critique de Porn for the Blind, de Victorien Robert, vu le 14 juillet au Théâtre des Béliers
Avec Lison Pennec, Xavier Martel, Victorien Robert, mis en scène par Victorien Robert
Porn for the blind. J’ai d’abord cru que c’était un spectacle théorique, le genre de truc où « l’artiste a testé pour vous… » et raconte (il y en a un dans le style au Train Bleu, Camgirl chronicles, pour les intéressés). Intriguée par le titre, attirée par l’affiche, je me suis finalement penchée sur le résumé du spectacle. Franchement, je suis très curieuse. Et heureuse à l’idée d’y retrouver Lison Pennec !
Porn for the blind, c’est le nom de la boîte dans laquelle postule Eva pour essayer de retrouver cet homme aveugle qu’elle a seulement croisé et dont elle ne sait rien, sinon sa cécité. Comment faire pour retrouver quelqu’un sur qui on n’a aucune info ? Qu’est-ce qui relie tous les hommes trentenaires entre eux ? Le porno, sans doute. Or quand on est aveugle, le porno, ça s’écoute. Et il faut bien des gens pour le raconter. C’est peut-être par là qu’elle le retrouvera.
Bon, entre nous, je ne sais pas s’ils ont choisi le bon titre. Il ne rend pas hommage au spectacle. A l’originalité, à la douceur, à l’humour qui se cache derrière. Porn for the blind, c’est avant tout une histoire d’amour. Et c’est malin. Parce que c’est assez inattendu. Et parce qu’elle est très jolie, cette histoire d’amour. Elle est bien écrite, pleine de tendresse, étonnante. Elle est presque vouée à l’échec, mais elle est racontée avec tellement d’espoir, tellement de sincérité et de sensibilité par Lison Pennec qu’on se retrouve à y croire. A l’espérer.
Et elle permet de faire entendre pas mal de choses, cette histoire. C’est malin de juxtaposer ainsi le romantisme et la crudité du porno, et de ce qu’il peut impliquer. On ne se rend pas forcément compte, mais au milieu de la fiction, quelque chose passe. Par l’humour, d’abord : les scènes de description des films porno sont évidemment drôles parce que tellement indigestes. On a beau connaître cette industrie, c’est peut-être plus marquant à écouter qu’à voir. L’idée fonctionne bien – et la merveilleuse voix de la comédienne n’y est pas pour rien – et ne flirte à aucun moment avec la vulgarité.
Mais aussi par des éléments plus durs, des histoires parallèles bien dosées – il n’en fallait pas plus – qui viennent s’intercaler de manière presque hachée avec la vision poétique presque idéaliste du personnage d’Eva. Ce n’est pas agréable, et on se réfugie rapidement dans l’échappatoire bienvenue qui nous est proposée et qui devient une idée évidente, un avenir tout tracé. Et on en vient à se demander ce qu’attend cette industrie pour se transformer. Malin, on vous avait dit.
Un bien joli spectacle, qui appuie délicatement sur le coeur tout en soufflant dans le cerveau.