Critique de La voix d’or, d’Eric Bu et Thibaud Houdinière, vu le 10 juillet 2023 au Théâtre Actuel
Avec Sandrine Seubille, Élodie Menant, Grégory Benchenafi, Marc Citti, Benjamin Egner, et Charlie Fargialla, mis en scène par Eric Bu
A l’annonce de La voix d’or, je ne vais pas vous mentir, j’étais hyper emballée. Je suis Marc Citti depuis des années, j’adore Grégory Benchenafi, je commence à croiser souvent Elodie Menant et Charlie Fargialla sur les plateaux pour mon plus grand bonheur, et surtout, surtout, surtout, c’était un spectacle musical ! Sur le papier, une jolie promesse, donc. Franchement, j’en attendais tellement, que je ne pouvais qu’être déçue.
La voix d’or est une fresque familiale (basée sur l’histoire des grands-parents de Thibaut Houdinière – qui coécrit la pièce) : Charles Gentes et Christine Vercel, vedettes de la chanson d’après-guerre, qui ont vécu une histoire d’amour tumultueuse, nourrie autant de passion que de jalousie. Leur histoire va se mettre en scène sous nos yeux, à travers les yeux d’un auteur en panne d’inspiration.
On pourrait se dire que c’est facile la chanson. Surtout pour moi. Je suis bonne cliente. Un comédien qui se met à chanter sur scène et hop mes yeux font des coeurs. Mais ce n’est pas juste ça. Ce n’est pas juste un spectacle musical avec les chansons qui vont bien. C’est un spectacle ultra bien fichu, ultra bien pensé, ultra bien équilibré et surtout plein de surprises. Je pensais que je savais ce que j’allais voir, et ils m’ont fait le meilleur des cadeaux : ils m’ont étonnée.
Je ne sais pas comment ils ont fait. Pourtant je le connais le truc de l’auteur qui invente sa pièce au fur et à mesure et la voilà qui se construit sous les yeux des spectateurs. Ce n’est pas révolutionnaire et pourtant ici il y a une touche en plus. Un petit je ne sais quoi d’inventif qui fait que ce spectacle sort du lot. C’est peut-être cette manière de mêler la réalité à la fiction, simplement en petites touches, qui permet de surprendre le spectateur à chaque fois. Ou ces chansons si différentes qui se mêlent sans jamais se finir vraiment, créant un foisonnement et un renouvellement constant.
Ou c’est peut-être Marc Citti. Je connais bien le jeu de Marc Citti, ça fait un bout de temps que je le suis. Mais là je vais manquer de superlatifs. Il est un maître de cérémonie absolument exceptionnel. Il mène la danse avec une énergie folle, touchant, drôle, exaltant, et surtout incroyablement généreux. Son Claude François est magique, son Jean Nohain est brillant. Et comme si ça ne suffisait pas, il est un chef d’orchestre qui met en valeur ses partenaires. Benjamin Egner est la face de cette pile électrique, le yang du yin qu’est Marc Citti, et le complète à merveille, tempérant la tempête par une attitude qui se veut calme, parfois fiévreuse, probablement un peu dépassé. Sandrine Seubille, dont je découvre avec bonheur la merveilleuse voix, apporte une jolie complexité à ce personnage de grand-mère. Gregory Benchenafi, que je retrouve sur scène, était le meilleur choix pour incarner ce rôle, avec ses yeux qui semblent voir au-delà de ce qu’ils regardent et cette gueule d’ange qui soudain devient démon. Charlie Fargialla dégage avec beaucoup d’humanité la leçon de résilience de cette histoire. Elodie Menant apporte une touche de douceur bienvenue dans cet ensemble. Tous sont formidables. Ils donnent tant qu’on en devient boulimiques et qu’on en voudrait encore. Bravo !
Un spectacle qui mérite une médaille d’or. Sertie de diamants. Et doublée de platine.