Dans ce recueil, Jean-François Berger frappe quinze fois. Ce sont des Frappes courtes et bien ajustées. Elles nourrissent les réflexions du lecteur qui les reçoit comme il peut.
À l'instar de l'auteur, ces nouvelles, qui remontent parfois le temps, le font voyager de par le monde, en conservant des attaches en Suisse: Val de Ruz, Genève, Vallée de Joux.
Attentisme en France en 1958, évasion en Crète, démarches, jeux et immersion en Inde, farniente en Malaisie, missions à Timor, en Roumanie ou dans les Balkans, le dépaysent.
Malmené parfois, pour son bien de lecteur, même s'il n'a pas quitté un jour la Suisse, il est comme Corinne: Dans son for intérieur, plénitude et insécurité cohabitent en alternance.
Pestant contre la bureaucratie de son pays et de ses voisins, de plus en plus empêtrés dans la paperasse, il se console en découvrant les tribulations d'un récipiendaire de colis à Delhi.
Face à la pauvreté des pays lointains, il se dit que dans nos pays développés, on n'est pas forcément plus heureux. La prière d'Oscar Wilde, frappée au coin du bon sens, le tempère:
Mon Dieu, débarrassez-moi de la souffrance physique, je me charge de la souffrance morale!
S'il est au soir de sa vie, qu'il a fait partie des puissants, lui est destinée la fable du serveur qui transmet son plateau à son client sidéré par la note qu'il lui présente et qu'il a attendue:
Nous autres tenanciers du monde, nous oublions parfois de régler l'addition...
Francis Richard
Frappes courtes, Jean-François Berger, 136 pages, Éditions de L'Aire