Le spectateur

Par Belzaran

Titre : Le spectateur
Scénariste : Théo Grosjean
Dessinateur : Théo Grosjean
Parution : Avril 2021


J’ai découvert Théo Grosjean avec sa bande-dessinée « L’homme le plus flippé du monde » publiée sur Instagram. « Le spectateur » est un roman graphique sombre et glauque, sans humour, ou même son dessin est moins reconnaissable. Le tout pèse 166 pages et est publié dans la collection Noctambule chez Soleil.

Un ouvrage ambitieux et réussi

Samuel nait muet. Il ne pleure même pas après sa naissance. Il reste à regarder ses parents, les yeux grands ouverts. Pendant toute la durée de l’ouvrage, on va l’accompagner depuis sa naissance et voir le monde avec ses yeux. Il ne dira donc rien et restera un spectateur.

Le parti pris est original puisque le personnage principal ne s’exprime jamais. Évidemment, cela va le mettre dans de mauvaises postures. On va ainsi découvrir sa vie, petit à petit, une vie miséreuse et glauque. Dès le départ, le malaise est présent puisque le personnage gêne par son mutisme tout le monde (à commencer par ses parents). Mais au fur et à mesure, on se rend compte que c’est le monde extérieur qui est le plus perturbant plutôt que Samuel.

Si le procédé pourrait risque de lasser, ce n’est pas le cas. Théo Grosjean utilise de nombreuses ellipses pour dynamiser le tout en se concentrant sur les moments importants de la vie de son personnage. Tout se recoupe au fur et à mesure, rien n’est gratuit. La lecture se révèle plus prenante que prévu. Le tout est rythmé par le gaufrier de 6 cases carrées qui ne bouge pas du début à la fin.

Au niveau du dessin, je n’ai pas reconnu immédiatement Théo Grosjean. Son trait est pourtant proche de ses ouvrages autobiographiques. Mais il est ici débarrassé de ses excès et les points de vue sont beaucoup plus variés. La bichromie dans les tons bleu/vert est parfaitement adapté à l’ambiance, de même que la couleur noire des gouttières. En cela, Noctambule continue à soigner la présentation de ses livres.

Si j’ai de la sympathie pour Théo Grosjean, « Le Spectateur » est un cran au-dessus de ses autres productions. J’espère qu’il ne s’enlisera pas à raconter sa vie et nous proposera de nouvelles histoires ambitieuses comme celle-là.