Un article de Henry Bonner
Cette semaine, je rentrais à pied, à Paris, d’un anniversaire célébré dans un établissement près des Grands Boulevards. Vers le Palais Royal, je trouve subitement un grand rassemblement de personnes. Puis des CRS arrivent en formation de bataille.
Des groupes de casseurs ou manifestants, ou de simples opportunistes, lancent des cris sur des touristes portant toujours leurs sacs de course… qui s’enfuient, inquiets. Après une attente, les manifestants ont disparu, et la circulation reprend dans les rues en dépit d’une odeur de bombes à lacrymogène.
Cette situation arrive à point pour illustrer pourquoi les dirigeants continuent, quoi qu’il arrive – quoi qu’il en coûte, même – en tout temps et en tout lieu de dépenser tous azimuts, même lorsque les déficits détruisent la valeur d’une monnaie et mettent en péril une nation.
Ainsi, chacun des CRS et policiers touche un salaire. Chaque allocation coupée ou fonctionnaire licencié crée un risque supplémentaire puisque cela fournit potentiellement une raison supplémentaire à l’embrasement. Dès lors, les élus choisissent la facilité : avec l’argent gratuit des autres, ils paient pour la tranquillité. La leur et, dans une certaine mesure, celle du pays, pour un temps au moins. Après des années et des décennies de choix opérés de la sorte, la France dispose désormais de l’État le plus lourd de tous les pays développés.
“Impasse libérale”
Ce mois-ci, le journal Alternatives Économiques publie un dossier de recherche spécial au titre croustillant et prometteur de “L’impasse libérale”. Dans celui-ci, le journal prétend – avec l’aplomb caractéristique des cuistres et des gauchistes – donner les raisons pour lesquelles le gouvernement français, en réalité, ferait de moins en moins de choses “pour les citoyens”.
Cependant, un bref coup d’oeil au graphique suivant, partagé récemment, permet d’apprécier la croissance soutenue de l’État d’année en année.
Comme on le voit, les dépenses atteignent maintenant près de 60 % du produit intérieur brut (PIB) en ce moment, contre 35 % en 1960. La France engloutit plus de dépenses publiques rapportées à la taille de son économie que tout autre pays du monde développé. L’Italie, la Grèce, le Japon, ou même l’Argentine, tous arrivent à la traîne en comparaison de la France.
Rassurez-vous, chez Alternatives, vous ne trouverez pas de réponse à cette contradiction. Leurs folliculaires préfèreront par exemple pointer un manque de moyens (prétendent-ils) pour les psys à l’école, ce qui constituerait pour une un élément de preuve de “l’impasse libérale” dans laquelle la France s’est trop moelleusement enfoncée… Et de façon caricaturale, dans cet dossier spécial dont le sujet est pourtant “l’impasse libérale”, vous ne trouverez rien pour justifier l’idée d’un tournant vers le libéralisme en France.
En revanche, derrière le point de vue des auteurs, vous avez en réalité une vision sur le déroulement des choses dans le monde et dans la vie des gens. Celle d’Alternatives (et de la presse subventionnée française en général) justifie l’invention, en permanence, de nouvelles mesures de contrôle, de nouvelles distributions, de nouvelles subventions, de nouvelles taxes, de nouveaux impôts.
La création d’argent achète la paix
Ainsi, depuis l’année dernière par exemple, les interventions du gouvernement ciblent les prix de l’énergie.
En général, le contrôle des prix revient à imposer un plafond que les vendeurs ne peuvent dépasser. Sans surprise, ce contrôle des prix aboutit toujours à deux choses : l’apparition de pénuries d’un côté et la création d’un marché parallèle de l’autre, avec des prix bien supérieurs. Sans surprise, pendant le Régime de Vichy, les contrôles de prix annoncés par Pétain en 1940 ont provoqué des pénuries et mené à un essor du marché noir, sur lequel les prix ont grimpé de trois ou quatre fois pendant la guerre.
Pour éviter ce phénomène, le gouvernement actuel a procédé autrement cette fois-ci : le système de contrôle des prix du gaz et de l’électricité en cours diffère des méthodes du passé car les producteurs – comme TotalEnergies ou Equinor – touchent en fait le prix de marché et conservent ainsi leur rentabilité – comme en attestent les dividendes quatre fois plus élevés que la norme chez Equinor, par exemple. Et pour que le plafond soit respecté, c’est le gouvernement qui paie la différence entre le prix officiel et le prix de marché. Les plafonds de prix dans l’énergie reviennent en fait à des distributions à l’électorat. Ils reviennent à des formes de subvention à l’instar des chèques-inflation ou des Prêts garantis.
En somme, s’il n’y a pas de marché noir et pas de pénurie, il y a un creusement phénoménal de la dette (qui vient de dépasser 3000 milliards d’euros, à plus de 110% du PIB), et une distribution cachée d’argent à l’électorat par ce mécanisme de remboursement de différence entre prix réel et prix à la pompe.
On peut raisonnablement imaginer qu’après la crise de l’énergie, d’autres prétextes surviennent pour continuer la distribution gratuite d’argent des autres (notamment des générations futures qu’on ne doit protéger que contre des températures agréables et surtout pas contre la misère financière). Et dans ce contexte, les émeutes en France en ce moment pourraient fournir d’excellentes raisons pour remettre une couche de déficits et d’endettement.
En dépit du resserrement qui a lieu en principe, les autorités vont remettre en marche les déficits et l’endettement à la moindre anicroche, aux dépens de la valeur de l’euro… Peu importe la raison : ce sera pour éviter les effets de la sécheresse ou des inondations (ou les deux en même temps), lutter contre la méchante inflation et les prix en hausse dans les magasins, ou, comme actuellement, pour éponger les dégâts des violences et calmer les émeutiers… ou encore d’autres choses.
Je prépare, pour le 4 juillet, une présentation à mes lecteurs de la plus grosse déformation de marché de notre ère (ce n’est pas l’énergie), et les conclusions de mon équipe d’analystes sur comment préparer votre patrimoine. Vous pouvez nous suivre gratuitement en cliquant ici.