Apprendre à voler (en dix mille leçons faciles) est un recueil poétique de l’écrivaine américaine Barbara Kingsolver, publié initialement en anglais en 2020 puis, dans sa traduction française, par les éditions Rivages, en 2022.
J’ai découvert ce livre par hasard dans une grande librairie parisienne du Quartier Latin, dotée d’un rayon poésie tout à fait riche et intéressant.
Ce recueil poétique aborde des thèmes du quotidien, autobiographiques et souvent liés à la famille de la poète (sa mère, son père, sa sœur, sa fille, son mari, sa belle-mère, etc.) mais aussi à ses voyages en Italie ou à son observation des plantes et des animaux. C’est une poésie imagée, concrète, vivante, bien ancrée dans notre monde terrestre, et qui est assez agréable à lire. Le ton est tantôt léger et joyeux tantôt grave et douloureux, avec une place non négligeable accordée à la mort de certains proches, ou aux conflits intra-familiaux.
Note Pratique sur le livre
Éditeur : Rivages
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Céline Leroy
Nombre de pages : 123
Biographie de la poète
Née en 1955, titulaire d’un diplôme de biologie, (re) connue pour son engagement écologiste visionnaire et son mode de vie rural choisi au cœur des Appalaches mais aussi pour son féminisme joyeux et ferme, Barbara Kingsolver écrit des romans qui inscrivent ces grands thèmes dans la fiction avec souffle, rythme et légèreté. Elle est l’auteure d’une dizaine de livres, tous publiés aux éditions Rivages, dont L’Arbre aux haricots (1995), Les Cochons au paradis (1996), Un Jardin dans les Appalaches (2008), Dans la lumière (2013) et Des vies à découvert (2020).
(Source : éditeur)
**
Choix de deux Poèmes :
Page 13
Apprendre à boire de l’eau quand il y a du vin
Apprendre à ne pas bouger de ce bureau quand le soleil fait la roue pieds nus dans l’herbe –
Apprendre la marche prudente sur le sentier qui soutient le pas vif et libre d’un cerf –
Apprendre à rentrer chez soi quand la grive des bois promet la joie ivre et liquide du crépuscule –
Apprendre à résister au baiser, au corps défendu qui pince la longue corde vibrante du manque –
Apprendre à boire de l’eau quand il y a du vin –
Avant je connaissais tous ces objets en forme de brique, les prenais pour la monnaie de la survie.
Aujourd’hui j’ai vécu et je sais.
Page 65
Par les racines
Accroupie dans le jardin
genoux aux coudes, poings dans la terre
du verger retirant les mauvaises herbes
autour des racines trempées de boue
de mon maïs soumis,
fouillant le sol qui me nourrit,
sentant son indignation, je me retrouve
subitement à arracher
les cheveux du monde. Les souvenirs coulent
en moi comme une eau chaude : mon frère
a neuf ans. J’en ai sept, aussi loyale que l’oxygène
mais encore assez proche de lui en taille
pour que nos disputes deviennent luttes
à mort. Nos parents
pensent, un peu tard, aux avantages
de l’enfant unique. Nous sommes
prêts à tout, genoux à vif brûlés
par l’herbe, poings dans la terre,
mes doigts emmêlés dans ses cheveux
qui tirent, ne s’arrêtent pas : mon Dieu
la terreur de ce désir incontrôlable de
blesser celui sans qui vous ne pourriez vivre.
**