Il faut aller à Guer ! Il faut découvrir la cuisine du chef Baptiste Denieul !
Autant de l’extérieur la maison ne présente pas de charme particulier, autant à l’intérieur il se passe beaucoup de choses et non des moindres. La Maison Tiegezh (« famille », en breton) porte bien son nom car c’est bien une histoire et une affaire familiale qui s’est déroulée et se déroule encore aujourd’hui.
Baptiste Denieul est pratiquement né dans une crêperie. Ses grands-parents, ses parents l’ont tenu dans la ville de Guer avec grand succès. Le jeune Baptiste était à la fois fasciné par cette ambiance, ce succès, mais il ne se voyait pas travailler la crêpe ! D’autres envies, d’autres ambitions naissaient déjà dans son cerveau plein d’idées et de projets. Il se forme auprès de quelques belles pointures de la grande gastronomie. Jean-Marie Baudic, au Youpala Bistro à Saint-Brieuc, une école de la liberté en cuisine et de la création tous azimuts. Dans un autre genre mais tout aussi important, Christophe Moret au Plaza Athénée puis chez Lasserre à Paris, et Eric Fréchon au Bristol. Et voila notre chef fin prêt à prendre son envol dans sa propre maison et ses cuisines.
C’est chose faite en 2015. Deux en cuisine et sa femme Marion en salle et en gestion du lieu. Aujourd’hui, elle a rajouté la corde des vins à son arc avec la construction de la carte et des accords mets et vins. Deux ans plus tard, en 2017, arrive l’étoile Michelin. Le couple structure les équipes cuisine et service. En 2021, l’étoile verte Michelin se rajoute au palmarès et récompense une exigence du chef pour des produits locaux, dans une sélection pointue qui donne à ses plats des saveurs sans failles. Ses propositions de la carte se définissent d’ailleurs comme un voyage à travers les richesses de Brocéliande, la fameuse forêt toute proche. Cette aventure gustative bretonne se déroule en 5, 6, ou 7 étapes.
Ce voyage se déroule en restant sur place dans une salle agréable, aérée, tables bien espacées, donnant par ses grandes vitrées sur un jardin. Marion Denieul gère le service des vins et de la salle entourée d’une équipe jeune, exclusivement féminine (et les quotas alors ? !) particulièrement sympathique et efficace.
Après une infusion aux jeunes navets qui aurait plus sa place dans un magazine santé pour jeunes filles en fleurs, les amuses-bouche définissent sans coup férir le style du chef. Ils sont quatre et tous réussis dans leur genre. Galette rennaise, saucisson ; pain soufflé, fromage, liqueur de noix ; radis beurre, tartelette ; bœuf mayonnaise. Sans entrer dans le détail des compositions, tous ont des saveurs variées, marquées et originales. Un beau festival avant d’accompagner le chef dans son voyage/ découverte de sa cuisine.
Sur table, une bien belle boule de pain maison à base de blé breton ancien et un beurre demi-sel au lait cru d’une ferme voisine, fort goûteux.
Courgette onctueuse, condiment à l’ail noir, viennoise de sarrasin, vinaigrette celtique. Fin mais goûts assez puissants et la courgette un peu écrasée par l’ail noir (nouvelle coqueluche des chefs ?) et la vinaigrette. Texture molle pour un démarrage tout en douceur. Agréable.
Sablé champignon d’ici, jaune d’œuf confit, praliné noisette, écume de champignons, truffe d’été. Construction du plat en vertical. Un ensemble harmonieux, discret, mesuré. Saveurs délicates, assez fines sur des variations de texture du champignon.
Carotte rôtie au gingembre, ketchup de carotte, safran breton, béarnaise aux herbes, caviar. Magnifique plat ! Goût, harmonie, saveurs marquées. Un plat pensé et à la réalisation parfaite. Une douceur générale qui semble être la marque du chef, pour une assiette épurée, sans fioritures, mais d’une richesse de goût remarquable. Une belle alliance sucre/salée, originale, marquante et parfaitement maitrisée. Une réussite.
Pain grillé au homard breton, radis beurre, pesto du jardin. Déjà l’intitulé du plat n’est pas très engageant. Certes, c’est une belle assiette, très construite mais justement presque trop. Le homard est trop « habillé » de radis, et le pesto et la poutargue, tous deux au goût puissant, ne laisse aucune chance au homard. Un plat intéressant mais à rééquilibrer.
Tarte aux petits pois et lard paysan mijoté, jus de cuisson. Un plat totalement remarquable entre rusticité et sophistication. Un festival de saveurs parfaitement maitrisées et en harmonie. Sans doute le plat qui définit le mieux le style du chef. Délicieux, fin, goûteux… Une merveille !
Desserts à l’unisson avec une Douceur de fraises et agrumes toute en fraicheur et savoureuse, et une Gourmandise au café de Brocéliande, chocolat chaud absolument superbe.
Au cours de ce repas fort gourmand, Marion Denieul propose une sélection de vins au verre judicieusement choisie parmi ses 200 références et servi avec amour et sans prétentions techniques souvent insupportables.
Il faut aller à Guer ! Il faut découvrir la cuisine du chef Baptiste Denieul. Elle est toute en finesse, en harmonie douce, tout en laissant s’exprimer les saveurs des excellents produits qu’il travaille. Respect des saisons, (et avec lui c’est vrai !), fournisseurs locaux au plus proche, son potager en priorité, sont des marques fortes de chaque assiette. Un style très personnel, libéré des codes de la mode du moment, où la délicatesse et la recherche d’une certaine pureté originelle du produit et du goût, sont les maitres-mots. La Tartelette aux petits pois, lard paysan mijoté, jus de cuisson est sans doute le plat qui lui ressemble le plus, mais la Carotte rôtie au gingembre, ketchup de carotte, safran breton, béarnaise aux herbes et caviar est sûrement la parfaite illustration d’une nouvelle direction qui se dessine pour le chef et sa cuisine. A suivre, donc…
7, place de la Gare
56380 Guer
Tél : 02 97 22 00 26
www.maisontiegezh.fr
Fermé lundi, mardi et mercredi midi
Voyage celtique en 3 étapes : 50 € (le midi en semaine)
Voyage celtique en 5 étapes : 80 €
Voyage celtique en 6 étapes : 95 €
Voyage celtique en 7 étapes : 120 €