J'ai vécu cette année une petite aventure culinaire assez exceptionnelle! Tu l'aurais peut-être vu (oui, j'ai décidé qu'après plus de cinq ans à te conter mes aventures culinaires, je pouvais te tutoyer!) si tu vis en Belgique, ma bonne bouille et mon histoire stoempesque s'étalent entre rayons, folders publicitaires et films promotionnels de bon nombre de Carrefour (belges)!
L'histoire du meilleur stoemp belgétarien
Cette aventure a commencé en début d'année, lorsque Carrefour Belgique a ouvert au public un concours sur le thème 'Belgétarien' visant à promouvoir les ingrédients de notre terroir. Le sujet du concours était la création du meilleur stoemp belgétarien. Un quoi? Un stoemp (pour e.a. nos amis Français) est une sorte de potée traditionnelle, mélange de pommes de terre écrasées (avec morceaux donc, et des Bintjes s'il te plaît bien) et de légume(s) principalement. Un peu de gras pour lier, le réconfort est à portée de fourchette, avec une tranche de lard confit ou une bonne saucisse de campagne (surmontée d'un oeuf, allez!) c'est juste miraculeux pour affronter le froid et la grisaille de l'hiver!
Et donc ce concours. Je rentrais justement d'une petite visite à Liège (chez Stephane Diffels à l'Air de Rien - j'en rêve encore - je t'en parlais ici). Avec en souvenir dans ma valise un vrai Herve au lait cru traditionnel, piquant et même un peu puant. Et le petit pot de sirop de Liège de chez le fromager.
Et donc voilà: stoemp Belgétarien? Je dis chicon, Herve parce que ça ira bien, sirop de Liège pour adoucir et rester dans le thème! Chicon de pleine terre, avec de l'amertume quand même (enlève la base du légume pour contrôler la puissance de cette dernière), Bintjes (non peut-être?!), Herve piquant en tous petits cubes (c'est un peu casse-noisettes à couper,ça colle on en reparlera), et un slurch de sirop de Liège (combien de millilitres dans un slurch? Demande à ma maman!).
A la maison, on se régale. L'équilibre est bon, il nous plaît en tout cas, entre l'amertume et le goût prononcé du chicon, celui bien présent également de Herve piquant et puissant, et cette touche de sirop pour adoucir l'ensemble sans pour autant en faire un plat sucré-salé.
Emballé c'est pesé, la recette est dite, et envoyée à Carrefour, parce que j'aime vraiment ce genre de petits concours sans prétentions qui te force à réfléchir et faire un peu jouer ta créativité culinaire. Hum, 'sans prétention', parce que je n'avais pas trop pris le temps de lire le règlement du concours, ni sa dotation...
Quelques semaines plus tard, petit mail sympathique en rentrant du boulot: je suis sélectionné avec cinq autres cuisiniers amateurs, parmi pas moins de 500 recettes reçues. Flatté je suis, quand même!
Et surtout ravi d'être invité à cuisiner mon stoemp chez Mmmmh! - ma deuxième cuisine (j'y ai suivi plus de cours de cuisine que de raison), un lieu où j'ai toujours le plus grand plaisir à me rendre.
C'est donc plutôt cool et les mains dans les poches que je me rends chez Mmmmh!, rencontre les autres candidats, m'étonne à peine de la présence de caméras, salue le jury composé de responsables de Carrefour, du chef cuisiner de l'enseigne, Eric Patigny (Maître Cuisinier de Belgique), de mon amie Delphine Soupçon de Balsamique, etc...
La finale du concours "Le meilleur stoemp belgétarien 2016"
Une heure et quart pour préparer mon plat, sur papier c'est plutôt relax. Quoi qu'avec un seul feu il faudra cogiter un peu, bien organiser ses cuissons, ruser aussi (la poêle réchauffe sur la casserole d'eau bouillante), de façon à proposer une cuisson parfaite et un plat servi chaud!
Top chrono, levez les mains,... le jury part délibérer. On goûte nos plats, on se régale, le niveau est haut, les stoemps vraiment délicieux. Aaaaah cette sauce à la bière, Emmanuelle!!! Et ce stoemp chou-fleur moutarde...
Je suis content de ma réalisation, pas trop de mon dressage ( Carlo non plus!), mon stoemp a l'air de plaire.
En rang d'oignions, la tension monte quand même d'un cran, on décachète l'enveloppe... je remporte le concours!! Trèèèès content! Et surpris et ravi du gain: un an de courses chez Carrefour, en bons d'achats, woaaaw! Et la mise en production du stoemp, avec suivi des étapes du projet... re-woaaaw!
Les jours passent, je dévalise mon Hyper, j'oublie un peu l'affaire... avant d'être recontacté quelques mois plus tard pour passer une journée avec les représentants de Carrefour à la découverte du producteur pressenti pour réaliser mon stoemp belgétarien.
Accueil chaleureux dans les locaux par le responsable de production et les représentants de Carrefour. Les caméras sont toujours là! Quelques interviews, je comprends que Carrefour réalise un film de promotion sur l'ensemble de l'expérience.
Nous visitons ensuite le site de production; la société Culinor se spécialise dans les plats préparés à base de pommes de terre, et fournit nombre de grandes enseignes. On se promène entre les machines, les cuiseurs, les immense presse-purée, les cocote-pression industrielles.
Je suis la création d'un stoemp (pas encore le mien): de vraies pommes de terre Bintjes belges, des légumes frais coupés (parfois surgelés, en fonction des saisons), de provenance belge également, du vrai lait, du vrai jaune d'oeuf (bon ils ne cassent pas les oeufs sur place, hein, le jaune arrive séparé du blanc et de la coquille, sous poche sous-vide; probablement pasteurisé aussi!). Les patates sont versées dans une grande benne, on y ajoute de l'eau (beaucoup d'eau), on cuit, ça bout. Comme à la maison! Les pommes de terres sont égouttées, puis pressées avec un presse purée plus grand que moi, additionnées d'épices (les mélanges sont bien entendu pré-pesés), de lait, de beurre fondu, d'oeuf, etc... selon les recettes. Puis mélangées aux légumes qui ont entre-temps cuit dans une immense cocote-minute.
Bref, "comme à la maison", ou presque. Je suis suspicieux, je cherche le produit en 'E...' qui salira l'étiquette, je ne suis pas expert mais je ne vois pas où il interviendrait dans le processus. De plus on m'assure que tout est là, pas de stabilisant, colorant, adjuvant, stérilisant, liquéfiant, lubrifiant, conservateur, etc... que du bon ma bonne Dame! Ravi, je me dis que je lirai quand même l'étiquette du produit fini avec attention!
L'aventure se poursuit donc, les premiers essais ont lieu, on goûte les prototypes, très prometteurs, de mon stoemp. On discute des contraintes aussi. Mes petits cubes de Herve, désolé ça va pas être possible! Déjà que mon quart de fromage collait à mon couteau, j'ose pas imaginer le défi à relever en quantité industrielle... Le sirop de Liège est un souci aussi: il colore le stoemp ce qui le rend moins appétissant. Il faudra bien doser. Et puis moi je veux un stoemp avec morceaux! Pas une purée... à garder à l'esprit aussi, et tout celà fera partie de nos commentaires, et discussions avec le producteur, qui nous promet d'ajuster le produit en tenant compte de nos remarques. J'adore!
Tu te demandais ce que je pouvais bien faire de mes journées de 4/5ème?!!! La suivante je la passerai dans les bureaux de Carrefour, à Evere juste au dessus du supermarché.
Petit shooting dans les rayons d'abord, avec une maquette du produit. ("Non Madame tu ne peux pas partir avec, il n'est pas encore en vente c'est de la purée de carottes dedans, tu vas être déçue!"). Drôle d'impression de voir ma tête sur ce paquet. Je la mets à côté de celle de David Martin (La Paix* - je vous en parlais ici) pour rigoler, elle orne son hachis parmentier dans le même rayon (délicieux, entre parenthèses!) :-)
Réunion avec Lotte Krekels ensuite, Packing Manager chez Carrefour, qui me présentera les différentes étapes de réalisation du packaging, les contraintes auxquelles ils ont fait face, et les prototypes réalisés. J'apprends que si la volonté de la marque est de limiter le suremballage et promouvoir le recyclable, l'emballage cartonné doit respecter des normes alimentaires strictes, le papier recyclé est exclu par exemple car il peut contenir des résidus d'encres non-alimentaires qui pourraient migrer au travers de l'opercule de la barquette de stoemp!
Autre subtilité, cette barquette étant recouverte d'un opercule transparent, l'emballage doit le couvrir entièrement afin de ne pas montrer un stoemp disgracieusement vautré dans le bas de la barquette lorsque celle-ci est présentée verticalement! Tout est calculé, ça ne s'improvise pas! Je m'amuse des maquettes d'emballage, celle 'à la Jamie Oliver' en particulier, et me félicite du choix définitif qui est très sobre, bien assorti au reste de la gamme, très équilibré. J'adore!
Plus tard dans la journée, je pourrai assister à la dégustation de deux nouveaux prototypes par un panel de dégustateurs spécialement formés à la tâche, dans les bureaux annexes de Euro Consultants, un laboratoire d'analyse sensorielle spécialisé dans les test alimentaires. Ces panels sont réalisés pour chaque produit de Carrefour, avant leur commercialisation, qui n'aura lieu que si les résultats sont satisfaisants. La plupart des produits de marque Carrefour sont de plus re-testés par ce même panel d'une dizaine de consommateurs, annuellement, pour s'assurer de la stabilité de la qualité et du goût.
CARREFOUR Histoire et création d'une Recette de Stoemp
Les échantillons de stoemp sont présentés aux goûteurs, installés dans des isoloirs et munis d'un questionnaire sur PC, qui dégusteront et noteront le produit selon des critères précis de goût, texture, couleur, consistance, etc... Je me prête au jeu, afin de me faire une idée sur ma version préférée. Toujours aussi puissant, avec ce bon goût de chicon mêlé à la force du Herve, cette pointe d'amertume, le sirop à peine présent mais équilibrant l'ensemble. Ma préférence va à la version la plus douce, le panel penche pour des saveurs encore plus nettes et prononcée. Tous sont d'accord sur un point: la taille des morceaux doit encore être augmentée pour s'éloigner de l'aspect 'purée' au profit d'une 'écrasée de pommes de terre'. C'est bien noté, et ces petites modifications seront apportées au produit avant une dégustation finale et sa mise en production.
Début novembre 'mon' stoemp est livré en magasin. Je le découvre avec un sourire au lèvre, tout comme la (très large!) campagne publicitaire qui l'accompagne! Il me plaît ce stoemp! Très proche de ma recette originale, tant en goût qu'en texture, joliment emballé, je suis ravi! J'espère qu'il te plaira!
La recette gagnante est ici:Moi j'ai adoré l'expérience en tout cas, vraiment unique et passionnante.
Stoemp belgétarien aux chicons et Herve
Ingrédient (pour 4 personnes):
1 Kg de pommes de terre bio type bintjes
400g de chicons bio de pleine terre
1/2 oignon
1 càs de sirop de Liège
1/4 de Herve piquant - soit 50g ( au lait cru pour moi)
50g de beurre de ferme
Sel, poivre, muscade
Préparation:
Peler les pommes de terre et couper en gros morceaux réguliers (cubes de 3cm).
Couper et creuser la base dure des chicons. Trancher en lamelles de 4-5mm.
Peler et émincer l'oignon.
Couper le Herve en petits dés de 3-4mm.
Dans une casserole, cuire les pommes de terre couvertes d'eau. Saler. Quand elles sont bien cuites, après 15-20 minutes, les égoutter et laisser un peu refroidir. Ecraser en purée grossière.
Dans une poêle, faire fondre 20g de beurre. Y faire fondre l'oignon, puis ajouter les chicons, sur feu moyen. Bien mélanger. Après quelques minutes, ajouter 3 càs d'eau et y diluer 1 càs de sirop de Liège. Bien mélanger avec les chicons. Couvrir la poêle et terminer la cuisson à feu doux, cinq minutes environ. Les chicons doivent être cuits mais encore suffisamment rigides.
Ajouter ce mélange aux pommes de terre écrasées. Saler, poivrer, et donner quelques tours de moulin à muscade. Ajouter le beurre restant.
Ajouter le Herve en veillant à bien répartir les morceaux. Mélanger.
Servir bien chaud tel quel, avec une viande ou une saucisse de campagne, ou comme ici avec une salade de chicons, vinaigrette à la moutarde ancienne et sirop de Liège.
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