Ces scientifiques de la Weill Cornell Medicine (New York) montrent, avec cette recherche expérimentale publiée dans la revue Nature Cell Biology, qu’il est possible de transformer des cellules de l’estomac humain de manière à ce qu’elles ressemblent moléculairement et fonctionnellement aux îlots pancréatiques et sécrètent de l’insuline en réponse à l’augmentation de la glycémie. La greffe de petits groupes de ces cellules permet ici en effet chez l’animal d’inverser la maladie et constitue ainsi une toute nouvelle approche, révolutionnaire, pour le traitement du diabète.
En d’autres termes, les cellules souches issues de tissus gastriques humains, reprogrammées avec une efficacité étonnamment élevée, en cellules bêta productrices d’insuline, constituent une base solide pour de nouveaux traitements autologues ou basés sur les propres cellules des patients.
Un tel traitement permettrait d’éviter la prise de traitements,
souligne l’auteur principal, le Dr Joe Zhou, professeur de médecine régénérative de la Weill Cornell Medicine.
L’insuline est une hormone qui régule la glycémie. Sans elle, la glycémie devient trop élevée, provoquant le diabète et ses nombreuses complications. Le diabète de type 2 est caractérisé par une résistance à l’insuline et par une destruction des cellules bêta du pancréas, productrices de l’insuline. Les traitements actuels comprennent des injections d’insuline avec des effets contraignants et handicapants, dont la douleur, une résistance fréquente au traitement avec un contrôle inefficace de la glycémie et la nécessité de porter un dispositif encombrant. De nombreuses équipes travaillent à des solutions moins inconfortables pour remplacer la fonction des cellules bêta.
La greffe de cellules humaines qui fonctionnent comme les cellules bêta
est l’une des principales pistes de recherche : objectif, ces cellules doivent pouvoir détecter automatiquement les niveaux de sucre dans le sang et sécréter de l’insuline si besoin. Des greffes qui utiliseraient les propres cellules des patients (autologues), permettraient d’éviter les problèmes de rejet. Cet objectif est celui de l’équipe de la Weill Cornell depuis plus de 15 ans :
- de précédentes expériences de la même équipe ont déjà montré que les cellules pancréatiques ordinaires pouvaient être transformées en cellules bêta productrices d’insuline en forçant l’activation de 3 facteurs de transcription.
- dans une étude de 2016, menée sur la souris, l’équipe a montré que certaines cellules souches de l’estomac, appelées cellules souches gastriques, sont également très sensibles à cette méthode d’activation à 3 facteurs.
L’estomac fabrique ses propres cellules sécrétant des hormones : c’est sans doute pour cette raison que ces cellules constituent un bon point de départ pour la production de cellules pancréatiques. Cellules gastriques et cellules pancréatiques sont « adjacentes » au stade embryonnaire du développement, écrivent les chercheurs, qui expliquent ainsi que les cellules souches gastriques puissent être si facilement transformées en insuline de type bêta. Par ailleurs, les cellules souches gastriques humaines, peuvent être obtenues des patients, relativement facilement, par endoscopie.
Transformer les cellules souches gastriques humaines en cellules bêta : L’équipe a cultivé les cellules en petits groupes appelés organoïdes et confirme que ces organoïdes sont rapidement sensibles au glucose, répondant par des sécrétions d’insuline. Une fois greffés sur des souris modèles de diabète, ces organoïdes de type bêta fonctionnent comme de vraies cellules bêta pancréatiques, sécrétant de l’insuline en réponse à une augmentation de la glycémie et permettant le maintien d’une glycémie stable. A 6 mois, durée de suivi de l’étude, ces organoïdes fonctionnaient toujours parfaitement.
Optimiser la méthode pour des essais puis la pratique clinique : il va falloir encore augmenter l’échelle de la production de cellules bêta pour les greffes chez l’Homme et faire en sorte que les cellules bêta obtenues soient moins vulnérables aux attaques auto-immunes -qui éliminent habituellement les cellules bêta chez les patients diabétiques de type 1.
A terme, les chercheurs espèrent mettre au point une technique permettant de prélever relativement facilement les cellules souches gastriques des patients, puis de les greffer, quelques semaines plus tard, ces cellules pouvant ensuite sécréter de l’insuline qui régule la glycémie sans avoir besoin de médicaments.
Source: Nature Cell Biology 27 April, 2023 DOI: 10.1038/s41556-023-01130-y Stomach-derived human insulin-secreting organoids restore glucose homeostasis
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Équipe de rédaction SantélogJuin 20, 2023Équipe de rédaction Santélog