« Nous, les oiseaux », « Vivants », « La Ronde », trois titres, dix ans : les Fugaces proposent un théâtre de rue engagé dont la forme mérite qu’on s’y arrête un peu. La déambulation des deux premiers spectacles cités, dans les rues d’une ville, se terminait à l’endroit d’où nous étions parti.e.s : une place, une rue dont le décor avait un peu changé entre départ et arrivée. Dans le premier, adapté d’un roman de Lola Lafon, nous étions incité.e.s à bouger, à y aller. « Attaquons-nous à nos cicatrices », disaient-elles. Les fumigènes de la fin , c’est « parce qu’il faudra bien faire le feu ».
Dans le deuxième spectacle, « Vivants », les spectateur.ices, sont partagé.e.s entre plusieurs personnages, de sorte que chaque personnage est entouré d’un groupe qui forme son corps et ses pensées : le procédé (qui n’est pas qu’un procédé mais une façon de concevoir le théâtre, la rue) induit une relation très vivante entre comédien.ne.s et publics, rompant délibérément avec les positions assignées par le théâtre dans une salle. À la fin de ce spectacle, tout le monde est réuni sur une place au centre d’un quartier, d’une ville, pour faire la fête et poursuivre le dialogue engagé.
Dans le troisième, « La Ronde », Lou parle à la première personne du pluriel, englobant ainsi dans son personnage le public qui la suit. Elle était en Seconde en 2002, il y a environ 20 ans. Cette fois, nous ne retournerons pas à l’endroit d’où nous sommes parti.e.s : ce retour à l’adolescence est impossible. Et puis, creuser dans les souvenirs, ça réveille ceux qu’on avait oubliés. Ces vingt dernières années, qu’est-ce que nous avons raté ? Comment expliquer que ceux et celles dont « la jeunesse emmerd(ait) le front national » (comme le chantaient les Bérurier Noirs dix ans plus tôt), qui écrivaient NON sur les murs, votent aujourd’hui encore plus à droite que leurs parents ? Qu’est-ce que nous avons raté ? Avons-nous vraiment dit NON ? Et à quoi ?
La Ronde est interprétée par Cécile Le Meignen, écrite et mise en scène par Laura Dahan.