Dès les premières minutes, on est fixé : le décor est celui d’une salle de sport (tapis et accessoires de mousse couverts de couleurs primaires), les costumes moulants sont ceux de l’aérobic (où l’on fait des gestes un peu ridicules avec un sourire crispé), la disposition des spectateur.ice.s autour de l’espace de jeu promet une proximité à laquelle on ne pourra pas échapper. Dès les premières minutes, Ubu tue Venceslas, et devient roi. Mais quoi raconter ? La prise de pouvoir, l’accaparement des richesses aussitôt dépensées, la vulgarité, le mépris, la xénophobie, le racisme, la langue maltraitée (y compris dans les baisers entre le père et la mère Ubu) ? Et le rire, bien sûr. Toute l’énergie mise au service du pouvoir absolu, mortifère, car ce pouvoir ne subsiste que par la guerre, même perdue, mais la guerre qui se joue loin de nous, dans une Pologne imaginée. Méfions-nous pourtant : une fois vaincu, c’est en France qu’il vient, le père Ubu.
La troupe emmenée par Olivier Martin-Salvan jouait depuis neuf ans cette pièce de peu de mots et beaucoup de sueur. Ce 27 mai, à Alfortville (94), dans un COSEC (complexe omnisports évolutif couvert), c’était la dernière. Mais Ubu bouge encore, et parfois sous d’autres noms.