Wayne Escoffery par Juan Carlos Hernandez
Ca attaque sec direct. Batteur aux baguettes. C'est rapide, nerveux. Belle envolées du sax ténor. Dave Kikoski prend la main et distille les notes. Ca respire à pleins poumons, rapide, souple, puissant. Sans jamais forcer. Rythmique en acier trempé. Duo contrebasse-batterie. Toujours aux baguettes. Fin, rapide, précis. Réglé comme une horloge mais avec du feeling. Le quartet repart sur cet air funky. Ca boxe bien. Le titre album " Like minds ". Cf extrait audio au dessus de cet article.
Deuxième concert de leur tournée européenne. Compositions du temps du confinement à New York. Ce temps de retrait fut une source d'inspiration pour de nombreux musiciens (les pianistes Fred Hersch & Pieternel Van Oers par exemple). " Treasure rain ", écrit dans une belle maison de Floride que lui a prêté un voisin si j'ai bien compris. La pluie tombe. Je l'entends au cliquetis des baguettes sur les cymbales, aux notes du piano. Le sax ténor arrive et souffle sur cette pluie bienfaisante. Des années que je n'ai entendu Dave Kikoski sur scène. Quel pianiste ! Rien de neuf certes mais qu'est-ce que c'est bien joué ! Le toucher, le goût, la fluidité, il a tout. Le sax revient en ronronnant. Ca s'agite un peu mais tranquille. Le batteur me hache menu le cerveau.
Une ballade. Le batteur reste aux baguettes. Ca s'étire paresseusement. Sax ténor au gros son viril, étiré. Bon massage cérébral. Je sens la pulsation dans le ventre. Ca marche doucement. Wayne Escoffery dit son Blues. Du talk over. En rythme avec la musique. " My truth ". Paroles simples. Ma vérité est justice, amour, guerre, paix, meurtre, désert etc. Ca scande bien. Puis il reprend le sax avec un son à la John Coltrane. Ce n'est pas " A Love Supreme " mais c'est dans l'idée. Solo de piano bien soutenu. Dave Kikoski nous emmène sans effort et sans effet. Loin.
Une composition de son ancien batteur mort il y a 2 ans. Ralph Peterson. " Song ? ". Pas capté le titre. Un air énergique. Batteur aux baguettes. Il dialogue avec la contrebasse. Le pianiste ponctue toujours en finesse. Le saxophone se projette bien. La rythmique est chaude patate. Le sax repart, le quartette aussi. Ca envoie. Musique devenue trop libre et trop énergique pour mes deux jeunes et jolies voisines. Elles sortent discrètement.
Toujours aux baguettes. Toujours énergique. Ils ont décidé de nous réveiller. Un hard bop plus classique. A ma gauche, Gilles Naturel, contrebassiste maintes fois célébré sur ce blog. Venu pour jouer le bœuf ( jam session in english) qui suit ce concert avec la jeune garde du Jazz en France. A New York, il a joué il y a 30 ans avec Mark Whitfield, guitariste, le père du batteur de ce soir. Le piano s'efface. Fort tension contrebasse-batterie pour pousser le sax ténor. Le sax se tait. Le piano revient joyeux, scintillant. Breaks de batterie. Les tambours bondissent de joie sous les coups de baguette. Entrecoupés d'envolées du saxophone. Solo de batterie. Ca chante bien. Sec, nerveux, précis, tendu. Morceau conçu sur les harmonies de " Giant steps " ( John Coltrane) me fait remarquer Gilles Naturel.
Un hommage à Charles Mingus (1922-1979). Il aurait eu 100 ans en 2022. " Nostalgia in Times Square " (Charles Mingus). " Un morceau que nous avons si souvent joué et dont je ne me lasserai jamais " Wayne Escoffery.
Le batteur reste aux baguettes. Version étrange mais je reconnais le thème. Tempo accéléré comme s'il y ajoutait du boogaloo. Version bien funky en tout cas. La beauté de la musique de Charles Mingus est immarcescible. Solo de piano. Quelle fraîcheur dans le jeu de ce Monsieur aux blancs cheveux ! Retour du sax avec un gros son velu. Entrecoupé par la rythmique.
" Footprints " (Wayne Shorter). Le thème se reconnaît dès la pulsation de la contrebasse. Toujours aux baguettes. Le batteur n'a pas montré qu'il savait jouer des balais. Le doute demeure à ce sujet. Il s'agit d'une composition de Wayne Shorter (1933-2023), " le plus grand compositeur du Jazz depuis la mort de Duke Ellington " ( Stan Getz), saxophoniste ténor et soprano, Wayne Escoffery est au niveau. Dave Kikoski s'inspire clairement du Herbie Hancock de l'an de grâce 1967 mais il y met sa patte. Premier solo de contrebasse du concert. Tranquille, souple. Finement ciselé par le batteur aux baguettes sur les cymbales. Ca accélère sans effort. Le pianiste vient apporter de bonnes vagues de sons.
La photographie de Wayne Escoffery est l'oeuvre de l'Epoustouflant Juan Carlos Hernandez. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.