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Demain, jeudi 25 mai 2023, à l’occasion de la fête nationale, la cinéaste Sabrina Farji sort au cinéma Gaumont, qui est le siège de l’INCAA (l’institut national du cinéma et des arts audiovisuels), à Buenos Aires, son docu-fiction féministe et militant consacrée à une figure aussi prestigieuse que mal connue de l’époque indépendantiste, María Sánchez de Thompson, dite Mariquita…
Cette femme a été une patriote de premier plan en son temps. Une féministe à une époque où cette cause avait bien peu d’adeptes. Et comme la marquise de Sévigné, sa correspondance a fait d’elle une des toutes premières figures de la littérature argentine.
Le gros problème est que les historiens disposent de très peu d’archives pour retracer sa vie réelle et que la plupart des récits sur elle s’appuie sur des légendes, répétées, notamment à l’école, de générations en générations depuis 1883, année où l’école primaire est devenue obligatoire, à l’instigation d’un ancien président, Domingo Sarmiento, qui l’avait bien connue et lui avait confié des missions de définitions des programmes d’instruction des fillettes.
Si l’on en croit sa bande-annonce, ce film nous propose un portrait ultra-idéologisé de Mariquita et des images 100 % anachroniques. Rien d’étonnant d’ailleurs : ces grands personnages de l’indépendance servent d’écran géant à la projection de tous les rêves et de toutes les théories, y compris les plus fantaisistes (du point de vue historique), des auteurs qui s’en emparent.
Quelques historiens sérieux apparaissent dans les trois minutes d’extraits. Je ne suis pas sûre que la réalisatrice les laissent remettre les pendules à l’heure.
Mais allez tout de même y jeter un coup d’œil : ça vaut le coup pour comprendre à quels grands écarts sont soumis ces personnages historiques. Ecoutez comment on fait chanter l’hymne argentin à l’interprète de Mariquita, en robe empire et avec des tatouages sur ses bras nus, pour se rendre compte que sur le plan historique, cela ne peut pas tenir la route. En 1812, personne n’aurait jamais eu l’idée saugrenue de chanter ce texte révolutionnaire et hardi avec cette voix déjà pâmée.
Cela n’empêche évidemment pas Página/12 de porter le film et son autrice aux nues en donnant ce matin la parole à Sabrina Farji et en titrant sur la difficulté qu’elle a sans aucun doute rencontrée pour parler des femmes en évoquant la révolution de 1810.
© Denise Anne Clavilier www.barrio-de-tango.blogspot.com
Pour aller plus loin :
lire la fiche du film sur le site Cines Argentinos (la bande-annonce y est incrustée).