S’attabler chez Stéphane Mazière est une belle aventure gourmande.
Situé à quelques encablures de la sortie de la ville d’Auch, posée au sommet d’un petit vallon, le domaine domine la campagne alentour. Si l’ancienne métairie conserve son aspect rustique et paysan, les approches et le décor intérieur sont d’un modernisme qui joue sur un décalage parfait. A part le bâtiment central, de nombreux bungalows s’égayent tout autour et les grandes baies vitrées intérieures pour certains offrent une vue imprenable sur la campagne gerçoise. Cerise sur le gâteau, deux jeunes ânes se promènent tranquillement dans les prés au pied de l’hôtel, ce qui donne un charme rural supplémentaire.
La salle à manger est dans le même esprit : confort moderne, vaste salle aux tables bien espacées, et aux beaux jours une terrasse – jardin paisible. Difficile de faire plus agréable. Le personnel, bien que jeune et malgré les difficultés actuelles de recrutement, se montre extrêmement attentionné, disponible et souriant.
Pourtant, ces derniers mois, les évènements se sont succédés, l’un enchainant l’autre. Le plus important fut sans doute le départ de son acolyte de longue date qui, las et souvent anxieux dans le travail, a rendu son tablier. Le coup ne fut pas fatal et le chef réorganisa l’équipe cuisine avec l’arrivée d’une jeune pâtissière pleine d’entrain.
Dans la région, vint ensuite la grippe aviaire qui fragilise les approvisionnements en canards et volailles, et plus récemment une augmentation des prix aussi vertigineuse qu’inattendue passant du simple au double pour le gaz et l’électricité.
Cependant, est-ce l’adversité qui le motive mais la cuisine du chef est plus vivante et fringante que jamais. Son plat « signature » (voir plat langoustines) n’a jamais été aussi réussi et les nouveaux plats sont pour le moins intéressants et au mieux de délicieuses découvertes. Le chef a réorganisé sa carte en ne gardant que deux menus et a du abandonner son premier menu récompensé d’un Bib Gourmand. Il conserve cependant l’étoile verte Michelin.
Un démarrage tout en finesse avec un Velouté d’asperges, huile mentholée, et œufs de hareng.
Son plat « référence » Langoustines en spaghetti croustillant, nougatine d’ail de la ferme du Roumégas, orange, aïgo boulido, fine salade d’herbes et de plantes est un plat franchement remarquable tant dans l’idée que dans la réalisation. Harmonie des saveurs, finesse, délicatesse, et un festival de saveurs. Une réussite.
Au contraire, son Œuf bio du Gers à la coque aux oursins, châtaignes et iyokan (agrume japonais à la saveur de pamplemousse), spumescence de mandarine, pèche par manque d’harmonie et d’équilibre avec trop de châtaignes et l’association avec l’oursin est fort discutable.
Suprême de volaille du Gers au foie gras et cacao, purée de pommes de terre au beurre, tartufa, sauce Albuféra. Beaucoup de monde dans ce plat où chacun essaie de se faire une place. Cuisson basse température pour le poulet donc chair molle mais goûteuse, sauce Albuféra sans cognac ni Madère ni foie gras, reste le porto et la crème… Au final, un plat riche, copieux, savoureux, accompagné de légumes de Printemps trop al dente ce qui n’apporte rien à la saveur.
Gentil et agréable dessert plein de fraicheur et d’un blanc immaculé : Riz et gin aux baies de genièvre des Pyrénées vieillis en foudre chez Gelas, syphon de riz au lait, guimauve givrée, œuf à la neige au gin, crème glacée à la noix de coco. Tout blanc, tout beau, tout bon ! Frais et savoureux.
La carte des vins est impressionnante dans sa diversité des propositions et sa sélection fort riche en vins et vignobles locaux ou proches. Composition générale de la carte : bières locales, vins d’exception de 109 € à 950 €, à 95% des Bordeaux. Rosés, petit choix avec entrée de gamme à 20 € ; riche sélection de vins blancs avec une belle représentation locale (Gascogne, Pacherenc), entrée de gamme à 22 € ; superbe sélection de rouges en Gascogne, Saint-Mont, Madiran et Languedoc avec entrée de gamme à 22 €.
S’attabler chez Stéphane Mazière est une belle aventure gourmande. Il propose une cuisine toujours issue au maximum de la région proche et particulièrement le Gers. Ses plats sont riches et généreux, mais aussi subtils et délicats et construits en majorité sur des harmonies savoureuses. Le défaut de ses qualités ? Parfois trop de monde dans l’assiette qui brouille les goûts et des cuissons, et des cuissons al dente surtout pour les légumes.
Dans ce lieu campagnard-chic, le plaisir s’invite à tous les instants : le cadre, l’accueil, le service, la gentillesse, le naturel, tout cela en fait un endroit au charme discret qui vous marque d’une empreinte gentiment inoubliable.
Domaine de Beaulieu
Lieu-dit « A Beaulieu »
Chemin de Lussan
32000 Auch
Tél : 05 62 59 97 38
[email protected]
www.ledomainedebeaulieu.com
Fermé samedi midi, dimanche, lundi midi
Menu Parenthèse : 28 € (2 plats), servi au déjeuner sauf week-end.
Menu L’Instantané : 49 € (3 plats )
Menu L’inattendu : 79 € (5 plats)
Menu L’éveil du goût : 19 € (enfants de moins de 12 ans)