Observatoire du THD : les déploiements de la fibre se poursuivent dans un climat de tension

Publié le 17 mai 2023 par Eulnico

Le rythme des déploiements de la fibre s’est maintenu en France en 2022 et est revenu à celui de 2019. Mais alors que 80% des locaux y sont raccordables à fin 2022, les tensions s’installent dans la filière télécoms.

InfraNum, l’Avicca et la Banque des Territoires viennent de publier son observatoire du THD pour l’année 2022. On apprend que 4,8 millions de prises fibre FTTH ont été installées sur le territoire l’an dernier, soit moins qu’en 2021 où 5,6 millions de prises avaient été installées mais presque autant qu’en 2019. Cela représente plus de 12 000 prises par jour ouvrable, un chiffre élevé malgré les problématiques de qualité qui mobilisent la filière.

Au 31 décembre 2022, 34,5 millions de locaux sont raccordables à la fibre optique FTTH, soit 80% des locaux. Un chiffre en ligne avec les objectifs fixés par le gouvernement dans le cadre du Plan France THD. La fin du chantier approchant à grands pas, le rythme de déploiement va naturellement commencer à ralentir au cours des prochaines années.

Leader européen sur la fibre

Avec ces chiffres, la France conserve sa place de leader européen sur la fibre et est le pays qui a déployé le plus de prises FTTH sur le Vieux Contient à fin 2022. Sur l’année 2022, l’Hexagone est deuxième en termes de nombre de prises FTTH déployées derrière le Royaume-Uni, selon les informations d’Idate pour FTTH Council 2023.

En revanche, la France est toujours en tête sur le nombre d’abonnés FTTH total en Europe en 2022. Au 31 décembre, on compte 18,1 millions d’abonnés à la fibre optique sur le territoire, ce qui représente 87% des abonnements très haut débit et 57% des abonnements internet toute technologie confondue.

Les déploiements se concentrent dans les RIP

Depuis 2021, on observe une nouvelle tendance dans les déploiements au niveau des zones réglementées, qui s’est confirmée en 2022. En effet, c’est dans les zones RIP (réseaux d’initiative publique) que les déploiements sont les plus importants dorénavant, alors qu’auparavant cela était le cas pour les communes en ZMD Privé (zones moyennement denses privées, ou zones AMII).

Source : Observatoire du THD 2022

En 2022, sur les 4,8 millions de prises FTTH installées sur le territoire, 3 millions ont été déployées dans les RIP. C’est un peu moins qu’en 2021 (3,1 millions de prises) mais loin devant les autres zones réglementées. En effet, 1 million de prises ont été installées dans les communes en ZMD Privé, 400 000 en zone AMEL et 300 000 en ZTD (zones très denses).

Les déploiements ont nettement ralenti dans les communes en ZMD Privé où Orange et SFR déploient leur propre réseau FTTH. Il faut dire que les deux opérateurs approchent de la fin de leur chantier, même si Orange a récemment été épinglé par l’Arcep pour non-respect de ses engagements.

Et cette tendance devrait se poursuivre durant les trois prochaines années, selon les estimations de l’Avicca, d’InfraNum et de la Banque des Territoires. Le prochain rendez-vous des déploiements de la fibre en France est prévu pour 2025, année où les acteurs de la filière prévoient d’avoir raccorder 98% des locaux à la fibre.

Un environnement sous tension

Néanmoins, la situation dans la filière s’est nettement dégradée au cours des derniers mois et des tensions sont apparues entre le gouvernement, les opérateurs et les associations.

Les élus locaux et le gouvernement dénoncent le nombre trop élevé de malfaçons qui viennent dégrader le réseau fibre en France, en jetant la pierre sur le travail bâclé des sous-traitants des opérateurs d’infrastructure. Les acteurs de la filière se défendent en avançant que pour atteindre les objectifs ambitieux du Plan France THD il faut accélérer dans les déploiements et tirer la fibre à toute vitesse à travers le territoire, ce qui n’est pas une mince affaire, d’autant plus que les coûts ont fortement augmenté avec l’inflation, de 5 à 10% en moyenne selon l’Observatoire du THD.

Une proposition de loi faite par Patrick Chaize, président de l’Avicca, a d’ailleurs été votée à l’unanimité au Sénat en début de mois pour mieux imposer de nouvelles règles plus strictes dans le cadre des raccordements à la fibre. Proposition que critiquent vivement l’Arcep, les opérateurs et InfraNum qui craignent un arrêt brutal des raccordements si cette loi vient à être validée.

La fermeture du cuivre

La fermeture du cuivre / Source : Observatoire du THD

Et comme si cela ne suffisait pas, la fermeture du cuivre d’ici 2030 ajoute une pression supplémentaire aux acteurs de la filière qui doivent assurer la pérennité du réseau FTTH déjà installé tout en continuant à fibrer les locaux pas encore raccordés.

D’ici 2030, il faudra éteindre ce réseau vieillissant qui dessert 41,8 millions de locaux. Un chantier colossal donc qui a déjà été entamé — à ce jour, 11 600 lignes cuivre ont été fermées dans le cadre d’expérimentations par Orange. Et d’ici 2025, plus d’1 million de lignes cuivre seront concernées, puis le rythme s’accélérera pour atteindre un pic de 10,5 millions de lignes à partir de 2028, indique InfraNum.

Le « Good Deal numérique »

Afin d’assurer la pérennité du numérique en France, les acteurs de la filière vont mettre en place un « Good Deal numérique » qui repose sur trois piliers : égalité, pérennité et solidarité.

Le Good Deal Numérique / Source : Observatoire du THD

Il viendra assurer la résilience des réseaux FTTH dans l’Hexagone tout en assurant que chaque foyer soit éligible à la fibre. Les acteurs de la filière font également appel à la solidarité entre les territoires face à la hausse des coûts d’exploitation pour permettre l’équilibre économique des réseaux d’initiative publique.