Lorsque, à l'automne dernier, Debbie présentait sa solution d'accompagnement vers le désendettement à Finovate, je me réjouissais de sa rare conviction de pouvoir s'adresser directement aux consommateurs. En réalité, il s'avère que son modèle économique passe par des partenariats avec des institutions financières. Quoi qu'il en soit, voilà une excellente occasion de la découvrir plus en détails.
Parfait exemple de la nouvelle génération de la gestion de finances personnelles (PFM), qui ne veut plus se contenter d'exposer passivement une situation budgétaire historique et, au mieux, partager quelques recommandations génériques, l'application de Debbie, une fois connectée aux comptes bancaires et de carte de crédit, met en place un plan d'action concret, ajusté selon le contexte spécifique identifié et destiné à extraire ses adeptes des affres de l'endettement puis à les aider à mettre de l'argent de côté.
En pratique, l'utilisateur est invité chaque semaine à réaliser une tâche ou relever un défi, en général modeste, dans une tentative de réorienter progressivement son comportement financier sur la voie de la sagesse. Différents domaines sont couverts – les missions vont d'un remboursement sur un encours de carte à la modération sur une catégorie d'achats, en passant par le regroupement de crédits ou l'épargne – car la maîtrise du passif exige autant le pilotage de la dette qu'un bon contrôle des dépenses.
Naturellement, les conseils prodigués seuls n'ont qu'une portée limitée. Leur mise en pratique doit donc être stimulée en permanence. Dans ce registre, les concepteurs de Debbie ont pour philosophie de préférer la carotte au bâton (le rappel des risques engendrés par l'inaction), ce qui les conduit à offrir des récompenses à l'exécution des opérations prescrites. Et celles-ci ont d'autant plus de poids, même à un niveau quasiment symbolique, qu'elles se transforment en espèces sonnantes et trébuchantes.
Le modèle est a priori vertueux mais il soulève immédiatement la question de son financement pour la jeune pousse, qui, au demeurant, considèrerait incohérent de faire payer les individus qu'elle prétend aider à rééquilibrer leur budget. Alors, elle recourt d'abord à une approche classique de commissions de référencement auprès de fournisseurs dont elle suggère les produits (quand c'est pertinent), entraînant toutefois automatiquement un soupçon de conflit d'intérêt, quelles que soient ses dénégations.
Deuxième piste, qui semble donc commencer à trouver un écho, les banques et autres « credit unions » (Debbie est américaine) désireuses de voir leurs clients mieux gérer leur argent et qui espèrent trouver dans la distribution de l'application une réponse aux incidents qui leur coûtent cher et, surtout, un potentiel de développement de leurs portefeuilles, notamment autour de l'épargne. Encore faudra-t-il afficher des résultats probants pour espérer convaincre des décideurs souvent pusillanimes…
Dans toutes ses déclinaisons, le PFM se heurte systématiquement à deux difficultés majeures : d'une part, comment être vraiment utile au consommateur et résoudre ses problèmes et, d'autre part, comment en dégager une profitabilité quelconque. Il n'est pas certain que Debbie ait trouvé l'équation magique mais la multiplication des expérimentations, sur des hypothèses diverses, à laquelle elle contribue devrait finir par aboutir et enfin permettre de démocratiser ces outils, essentiels pour le bien-être.