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La Magic Box s'est refermée après deux semaines de compétition très intense au tournoi de Madrid. Malgré quelques surprises, la logique a été implacablement respectée avec la présence en finale des deux meilleures joueuses du monde, mais avec un détail important : le coup de semonce envoyée par Aryna Sabalenka qui, en écartant la numéro une mondiale Iga Swiatek sur une surface où elle était quasi invincible, prend rendez-vous pour une seconde levée du Grand Chelem s'annonçant plus palpitante que jamais à Roland-Garros. Faisons le point sur les principaux événements à retenir de cette édition 2023.
Swiatek et Sabalenka, le début d'une grande rivalité :
Le tennis féminin nous a offert de grandes rivalités par le passé, dont celle entre Martina Navratilova et Chris Evert, sans oublier quelques passes d'armes mémorables entre Steffi Graf et Monica Seles. Le duel opposant Iga Swiatek, actuelle numéro une mondiale, à Aryna Sabalenka, sa dauphine, est-il en train de devenir la nouvelle rivalité qui va nous tenir en haleine pour les dix prochaines années ? Battue par une impitoyable polonaise au tournoi de Stuttgart, la biélorusse a pris une revanche éclatante en terre madrilène à l'issue d'une finale durant laquelle on l'a rarement vu aussi déterminée et agressive, à tel point qu'elle est parvenue à combler une partie de son retard au classement WTA alors que les Internationaux d'Italie débutent cette semaine à Rome. Il se pourrait bien, d'ailleurs, que les deux joueuses se retrouvent une nouvelle fois face à face pour un troisième round explosif dans le tournoi transalpin. Quoi qu'il en soit, la performance remarquable accomplie par Sabalenka à Madrid laisse entrevoir une lutte farouche qui pourrait éventuellement atteindre des sommets d'intensité cette année, sachant que nous ne sommes pas encore à mi-saison, et se prolonger ensuite pour les années suivantes. En attendant, les autres pensionnaires du top 20 ne vont pas avoir d'autre choix que de prendre leur mal en patience, à moins qu'elles décident de forcer leur destin.
Kudermetova, Begu, Martic, Sherif, les seconds couteaux ambitieux :
Les sorties précoces dans le tournoi de plusieurs têtes de série, comme Paula Badosa, Daria Kasatkina, Barbora Krejcikova (très décevante), Martina Trevisan, Coco Gauff et Jessica Pegula, ont permis à des joueuses moins en vue de se frayer un chemin dans le tableau. Ainsi, après un hiver compliqué où elle s'était éclipsée très tôt à l'Open d'Australie, Dubaï, Indian Wells, Miami, Charleston et Stuttgart, la russe Veronika Kudermetova a refait le plein de confiance sur la terre battue très rapide de Madrid où elle a atteint le dernier carré en éteignant successivement ses compatriotes Anastasia Potapova et Daria Kasatkina, ainsi que l'américaine Jessica Pegula. Irina-Camelia Begu a également retrouvé de bonnes sensations en résistant bien en quarts de finales à Maria Sakkari. La roumaine a rappelé qu'elle était une très bonne joueuse de terre, elle qui a atteint à deux reprises les huitièmes de finales à Roland-Garros en 2016 et 2022. Elle a été imitée par une autre trentenaire, Petra Martic, qui s'est faite elle aussi une place en quarts de finales en battant notamment avec la manière la tchèque Barbora Krejcikova. Un retour au premier plan encourageant pour la croate qui a signé sa plus grande performance en Grand Chelem sur terre battue, en accédant au quarts à Roland-Garros en 2019. Mais, la palme de la réussite est sans aucun doute revenue à Mayar Sherif. L'Égyptienne de vingt-sept ans, plutôt discrète depuis le début de saison, s'est offert un quart de finales de prestige contre Aryna Sabalenka, à qui elle a pris un set, après des succès sur Caroline Garcia et Elise Mertens. Bien qu'elle soit encore friable dans les matches qui durent, elle a écrit un peu plus son histoire en devenant la première joueuse de son pays à aller aussi loin dans un tournoi de cette catégorie. Cette pure joueuse de terre a une nouvelle fois prouvé sa valeur sur cette surface.
Paula Badosa sur courant alternatif, Maria Sakkari aussi :
Soutenue par un public madrilène d'une fidélité à toute épreuve, Paula Badosa a montré plusieurs visages durant le tournoi qui peuvent laisser présager du meilleur comme du pire pour les semaines à venir (elle a d'ores et déjà rendez-vous avec Ons Jabeur au second tour du tournoi de Rome si elle passe le premier contre une joueuse issue des qualifications). D'abord souffrante contre l'italienne Elisabetta Cocciaretto, qu'elle a tout de même réussi à dompter au prix d'un effort physique considérable, l'espagnole a ensuite dévoilé une toute autre facette en surclassant Coco Gauff avant de plier en deux sets contre Maria Sakkari en huitièmes de finales. Les prochains jours seront déterminants pour celle qui avait dû abandonner sur blessure au troisième tour de Roland-Garros en 2022. La route n'a pas été tranquille non plus pour Sakkari. Souvent bousculée, la grecque a été, comme souvent, plus au combat contre elle-même que face à ses adversaires. Ses victoires poussives contre l'espagnole Rebeka Masarova et la roumaine Irina-Camelia Begu, dans des rencontres qu'elle aurait pu plier plus rapidement si elle n'avait pas eu ses habituelles sautes d'humeur, ainsi que sa large défaite en demi-finales contre Sabalenka, en ont été le révélateur. Comment va-t-elle aborder Rome tandis que Roland-Garros, dont elle fut demi-finaliste en 2021, se profile à l'horizon ?
Gauff et Pegula dans l'impasse :
Rien ne va plus pour Coco Gauff qui ne parvient toujours pas à enchaîner deux victoires de suite depuis le tournoi de Miami. Accrochée durant un set au second tour par Irene Burillo Escorihuela, 268e mondiale, elle a totalement lâché prise au tour suivant (défaite 6/3 6/0) contre Paula Badosa, en quittant le court le visage fermé. Ses problèmes de confiance pourraient ne pas s'arranger à Rome où elle hérite d'un tableau très difficile avec Krejcikova, Ostapenko, Kasatkina, Trevisan, Jabeur, Rybakina, Sakkari et Swiatek sur sa route. Sa compatriote Jessica Pegula, elle aussi, n'est pas dans une situation enviable. Accrochée à Madrid par la polonaise Magdalena Frech, la tchèque Marie Bouzkova et l'Italienne Martina Trevisan, qui lui a pris un set, la numéro trois mondiale, adepte du "souvent placée mais rarement gagnante", a effectué une sortie de piste peu rassurante contre Veronika Kudermetova en quarts de finales, alors qu'elle demeure pourtant très performante en double avec Gauff. Pas de quoi se rassurer même si elle échappe à la moitié de tableau de Swiatek à Rome. Rappelons enfin que Coco Gauff va avoir beaucoup de points à défendre Porte d'Auteuil, où elle fut finaliste l'an passé.
Mirra Andreeva, une première réussie :
La jeune russe de seize ans a bien entendu été la sensation du tournoi avec ses victoires retentissantes sur Leylah Fernandez, Beatriz Haddad Maia et Magda Linette, avant que la biélorusse Aryna Sabalenka ne mette fin à son parcours en huitièmes de finales. Cependant, au vu de ses dernières performances d'envergure sur le circuit ITF, sa percée n'est pas aussi étonnante que cela, même s'il s'agissait de sa première participation à un tournoi WTA 1000. Sa force de caractère et son jeu offensif ont démontré qu'elle disposait des armes nécessaires pour briller au plus haut niveau. Encore faut-il lui laisser le temps de mûrir, et encore faut-il qu'elle-même se donne le temps de l'apprentissage du tennis de haut niveau. Si elle y parvient, sa trajectoire sera alors différente de celle d'une Coco Gauff ou d'une Linda Noskova.