J’avais vu le film réalisé par Eric Bu d'après le scénario de Gilles Dyrek, avec Sophie Forte et Hervé Dubourjal, Jean-Gilles Barbier, Camille Bardery, Amandine Bardotte, Lauriane Escaffre, Ariane Gardel, Benjamin Alazraki, Yvonnick Muller…
Je me souvenais des difficultés de diffusion liées au contexte du premier confinement dû au Covid. Et surtout aussi de l'intelligence du scénario. Connaissant Eric Bu, je n'avais pas de doute sur la transposition sur une scène de théâtre mais je n’avais pas pu le caser dans mon emploi du temps avignonnais de l’été 2022. Sa présence à Paris offrait une seconde chance et je n'ai pas été déçue le moins du monde.
Comme l’a très bien compris l’adaptateur, Gilles Dyrek, c’est une pièce sur des comédiens en prise avec la réalité d’un homme qui ne joue pas, une situation qui déplace en permanence la frontière si ténue entre jeu et réalité, entre vérité et mensonge.
De lui, j’avais vu Venise sous la neige, qui fut un énorme (et mérité) succès, qui a ensuite été adaptée au cinéma, produite par Véra Belmont, réalisé par Elliott Covrigac et interprétée par Elodie Fontant, Arthur Jugnot, Juliette Arnaud et Olivier Sitruk. Il a énormément écrit pour le théâtre tout en étant acteur. Et dans Le retour il endosse le rôle de l’ami, qui n’est pas le plus sympathique et dont il tire le meilleur parti, jouant toute l’ambiguïté de la sympathie et de son contraire.Les ressorts comiques s’appuient sur les confrontations entre jeu et réalité, vérité et fiction. Pour ce qui est du tragique chaque personnage aura un moment plus ou moins pathétique. Ajoutons qu’au théâtre tout est vrai même si rien n'est vrai, ce qui est le contraire dans la vie.
Les lumières de Cécile Trelluyer sont travaillées de manière à focaliser l’attention sur un personnage en particulier. Il y a des idées de mises en scène additionnelles dans la version théâtrale, comme une incroyable partie de ping-pong, et la présence d’un accessoiriste qui agit en noir, mais à vue, alors qu’il nous faudra un certain temps pour comprendre qui se cache derrière lui. Il sera très applaudi aux saluts.
Tout est rebondissement au cours de la soirée. Rien d’étonnant à ce que le public y perde sa lucidité et frappe trop tôt dans ses mains, ce qui doit bien réjouir la troupe.
L’humour est décapant. Et nous verrons bien s’il est envisageable de se réinventer une famille pour réparer la vraie. Le spectacle a bien mérité sa nomination aux Molières 2023 dans la catégorie « Meilleure Comédie ».
À Avignon en 2018 et 2019, il avait créé au théâtre Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty ?, avec Elodie Menant, mis en scène par Johanna Boyé. (Récompensé par 2 Molières en 2020 dont celui du Spectacle Musical)
À la rentrée 2020, il avait écrit et mis en scène Dolto, Lorsque Françoise paraît, au Théâtre Lepic, avec Sophie Forte dans le rôle de Françoise Dolto, succès Avignon 2021, salué par une critique unanime. Il développe actuellement de nombreuses écritures pour la scène et l’écran.