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Avec Paul, c’était un de nos jeux préférés (en embuscade, derrière les voilages, à la fenêtre du premier étage, dans la chambre de grand-père, au Mans, échappant, une fois la porte fermée, et pour un temps, aux sempiternelles rouspétances patriarcales)(de la buée sur les vitres à force de s’en approcher, fut-ce en s’efforçant de ne pas respirer ; mais plus encore l’empreinte immobile, et coupable aux yeux de grand-mère – Bon sang, les garçons ! - de nos deux visages, guettant le moindre mouvement de l’ennemi qui, sans jamais dévoiler sa présence à quiconque, patrouillait pourtant du matin jusqu’au soir sur l’avenue). Or, ceux qui venaient de la droite, systématiquement je les mettais dans mon escarcelle ! Le couple d’amoureux qui déclenchait régulièrement nos ricanements (surtout quand leurs doigts s’entrecroisaient ; nous n’arrivions pas à en faire autant !), monsieur Mauduit qui ne disait rien de bon à la demi folle qui logeait juste à côté et parlait toute seule la moitié du temps (en maudissant les saisons, la sainte vierge et le retour du brouillard), la dame d’en face qui n’en perdait jamais une miette et qui, son fichu sur la tête, traînait son cabas presque par terre… Et d’autres, depuis si longtemps oubliés que je les ai perdus. Ceux qui venaient de la gauche, en revanche, étaient à mettre au crédit de Paul ! Le garagiste de la rue des Partisans avec ses moustaches de gaulois, la fille de la boulangère du boulevard des minimes qui se goinfrait de gâteaux toute la journée et ne daignait jamais nous adresser la parole autrement que par un froncement de sourcil, éphémère, le haussement d’une épaule, une gloutonnerie de plus, et puis la mère Poulain qui détestait par dessous tout qu’on l’appelle par son nom (mèrepoulain, mèrepoulain, mèrepoulain…)… Et d’autres, également oubliés, également perdus. Tant d’autres. Je me souviens du jour où tout un régiment de parachutistes s’est profilé sur le trottoir d’en face, à droite, avant de traverser la rue d’un pas vif et cadencé. Ce jour-là, Paul m’a traité, ni plus ni moins, de tricheur et je m’en suis voulu, plus tard, de n’avoir pas compris pourquoi.