Tristan : Je suis Tristan Thomas, je fais de la musique électronique depuis une quinzaine d'années en commençant par des démos pour mon groupe de rock sur GarageBand. J'ai adoré ce côté de faire de la musique tout seul. À côté je fais aussi du cinéma.
Tino : Moi, je suis Tino Gelli, un druide des forêts, actuellement en apprentissage. Je fais beaucoup de guitare, de banjo, de chant.
Comment vous êtes vous lancés dans la musique ?Tristan : J'ai commencé rudimentairement avec mon père par faire de la guitare, de là, on a monté un groupe de rock à 14 ans, on a eu une petite carrière via Rock & Folk qui faisait le Rock'n'Roll Friday. J'étais un baby rockeur de l'extrême. J'ai eu ensuite un projet solo, puis un duo qui s'appelle Ovhal44. Je me suis alors passionné pour la musique électronique et la techno.
Tino : Ma passion est née par la collection de disques de mes parents, Kurt Cobain, David Bowie, j'ai clairement eu envie de commencer à ce moment-là. J'ai commencé par le djembé et les percussions, ensuite la guitare, plus classique.
Comment vous êtes-vous rencontré ?Tristan : C'est il y a maintenant 10 ans, car Tino était le petit ami de ma meilleure amie, Zoé, qui est d'ailleurs une vraie aventurière. On avait passé un week-end avec elle et d'autres amis et Tino était venu la rejoindre pour lui faire une surprise. On s'est rencontrés dans un club, le contact à directement pris.
Tino : Nos routes se sont ensuite écartées, rejointes, on se voyait comme des potes, on faisait des concerts ensemble avec nos groupes séparés sans se lancer dans l'aventure musicale ensemble.
Mais alors, comment s'est formé le groupe Walter Astral, à quel moment a eu lieu l'importante discussion ?Tristan : Il n'y a pas eu de discussion ! Ce qui est mignon, c'est qu'on avait fait un premier morceau ensemble pendant le premier confinement : c'était une instrumentale pour mon projet Zaspero et je trouvais qu'il manquait une voix. C'est une période où je parlais pas mal avec Tino.
Tino : Moi, j'étais sur mon propre projet, Amour, c'est un univers associatif avec plein de musiciens qui font des chansons donc ça avait relancé les discussions de différents milieux.
Tristan : Ça a donné notre première collaboration sur Velvet Woman qui est très loin de Walter Astral. Du coup, on est sorti du rameur confinement, on s'est croisé au Motel et il me dit qu'il a le coeur brisé, il vient de se séparer. Je lui ai donc proposé de venir en vacances dans ma maison de campagne, j'étais en mode van life, je quitte Paris. Finalement, on est parti 8 mois entre fin 2020 et 2021. On a commencé à faire des jam-sessions, est né et ça a permis de commencer l'aventure. On a rencontré Luc, notre manager, il a écouté la chanson, il a adoré et nous a proposé de monter un groupe. On n'avait même pas encore pensé à ça. La conversation est alors arrivée, mais ça a été super rapide.
Pour composer cet EP, vous aviez besoin de ce processus créatif de solitude ? De retour à la nature ?Tristan : On allait être enfermés chez nous donc on a préféré enfreindre les lois, entourés de nature.
Tino : C'est finalement plus l'endroit qui a découlé sur notre musique que nous qui avons voulu partir en résidence en pleine nature. On s'est juste fait plaisir, on a regardé des films, fait des jeux de société. Bon, on s'est quand même retrouvés à dormir au milieu du studio, mais ce n'était pas le point de départ.
Tristan : On continue d'ailleurs cette formule pour composer les prochaines chansons, dès qu'on a une semaine de libre, on part là-bas.
Pourquoi le nom de Walter Astral ?Tristan : Dans l'univers druidique, il y a des clairières, et une fois par an pendant le soliste d'été, il y a la réunion de toutes les clairières. Moi, j'appartiens à la clairière du Champ du Turot et Tino à celle du Cri de mouette. On est donc partis à Toulouse et on s'est retrouvé grâce à nos chants. De là, l'harmonisation de nos deux voix a créé un trou de verre d'où est sorti un bateau, sur ce trois-mâts, un bonhomme : Walter Astral. Il nous a dit " les gars, on doit faire un truc ensemble, regardez avec les éléments et faites quelque chose ".
D'où vient ce goût commun pour l'onirisme ?Tino : On est des petits lutins de la forêt, j'ai toujours adoré ce monde, on vient de famille un peu comme ça.
Tristan : On aime raconter des histoires, les jeux de rôles, ça nous anime et on voulait ajouter ça dans notre musique. Ces univers nous touchent et nous amusent donc ça marchait bien avec ce qu'on voulait.
Tino : C'est un beau biais pour parler de soi que d'avoir un décalage avec son histoire et un univers moins premier degré.
Vous avez sorti votre premier EP Hyperdruide en octobre dernier, pouvez-vous nous expliquer ce titre ?Tristan : C'est la version maximale du druide et de la symbiose avec la nature.
Tino : Il y a aussi quelque chose qu'on aimait bien avec ce nom : on avait lu dans un article le terme de " cyber-terroir ", on trouvait les deux mots super opposés, mais ils fonctionnaient bien ensemble. Musicalement, ça nous ressemblait, on mélange par exemple un vieux banjo bien tradi avec des machines hyper techno donc ça résonnait avec nos inspirations.
Ce n'est pas trop difficile de faire fonctionner ce côté traditionnel avec ce côté alternatif et électronique ?Tristan : On s'est guidé vers ce qu'on aimait faire tous les deux et on a saisi une ambiance qui est devenue automatique au fur et à mesure qu'on composait ce premier EP. Cet équilibre est devenu naturel et est resté une empreinte.
Tino : C'était juste et évident avec ce qu'on voulait faire. C'était pas trop compliqué avec Benji le banjo.
Vous avez chacun apporté ces deux côtés ou vous aviez vos prédilections ?Tino : On a chacun notre monde et ça se ressent en écoutant : la techno d'un côté, le rock psyché de l'autre.
Tristan : C'est assez marrant parce que le banjo, c'est Tino qui en joue, mais avant il appartenait à mon père, donc chacun à quand même une part dans tout.
De même lors de la composition, vous travaillez ensemble ou chacun amène des choses de son côté ?Tristan : Ça se module beaucoup. Pour l'instant, on n'a pas une façon de créer, au début on se retrouvait beaucoup à la campagne, on partait d'une instru, soit un riff que Tino avait et qu'on reprend ensemble - le morceau La Terre est né comme ça par exemple -, soit de quelque chose que j'avais moi, pour L'eau par exemple qui n'avait rien à voir au niveau de l'ambiance au début et qu'on a retravaillé ensemble. On a souvent des bases de chacun sur lequel on met ensuite nos touches, on a ce côté où on aime travailler chacun de notre côté puis on réunit nos idées.
Comment est venue l'idée de travailler autour des quatre éléments ?Tino : C'était un coup de tête... Quand on a écrit Le Feu, on passait notre temps devant un poêle avec un rituel de soirée, ça nous a beaucoup inspirés et on a décidé de poursuivre avec les autres éléments d'une façon très naturelle.
Tristan : Après ce morceau, l'idée était claire, mais il fallait trouver comment articuler ça.
Les quatre éléments rejoignent aussi l'idée de totalité, c'est ce que vous avez cherché à toucher aussi musicalement ...Tristan : C'est vrai qu'il y a plusieurs atmosphères, textures de musique, mais on n'avait pas exactement cette idée. Quand on a commencé à travailler , j'avais de suite cette idée de lourdeur, d'ancrée, pour L'Air il y a beaucoup de souffle, donc naturellement en y allant premier degré, on peut trouver des voies d'inspiration, mais on n'a pas encore tout exploré.
On aime la liberté de ne pas savoir ce qui va se passer dans la soirée.Vous avez cherché à lier la musicalité des titres à chacun des éléments alors pouvez vous nous les décrire ?
Tristan : Pour L'Air, on est partis d'un " hmmmm " naturel qui a donné la tonalité, l'idée de souffle était évident. On voulait quelque chose de léger, mais aussi de la tempête.
Le Feu est très chaleureux, il rassemble beaucoup. Il n'était pas réfléchi ainsi, mais on retrouve cela sur scène, il y a un truc un peu magique de communion avec ce morceau.
Pour L'Eau on avait un riff de voix sans paroles, dans l'ambiance il y a quelque chose de rebondissants, sur les flots et c'est plutôt joyeux.
Le morceau La Terre est pesant, lourd.
Comment écrit-on des paroles sur des atmosphères comme celles-ci ?Tino : On tourne en rond pendant une semaine (rires).
Tristan : C'est un peu ça, on tâtonne, on chantonne. Pour nous tout instrument à un corps et après il y a son timbre : la mélodie est le corps et le timbre, ce sont donc les paroles. De fait, sur L'Air, on a essayé de mettre beaucoup de " ssss-" , de " fffff-" , des sifflantes, pour que les mots qu'on choisit s'accordent avec la musique. C'est un bon Tretris.
Et chaque chanson renvoie aussi à une thématique plus générale aussi je crois, comme la mort ou la naissance ?Tristan : parle de l'inspiration incapable qui emporte et qu'il faut saisir, renvoie à la naissance, la création, est la mort, ce qu'il se passe après, le retour à la nature comme résidu et Le Feu, la mort.
Dans ce processus créatif, je crois que vous ne vous occupez pas seulement de la musique ?Tristan : Oui, on essaye de faire un peu tout, on vient d'un univers ultra indépendant tous les deux, donc c'est une envie, mais c'est aussi parce qu'on sait le faire.
Tino : Ça donne notre ADN, tout transpire Walter Astral.
Le clip d'Air par exemple ? Comment l'avez-vous imaginé et travaillé ?Tristan : on a un ami aiguilleur du ciel qui possède une montgolfière, il nous a donc proposé un live. Il nous a d'abord proposé une balade, où on prenait le banjo et on chantait en l'air. Mais nous, on a voulu profiter de cette proposition pour faire quelque chose d'encore plus grand : la montgolfière passait au-dessus de la maison où on créé donc j'ai écrit un storyboard d'idées de ce qu'on pourrait mettre en images.
Valentin Becouze, notre ami et réalisateur, a repris en mains tout ça et on a fini par tourner en une seule journée. C'était assez compliqué parce qu'on a tout tourné au drône et lorsqu'on regarde une montgolfière, on a l'impression que tout est lent, mais en vrai tout était emporté par le vent. Le drône nous courait après donc on a dû modifier nos idées de base. La journée était très familiale, tout le village venait nous aider. C'était très organique et grosse improvisation.
Tout votre projet a l'air de partir de moments très simples, randoms, pour se transformer en quelque chose d'organique et familial ?Tristan : C'est vrai, on a la chance de toujours retrouver une bienveillance autour de nos projets.
Tino : Je fais aussi du cinéma à côté et ça me tenait à coeur de faire un film avec toutes les équipes qui sont si investies, on est une vraie famille. On aime travailler comme ça.
Qu'est que ça vous fait de passer au Chorus ce soir ?Tristan : C'est fun. C'est étonnant d'être dans la Seine Musicale, l'endroit est particulier. On retrouve tous les Inouïes de l'année dernière, c'est un peu une colonie de vacances qui se retrouve.
Quand vous passez sur scène qu'essayez-vous transmettre au public ?Tino : Du plaisir tout simplement, on ne cherche pas à transmettre quelque chose en particulier, ce que nous on voudrait que les gens ressentent, on veut juste un bon moment et une communion.
Tristan : On aime la liberté de ne pas savoir ce qui va se passer dans la soirée.
Est-ce difficile de passer des formats albums au format live avec ce type de titres, parfois longs et qui nécessitent une compréhension du projet ?Tristan : C'est beaucoup de repets, de jam-sessions.
Tino : On a une partie qui est proche de ce qu'on retrouve dans l'album et une partie qu'on nomme " le maxi trip, " c'est le moment impromptu qui peut se poursuivre jusqu'à ce qu'on en puisse plus. L'essence du morceau part d'un endroit et après, on peut aller super loin.
Quelle est la suite dans les prochains mois pour Walter Astral ?Tristan : On écrit beaucoup de chansons et il va y avoir des surprises avant l'été.