Tu te réveilles.
La même désagréable impression qui te revient, par intermittences, puis s’installe.
Des morceaux de verre plein la bouche, en sang, que tu recraches, qui s’installent dans les replis de la joue, sous la langue, que tu recraches mais que tu n’élimines pas totalement, qui te coupent le palais, la gencives, que tu retiens d’avaler, comme ta salive, mais à force, tu étouffes, de tout retenir tu étouffes, et dans les plaies, dans les cavités ainsi creusées, se casent ces tous petits bouts et s’y implantent…..
Tu te réveilles. Il fait nuit. Tu as retrouvé l’envie de pleurer.
Tu te réveilles.
Le jour n’a pas encore fait son apparition, mais tu l’attends, sans désir ou sinon celui de la nuit à venir, la même, la sempiternelle. De ces nuits qui ne vous laissent aucun répit, tant elles sont hantées par ces disparus. Alors là, tu ouvres les yeux, comme pour amadouer ce noir qui t’abîme dans l’aurore de tes défaites, de toutes celles à venir, bien évidemment, car tu ne comptes plus les anciennes. Les à venir te sont bien plus sensibles. Les advenues t’accompagnent déjà.
Tu te réveilles. Il fait nuit. Tu as retrouvé l’envie de pleurer.
Tu te réveilles.
La minute sombre est propice à ce décompte d’un temps qui n’ a jamais fini de s’installer, comme un feu propagé dans les lignes écrites hier déjà, avant : encore, demain : à savoir. Suffit-il que tu bouges la tête ? Suffit-il que tu règles ta respiration sur cette énumération de ces bagages emportés ? La mémoire n’en retient plus alors que le jaune de ces vieux murs qui ne t’ont jamais semblé habités. De ce grenier désormais vidé, il ne te reste que peu de place.
Tu te réveilles. Il fait nuit. Tu as retrouvé l’envie de pleurer.