Paris, Ile de France, France
Samedi 1er avril 2023, 21h30.
Singular Insularity est composé de
Olivier Ker Ourio ( La Réunion) : harmonica, compositions, direction musicale
Gino Chantoiseau (Ile Maurice): guitare basse électrique
Grégory Privat ( Martinique): piano
Abraham Mansfarroll (Cuba) : percussions
Pour commencer, " Bluesette ", un standard du Jazz composé par M. Jean-Baptiste Frédéric Isidore, baron Thielemans dit " " (1924-2016), le seul Jazzman anobli par sa Majesté le Roi des Belges. Accordéon, sifflement, guitare, harmonica tels étaient les instruments de M. le baron Thielemans. Sa Majesté la Reine d'Angleterre Elisabeth II a anobli les Beatles et les Rolling Stones. A t-elle anobli des Jazzmen?
Ca pulse souplement et énergiquement. La rythmique percute ferme avec le voile de mélancolie de l'harmonica. Je bats la mesure du pied droit. Ca accélère en souplesse mais toujours avec le chant nostalgique de l'harmonica. Joie et nostalgie se mêlent délicatement. Sans l'harmonica, la joie domine et la musique s'élance. Gros son de basse. Batterie et percussions nous fouettent le sang.
Enchaînement direct sur un morceau plus joyeux, plus sautillant. " A380 " (Olivier Ker Ourio). L'avion d'Airbus n'est plus produit mais vole toujours. La musique aussi. Le mélange des rythmes entre Océan Indien (harmonica, basse) et Mer des Caraïbes (piano, batterie & percussions) fonctionne à plein régime. Ma voisine de droite danse sur sa chaise alors que son compagnon reste assis sagement à écouter. Ca chauffe entre basse, batterie et percussions alors que le pianiste brille en solo. Pas de place pour danser et c'est un concert assis. Pour suivre Grégory Privat, il faut être un bon danseur mais c'est jouable. Il y a tant de pianistes éthérés ,froids, qui ont mal digéré Bill Evans, que ça fait grand bien d'entendre un pianiste qui fait fumer le piano et chauffer le public. Ca chauffe dur. Nous sommes embarqués. Loin de Paris par l'esprit.
Une chanson traditionnelle des Iles de France (Maurice) et de Bourbon ( La Réunion), les soeurs de l'archipel des Mascareignes. " Le Roi dans le Bois ". Duo piano-harmonica en introduction. Une ballade sentimentale, poignante. Dialogue ludique avec des phrases très courtes de chacun. Le bassiste installe une pulsation derrière. Le percussionniste commence à tapoter. Le batteur aussi. C'est parti. Ca file joyeusement. A la rythmique de mener la danse. Ca chauffe dur. Grégory Privat est moins à l'aise sur un rythme indocéanique que caribéen. Il reste excellent mais un peu moins. Premier solo de percussions. Ma voisine de droite mime ses gestes. Elle est dedans. Son compagnon est toujours aussi sage. Il filme. Les tambours roulent sous les paumes des mains. Cuba, Si! Le batteur lui répond aux baguettes. Dialogue inter îles entre Cuba & Guadeloupe. Le groupe repart. Décollage immédiat.
Une composition d'Olivier Ker Ourio écrite à Paris. " Chanson douce ". Ne pas confondre avec " Le loup, la biche et le chevalier " de Maurice Pon, chantée par Henri Salvador, souvent appelée " Une chanson douce ". Une ballade. Ca balance doucement. Batteur aux balais. Olivier Ker Ourio nous apprend qu'il a écrit sa chanson dans son canapé. A utiliser comme argument de vente pour le canapé. Il semble confortable à l'entendre. La musique se prélasse. Le batteur est aux balais. Premier solo de basse. Chantant. Ca marche. Je m'endors bercé par la musique. Bien qu'assis sur une chaise en bois digne d'une église de campagne bretonne, je me sens installé dans le canapé profitant du soleil par la fenêtre ouverte.
Une composition tirée de l'album " Singular Insularity ". " La Beaumarchais ". Le pianiste commence seul. La rythmique suit. Ca balance bien et réveille en douceur. L'harmonica vient ajouter son chant. Ca balance tranquille. Ma voisine de droite s'est remise à danser doucement sur sa chaise. Je suis bercé énergiquement, entre rêve et éveil.
Le titre album " Singular Insularity ". Cf extrait audio au dessus de cet article. Avec un effet d'écho. Le groupe démarre avec un un rythme plutôt indien, il me semble. Océan Indien en tout cas. Des îles d'où viennent Olivier Ker Ourio & Gino Chantoiseau. Grosse montée en puissance. Le quintette a décidé de nous réveiller d'entrée. Courte citation de " Caravan " de Duke Ellington & Juan Tizol à l'harmonica. Grosse pulsation de la basse. Fin hachage de la batterie et des percussions. Encore une composition écrite par Olivier Ker Ourio dans son canapé de la rue Baste, 75019 Paris, France. Energique celle-ci.
" Largue Pa Tyinbo " (Olivier Ker Ourio). En créole de La Réunion, " Tiens bon ", " Ne lâche rien ". Ca balance tranquille avec une basse bien ancrée.
" Zenfants la Creuse " . Les enfants de La Creuse, ce sont plus de 2000 enfants Réunionnais qui de 1962 à 1984, ont été enlevés à leurs parents et à leur île pour repeupler les campagnes françaises. Sur ordre d'abord de Michel Debré, Premier ministre de Charles de Gaulle et député de La Réunion. Un drame humain dont les plaies ne sont toujours pas cicatrisées. Une ballade triste. Forcément, vu le thème. Beau solo chantant de basse de Gino Chantoiseau. Digne de son nom de famille. La musique m'empêche de comprendre les conversations qui se tiennent au bar mais c'est l'inconvénient d'un club de Jazz comme le Sunside. Vous y entrez pour y suivre des conversations mais vous ne pouvez pas à cause de ces fichus musiciens qui persistent à jouer pendant que les clients parlent. Cela manque de décence commune comme disait Georges Orwell. La rythmique chauffe de plus en plus dur suscitant l'enthousiasme de certaines spectatrices. Une dame blonde, un peu petite, se met debout pour admirer le pianiste. Chant poignant de l'harmonica mais avec de l'espoir tout de même.
La musique est magnifique mais elle m'empêche de suivre les conversations du bar et j'ai un sérieux coup de barre. Quand je pars, j'entends un immense CHUT! de spectateurs bien décidés à écouter la musique destiné à ceux qui préfèrent s'écouter parler. Voilà, c'est fini.