Raymond Delley a écrit trois romans, dans l'ordre de parution:
- Les Clairières (2017)
- Quelques jours en automne (2019)
- Comédie humaine (2022)
qui constituent ce qu'il appelle une Trilogie de la mémoire.
Dans Comment je suis devenu écrivain, à un moment du récit, il raconte comment lui sont venues ces histoires à partir de choses vues et d'êtres réels qu'il a réussi à métamorphoser...
Son éditeur, Michel Moret, lui a demandé d'écrire son autobiographie littéraire. Le résultat est une introspection qui permet d'avoir un bel aperçu de l'homme comme de l'oeuvre.
Celui qui lit et parle des livres pour eux-mêmes et, proustien, distingue l'oeuvre de leur auteur, ne se désintéresse pas à ce dernier. Mais son intérêt pour lui ne peut être le même.
Que Raymond Delley ait été professeur n'a pas fait de lui un écrivain: il a mué. À la fin, il donne malicieusement la parole au professeur pour savoir ce qu'il a à dire de l'écrivain...
Comme chez tout homme, il faut revenir à l'enfance, c'est-à-dire à la genèse, pour comprendre l'écrivain qu'il est devenu et qu'il est, ce qui, en lui, est changeant et permanent.
Pour mieux parler de l'enfant qu'il a été, il le met à distance en employant la troisième personne du singulier et ne revient à la première, naturellement, que lorsqu'il est fait homme.
Il ne s'agit donc pas de sa part d'une quelconque fatuité mais d'une commodité. Et cet enfant qu'il a été préfigure et porte déjà en lui l'homme, le professeur et l'écrivain qu'il sera.
Cet enfant, en s'éveillant à la langue, fait l'apprentissage des mots dont il a le pressentiment qu'ils sont toujours plus que les choses, qu'en eux [brille] une lumière qui [vient] de loin.
Dans les livres que lisent les jeunes de son époque, les mots, d'une inépuisable beauté, lui laissent apercevoir d'autres temps, d'autres espaces, le monde entier, entrevoir l'Invisible.
Au pensionnat, grâce à un grand, il s'aventure dans la lecture sérieuse, puis, dans la poésie, grâce à un professeur, Louis Page, qui, précédemment, lui avait fait aimer les dictées.
Au collège, où ils étaient une matière scolaire, puis à l'université, où ils sont devenus un domaine de savoir, les livres n'ont pas cessé d'occuper une place essentielle dans [sa] vie.
Ceux qui, comme lui, lecteurs insatiables, remettent souvent sous leurs yeux des passages d'ouvrages lus et aimés ou qui récitent des vers jadis appris, conviendront avec lui:
Une oeuvre littéraire ne vaut que par le style, c'est-à-dire par la manière dont l'auteur imprime à la langue une marque nouvelle, une inflexion originale, une empreinte singulière.
Francis Richard
Comment je suis devenu écrivain, Raymond Delley, 136 pages, Éditions de l'Aire
Livre précédent:
Quelques jours en automne (2019)