passe passe le temps des abîmes
il faut surtout pour faire un mort
du sang des nerfs et quelques os
que finisse le temps des taudis
passe passe le temps des maudits
il faut du temps pour faire l’amour
et de l’argent pour les amants
vienne vienne le temps des vivants
le vrai visage de notre histoire
vienne vienne le temps des victoires
et le soleil dans nos mémoires
ce vent qui passe dans nos espaces
c’est le grand vent d’un long désir
qui ne veut vraiment pas mourir
avant d’avoir vu l’avenir
que finisse le temps des perdants
passe passe le temps inquiétant
un feu de vie chante en nos coeurs
qui brûlera tous nos malheurs
que finisse le temps des mystères
passe passe le temps des misères
les éclairs blancs de nos amours
éclateront au flanc du jour
vienne vienne le temps des passions
la liberté qu’on imagine
vienne vienne le temps du délire
et des artères qui chavirent
un sang nouveau se lève en nous
qui réunit les vieux murmures
il faut pour faire un rêve aussi
un coeur au corps et un pays
que finisse le temps des prisons
passe passe le temps des barreaux
que finisse le temps des esclaves
passe passe le temps des bourreaux
je préfère l’indépendance
à la prudence de leur troupeau
c’est fini le temps des malchances
notre espoir est un oiseau
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Gilbert Langevin (1938-1995) – Chansons et poèmes (1973)