La FIFA suit sa propre voie dans le jeu après s’être séparée d’EA. Mais qu’est-ce qui vient ensuite? Parce que produire des jeux triple A à partir de zéro coûte cher.
La semaine a été chargée pour Gianni Infantino. Il avait confirmé que la FIFA utiliserait des groupes de quatre équipes et un huitième de finale dans sa Coupe du monde à 48 équipes en 2026, une décision qui fait passer le nombre de matches à jouer de 64 au Qatar à la fin de l’année dernière à 104. Il y aura également une Coupe du monde des clubs idiosyncrasique qui prend le pire de la version existante de cette compétition – que les plus grandes confédérations doivent franchir trop peu de cerceaux pour pouvoir se qualifier de “champions du monde des clubs” – et en fait un tournoi à 32 équipes à la place.
Et maintenant, après avoir suspendu une planche à roulettes métaphorique sur son épaule tout en enfilant une casquette de baseball à l’envers, il est revenu au sujet des jeux vidéo. Ou, comme les appellent les joueurs, des “jeux”. S’exprimant cette semaine, Infantino a déclaré: “Le nouveau jeu FIFA, le FIFA 25, 26, 27 et ainsi de suite sera toujours le meilleur jeu électronique pour n’importe quelle fille ou garçon, nous aurons des nouvelles à ce sujet très bientôt.”
On sait qu’une scission s’est produite entre l’instance dirigeante du jeu mondial et Electronic Arts (EA), les personnes qui ont produit la série de jeux FIFA au cours des trois dernières décennies, mais à quel point ses plans sont-ils réalistes pour faire renaître le “officiel” version du jeu de football le plus populaire au monde ?
La série de jeux FIFA est une vache à lait absolue. FIFA 23 était le septième best-seller au monde en 2022, et le produit de la vente du jeu lui-même n’est pas le seul prix offert aux gagnants de cette bataille particulière. En plus de ces revenus, il est également possible de gagner d’énormes sommes d’argent auprès des joueurs une fois qu’ils ont effectivement acheté le produit.
EA s’est déjà engagé à poursuivre sa série sous le nom d’EA Sports FC à partir de l’année prochaine. La seule différence que les joueurs pourraient rapidement remarquer sera l’absence de Coupe du monde dans le jeu. EA détient déjà des licences pour à peu près tout le reste. Mais malgré les informations selon lesquelles la FIFA avait exigé plus de 250 millions de livres sterling par an pour qu’EA continue avec la licence qui a tant fait pour faire de leur jeu le meilleur chien en premier lieu, il n’est pas facile d’avoir beaucoup de sympathie pour les producteurs du jeu.
En 2021, la dernière année pour laquelle de tels chiffres sont disponibles, EA a gagné 1,62 milliard de livres sterling grâce aux modes Ultimate Team de leurs jeux, dans lesquels les joueurs peuvent constituer une équipe en utilisant des cartes virtuelles qui peuvent être gagnées ou – et c’est la clé – achetées pour jouer en ligne ou hors ligne.
Sur l’ensemble de leurs titres de football, de football américain, de hockey sur glace, de basket-ball et de l’UFC, ces 1,62 milliard de livres sterling représentaient 29% de leurs revenus annuels totaux pour cette année-là.
Le mois dernier, le gouvernement britannique a cessé de prendre des mesures concernant les boîtes à butin, bien qu’il ait constaté que les joueurs qui achètent des boîtes à butin sont “plus susceptibles de subir des dommages liés au jeu, à la santé mentale, aux problèmes financiers et au jeu problématique”. Donc, avec cette oie dorée ayant reçu un sursis d’exécution sur un assez grand marché et beaucoup plus de beaux et beaux butins à accumuler, il était toujours probable que deux organisations aussi avides que EA et la FIFA auraient fini par se partager l’argent, avec la probabilité qu’ils se battent également comme des rats dans un sac pour les revenus futurs des boîtes à butin.
Mais Infantino sait-il vraiment ce qu’il va faire ici ? L’époque des codeurs de chambre assommant un jeu vidéo en quelques semaines n’est pas tout à fait morte, mais ils sont certainement dans le monde des jeux triple A qu’EA habite. Les coûts combinés de production et de publicité s’élèvent à des centaines de millions de livres par an, tandis que le temps de développement pour construire une plate-forme sur laquelle Gianni Infantino est définitivement officiel FIFA 24
EA, bien sûr, a déjà son moteur de jeu en place et prêt à fonctionner.
Et l’histoire du précédent pour cela ne sonne pas vraiment bien non plus pour la FIFA, comme on peut le voir dans la débâcle Championship Manager vs Football Manager d’il y a près de 20 ans. Lorsque les producteurs de CM Sports Interactive se sont séparés des éditeurs Eidos en 2003, les éditeurs ont décidé de continuer à le produire, mais le public a suivi le jeu plutôt que le nom et un vaste fossé entre la qualité des deux a fait de Football Manager un monstre tandis que Championship Manager a boité face à des rendements décroissants jusqu’en 2011, et a été relancé pendant quelques années en tant que jeu mobile en 2013 avant de finalement abandonner complètement le fantôme en 2018.
Il est à présumer qu’Infantino est au courant de tout cela. Konami, le géant japonais de la maison d’édition et producteur, a tristement mis fin à sa série Pro Evolution Soccer et a recommencé avec eSoccer 2021un jeu qui est entré dans les annales de l’infamie comme l’une des pires sorties de ces dernières années.
Ses nombreuses lacunes ont été largement corrigées maintenant, mais il n’a montré aucun signe qu’il pourrait renverser la série FIFA.
Alors que fait Infantino maintenant ? Engagez un développeur pour le produire, vraisemblablement, puis la course est lancée. Sa déclaration est quelque peu floue, mais quand, exactement, compte-t-il lancer ce titre ? Il n’y a pas encore de date de sortie fixée pour EA Sports FC, mais si l’on peut raisonnablement présumer qu’il correspondra à ceux de l’ancienne série FIFA Soccer, cela signifierait septembre. Donc, si la FIFA envisage de s’attaquer à ce géant, a-t-elle déjà commencé le développement ? Si oui, qui le fait ? Et si ce n’est pas le cas, combien de temps le permettent-ils ?
Pour être absolument clair, il ne s’agit même pas vraiment d’avoir à être “meilleur” que la version d’EA, qui a des détracteurs pour son gameplay ainsi que son attitude rapace envers les joueurs du jeu. Il est parfaitement acceptable de détester les deux côtés dans cet argument. Mais ce n’est même pas vraiment le sujet. Il s’agit des réalités froides et dures de la production de jeux vidéo au niveau auquel on s’attendra s’il s’agit d’avoir un chat en enfer pour défier la série FIFA d’EA et EA Sports FC. Qui achète quel jeu, qui s’abonne à quoi et qui commence à acheter ces loot boxes déterminera qui “gagnera” ce combat.
De manière quelque peu hilarante, Infantino a déjà déclaré: “Je peux vous assurer que le seul jeu authentique et réel portant le nom de la FIFA sera le meilleur disponible pour les joueurs et les fans de football”, ce qui vous rappelle principalement à quel point il est étrange qu’un tel une franchise de jeux à succès porte le nom d’un vieil organe directeur étouffant d’hommes sifflants, dont beaucoup ont l’air de ne pas avoir tapé dans un ballon de toute leur vie. EA en a l’habitude, sa série américaine tout aussi réussie portant le nom de John Madden, décédé fin 2021.
Il est absolument inconcevable que les joueurs s’intéressent davantage à ce nouveau jeu en tant que produit officiel de la FIFA
Avoir qui a les licences pour toutes les plus grandes ligues et joueurs – qu’EA détient déjà ;
La qualité du gameplay et la fiabilité des serveurs en ligne – dont EA a déjà la structure mais que la FIFA n’a pas, du moins pas publiquement ;
Et où leurs potes jouent le jeu – qui depuis 10 ou 20 ans a probablement été la FIFA, certainement depuis le dernier match Pro Evolution Soccer en 2017.
Ils veulent un produit authentique, pas un produit “officiel”, et si Infantino ou quiconque entreprend ce stratagème insensé en son nom ne le comprend pas, alors les perspectives pour eux de dépasser EA ne semblent pas bonnes.
Et si cela finit par échouer, les mots “le meilleur jeu électronique pour n’importe quelle fille ou garçon” devraient être écrits sur sa pierre tombale lorsqu’il est enterré. Premièrement, personne dans l’histoire de quoi que ce soit ne les a jamais appelés “jeux électroniques”, les principales références à ce mot en ligne étant déjà la mesure dans laquelle Infantino a été trempé pour avoir ressemblé à Steve Buscemi dans 30 Rock.
Et ce n’est pas tout. “Fille ou garçon”?
Signor Infantino, si je peux m’adresser à vous personnellement une seconde. J’ai 50 ans, je joue depuis que tu as encore des cheveux (plus de 40 ans, pour être un peu plus exact), et je ne suis en aucun cas le joueur le plus âgé que je connaisse. Et je dis cela parce que condescendre tout votre public en infantilisant complètement inutilement, eh bien, tous d’entre nous ne semble pas être un mouvement fraîchement sorti du magazine Marketing Week. L’âge moyen du gamer a été estimé à environ 35 ans, pour mémoire.
Il existe des moyens par lesquels la FIFA peut faire en sorte que cela fonctionne. Peut-être trouveront-ils quelque chose d’intéressant et d’imaginatif, plutôt qu’une pâle imitation des années précédentes. L’esport est une grosse affaire de nos jours, les clubs professionnels ayant leurs propres équipes. C’est peut-être ce que voulait dire Infantino quand il a dit “egames”. Mais même les appeler ainsi montre une insouciance qui n’inspire pas confiance. Il devrait probablement être conscient du fait que de nombreux joueurs lui donneront un œil de côté pour avoir perturbé le statu quo en premier lieu, même ceux qui ne se soucient pas de tous ces autres trucs.
Mais même espérer que l’esport sauvera la situation est quelque peu mince. Si la prochaine eCoupe du monde est joué exclusivement sur FIFA 24
Il est possible que la FIFA réussisse. S’ils embauchent les bons développeurs et que ces développeurs disposent des ressources et de la liberté nécessaires pour produire quelque chose de vraiment imaginatif, alors cela pourrait bien fonctionner. Mais personne n’a jamais voulu jouer en tant que West London White et personne ne veut vraiment marquer le but de la victoire lors d’une finale de Coupe du monde – et même pas lors de la Finale de Coupe du Monde FIFA 24
Mais le fait demeure qu’il s’agit d’une énorme entreprise logistique et il est difficile de croire que le gars qui les appelle “egames” pourrait être la bonne personne pour usurper la version rebaptisée d’EA, aussi imparfaite que soit ce jeu et même EA eux-mêmes. Il ne s’agit pas de vouloir que la FIFA échoue. Dieu sait que le jeu aurait besoin d’une meilleure concurrence pour EA que la médiocrité de Konami. Tout cela me semble un peu tiré par les cheveux. Mais encore une fois, que saurions-nous? Nous ne sommes que des garçons et des filles à la FIFA.
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