Cela fait un certain nombre d’années que j’ai droit à un remboursement des impôts, plus ou moins important. C’est en réalité un privilège : la plupart des contribuables n’ont pas les moyens d’avoir payé trop lors des prélèvements normaux, précomptes divers et autres. Ce n’est pas non plus la meilleure solution : être remboursé, cela signifie qu’on a prêté, sans intérêt bien sûr, de l’argent à l’État qui ne le rembourse que fort tard.
Du moins, quand il le rembourse. Par la force des choses, cette année fiscale est particulière. Ma femme ayant succombé à un foutu cancer en 2021, il m’a fallu choisir – en 2022 – entre une déclaration d’impôt conjointe ou séparée. Pas évident de savoir quel choix réaliser. Les outils de simulation ne sont soit pas évidents à gérer, soit pas à jour. Et pour la plupart, ils sont dans les deux cas. Finalement, après un contact téléphonique très agréable et efficace avec une fonctionnaire de l’administration fiscale, il est apparu qu’il m’était préférable de faire une déclaration commune. Cela me permettrait de gagner 5 euros !
Chose analysée, chose faite. Je reçus début décembre 2022 mon « avertissement-extrait de rôle » m’informant que l’État devait me rembourser l’équivalent d’un mois de ma pension, au plus tard le 28 février 2023. En janvier 2023, un courrier m’interpella. Il me disait que « le SPF Finances dispose toujours d’un remboursement des Contributions Directes en votre faveur. Une précédente tentative de régler ce montant a échoué ». Cela n'avait pas beaucoup de sens et j’ai téléphoné pour en savoir plus. J’eus très rapidement une conversation avec un fonctionnaire qui s’étonnait comme moi, mais qui disait que c’était sans doute lié au décès. Il me dit faire quelques manipulations informatiques et que tout était en ordre.
Le 28 février, ainsi que les jours suivants, pas de remboursement. Je me décide à nouveau de les appeler, moi qui déteste le téléphone. Miracle, je rentre une nouvelle fois très rapidement en contact avec une personne à qui je peux expliquer mon problème. Elle est très compatissante, m’explique qu’elle vient de traiter un cas semblable mais plus grave, qu’elle-même a été confrontée à une situation difficile lors du décès de son frère, etc. Surtout, elle me dit que le problème vient sans doute du fait que dans leur système, je suis répertorié comme « séparé ». Non pas « veuf », mais « séparé ». Elle m’explique que dans ce cas, le système refuse le remboursement ! Elle me dit faire une note et changer le statut, ce qui devrait permettre le remboursement dans les deux semaines. Au cas où ce ne serait pas le cas, elle me donne une adresse électronique…
À ce jour, pas de remboursement, comme de bien entendu. Mais le plus grave n’est même pas là. Ce qui me révolte le plus est de voir que l’administration transforme mon nouveau et difficile statut de « veuf » en « séparé ». Sur le plan affectif, c’est scandaleux. Il n’y a pas que dans l’administration que cela arrive. En juillet 2022, une banque m’avait demandé d’actualiser mes informations personnelles. Là non plus, le statut « veuf·ve » n’existait pas. La banque me demanda de me déclarer « célibataire ». Je ne suis ni séparé, ni célibataire. Je suis veuf. C’est un mot lourd de sens. Constater que ce n’est pas vraiment un statut dans certains cas administratifs est une injure impardonnable qui s’ajoute à la douleur personnelle. C’est inacceptable, mais…