« Nous allons continuellement être exposés aux virus venant des animaux et les choses ne changeront jamais si nous restons sur la même trajectoire », écrivent ces scientifiques, qui publient leur article de perspective dans la revue Science. Éviter d’avoir toujours un temps de retard, c'est en ces termes que ces experts appellent à rester vigilant et se mettre en recherche, dès maintenant, des virus à risque, afin d’anticiper les futures pandémies.
« Nous restons attentistes et n'étudions ces virus animaux qu’après qu'ils se soient propagés aux humains », ajoutent les auteurs, Cody Warren, professeur de biosciences vétérinaires à l'Ohio State University et Sara Sawyer, professeur de biologie moléculaire, cellulaire et du développement à l'Université du Colorado à Boulder.
Un cadre pour identifier les menaces virales pour la santé humaine
La plupart de ce que les scientifiques savent des virus chez les animaux est la liste des nucléotides qui composent leur séquence génomique, qui, bien que précieuse, offre très peu d'indices sur la capacité d'un virus à infecter les humains. Plutôt que de laisser la prochaine épidémie prendre le monde par surprise, ces virologues exhortent la communauté scientifique à investir dans un cadre de recherche afin de chercher à identifier de manière proactive ces virus animaux qui pourraient infecter les humains.
De nouvelles études expérimentales sur les virus animaux vont être indispensables : en mesurant leurs propriétés de compatibilité avec une infection humaine, il serait possible -et souhaitable- d’identifier les virus qui présentent le plus grand risque de zoonose et d’étudier ces virus plus avant.
Un message clé est que savoir qu'un virus animal peut se fixer à un récepteur de cellule humaine ne donne pas une image complète de son potentiel infectieux. Les chercheurs proposent une série d'expériences permettant de mieux évaluer le potentiel d'un virus animal à infecter l’Homme : ces expériences devraient déterminer si le virus est capable de :
- pénétrer dans les cellules humaines ;
- utiliser ces cellules hôtes pour faire des copies de lui-même et se multiplier ;
- une fois les particules virales produites, de passer outre l'immunité innée humaine ;
- si le système immunitaire humain a déjà été exposé à un autre virus de la même famille (immunité naturelle).
Un virus affecté de ces différentes capacités serait alors « candidat » à des recherches plus approfondies. Alors que de très nombreux virus animaux présentent une compatibilité humaine, ce protocole permettrait de bien sélectionner les virus nécessitant ces autres recherches.
L’hypothèse de familles virales « récidivistes » : les biologistes suggèrent de commencer par les virus de familles virales bien connues et qui infectent actuellement les mammifères et les oiseaux, dont notamment les coronavirus, les orthomyxovirus (grippe), les filovirus (causant des maladies hémorragiques comme Ebola et Marburg), les artérivirus, comme le virus de la fièvre hémorragique simienne qui existe chez les singes sauvages d'Afrique.
Enfin, les auteurs rappellent, concernant le COVID-19, que la disponibilité de vaccins dans l'année n'a été possible que parce que les scientifiques avaient passé des décennies à étudier les coronavirus et savaient comment les éradiquer. Le même travail devrait donc être entrepris sur les autres familles de virus.
« Si nous investissons suffisamment tôt dans l'étude des virus animaux et comprenons bien leur biologie, dans le cas où ils viendraient à attaquer l'Homme, nous serions mieux préparés à les éliminer ».
Source: Science 10 March, 2023 DOI : 10.1126/science.ade6985 Identifying animal viruses in humans
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Équipe de rédaction SantélogMar 14, 2023Rédaction Santé log