Celestia

Par Belzaran

Titre : Celestia
Scénariste : Manuele Fior
Dessinateur : Manuele Fior
Parution : Août 2020


J’avais mis « Celestia » dans les livres à découvrir, mais ce n’est que deux ans plus tard que je finis par le découvrir. C’est l’occasion de me rendre compte que Manuele Fior était également l’auteur de « Mademoiselle Else ». Je ne l’aurais pas deviné. Alors que l’actualité est plutôt à son nouveau bouquin « Hypericon » (dont la lecture sera plus rapide cette fois-ci !), il était temps de voir ce que valait ce pavé de 272 pages publié chez Atrabile.

Onirique ? Surréaliste ? Fantastique ?

Celestia est une île qui a été coupée du monde lors de la grande invasion. On ne sait pas grand-chose de tout cela. L’île est une sorte de Venise préservée des malheurs du monde. On va suivre la destinée de Pierrot qui n’était alors qu’un enfant lors du grand événement qui sépara Celestia du continent.

« Celestia » est une œuvre singulière. Elle possède un ton particulier, porté avant tout par les capacités télépathiques de nombreux personnages. Cette Venise dystopique et ses personnages perturbés (c’est peu de le dire) enrichissent cette impression de malaise. L’histoire va se concentrer sur Dora et Pierrot, deux êtres aux pouvoirs télépathiques particulièrement puissant dont certaines autorités aimeraient s’emparer.

Il est difficile de mettre le doigt sur l’univers de « Celestia ». Onirique ? Surréaliste ? Fantastique ? En termes de bande-dessinée, j’ai parfois pensé aux « Cités Obscures » de Schuiten et Peters. On traverse des endroits souvent vides, étranges, changeants ou tout paraît fonctionner selon des règles uniques. Si le lecteur est un peu perdu au départ, il finit par adhérer à l’univers et à se laisser porter par la fuite des deux jeunes gens.

Une grande partie de l’ouvrage repose sur cette relation conflictuelle et pourtant puissante. Comme disent les autres d’eux, « ils ont un lien ». On ressent bien ce sentiment d’attraction/répulsion entre eux. Pierrot ne cesse de repousser Dora sans pouvoir l’abandonner pour autant. Cette relation, qui culmine jusqu’à la fin, est l’autre grande réussite du livre. Tout juste regrettera-t-on la fin, peu satisfaisante au regard du reste de l’ouvrage.

Au niveau du dessin, Manuele Fior propose un style graphique personnel très réussi. La patte est indéniable et certaines cases sont simplement très belles à regarder. Étant donné la grande pagination, cela reste inégal, mais l’impression générale est clairement positive. Les couleurs sont bien choisies et certaines planches qui mettent en scène la télépathie donnent l’occasion à l’auteur de se lâcher graphiquement. Une belle réussite.

« Celestia » possède une belle identité, tant au plan graphique que de son univers. Les personnages principaux sont réussis et attachants, bien construits avec leurs failles et leurs faiblesses. Après un début où je ne savais pas trop où allait l’histoire, je me suis laissé porter par la dérive des deux personnages. Un bel ouvrage !