Credit Karma étend son champ d'action

Elle est loin l'époque où Credit Karma proposait uniquement aux américains de consulter leur score de crédit gratuitement. En 15 ans, la jeune pousse, acquise par Intuit en 2020, a assemblé une solution d'assistance à la maîtrise des finances personnelles qui intègre désormais un volet patrimonial, grâce à son absorption de Mint, une autre filiale du groupe, qui fut une pionnière historique du domaine.
L'évolution est logique. Grâce à ses méthodes d'analyse de la situation (notamment par rapport au crédit, qui reste au cœur de son ADN) et des comportements de ses quelques 120 millions d'adeptes, tous différents, Credit Karma délivre à chacun d'eux des recommandations pratiques destinées à les aider à mieux piloter leurs comptes courants, leur épargne, leurs cartes de crédit, leurs emprunts… Tant et si bien que ceux qui suivent ses conseils sont de plus en plus nombreux à accumuler un patrimoine.
L'ambition est donc de leur fournir un service adapté à leur réussite et de prolonger la mission initiale dans sa prochaine étape. Au démarrage, seules les personnes dont le score « officiel » est supérieur à 720 (ce qui représente l'indicateur de succès retenu) pourront profiter de l'offre qui, en outre, se limite pour l'instant à autoriser l'agrégation des composantes de leur fortune (surtout les investissements, mais aussi les éléments de passif, tels que les prêts hypothécaires) au sein d'un tableau de bord consolidé.
Progressivement, ne serait-ce que parce qu'il n'y a pas de seuil minimal pour commencer à se constituer un patrimoine, l'accès à ces possibilités sera démocratisé, en particulier sur les dimensions d'accompagnement qui seront ajoutées en parallèle. En la matière, Credit Karma semble devoir rester sur sa ligne stratégique existante, à savoir des suggestions de produits de partenaires (dans diverses catégories) directement associées à ses préconisations, de manière à stimuler et faciliter le passage à l'acte.
Il est toutefois impossible d'ignorer un autre aspect de cette caractéristique, puisque les commissions perçues pour ces références sont vraisemblablement un pilier du modèle économique de l'entreprise. Il s'agit peut-être même de l'avantage décisif que possède Credit Karma par rapport à Mint alors que cette dernière paraissait être, avec ses 15 ans d'expérience sur le sujet, une candidate naturelle à la conception d'une plate-forme de gestion de finances personnelles extensive. La recherche de rentabilité prévaut-elle ?
La question est importante car elle entraîne d'autres interrogations vitales, sur le cœur d'activité. En effet, la dépendance vis-à-vis des fournisseurs de services mis en avant auprès des utilisateurs est susceptible, d'une part, d'induire des doutes sur son objectivité et, en conséquence, d'affecter la confiance (il est vrai que, à ce stade, ce risque est apparemment sous contrôle), et, d'autre part, d'influer, parfois insidieusement, sur les mécanismes de conseil mis en œuvre, au détriment de la qualité du service.
Ce qui est certain, c'est que le concept de PFM, plusieurs décennies après ses premiers balbutiements, n'est toujours pas abouti et qu'il continue à chercher ses marques. De plus en plus d'acteurs comprennent aujourd'hui qu'il doit combiner personnalisation, prédiction et accompagnement opérationnel… mais la concrétisation de ces principes est difficile.