THE JORDAN Nowhere Near The Sky 2023
La jordane c'est Caroline Esmeralda Van der Leeuw, ancienne chanteuse de Groupe pop néerlandais Caro Emerald.
Ce dernier explose (haut) aux Pays-bas entre 2009 et 2010 dans un style jazzy.
Et soudain, Caro casse et conduit une rupture autant esthétique qu'artistique : 'J'en ai marre de l'image, des stratégies marketing et des décisions commerciales.'
Changements?
Il suffit de jeter un œil à la belle, confortablement installée, sur un fauteuil flottant sur l'eau (des canaux?). The Jorda(a)n renvoie au quartier de son enfance.
Robe imprimée sur tons rouges, cheveux noirs plaqués en arrière, visage figé, les yeux regardant l'objectif, Caroline semble pensive... ou 'Nowhere Near The Sky' (flanqué en grand blanc à travers la pochette).
Elle se dit inspirée (y'a pire!) par Lana del Rey et Portishead dont le guitariste / claviériste Adrian Utley apparait sur ce disque.
Tournons la page...
'The room' ouvre la porte, tout en délicatesse, avec une voix fragile au bout des lèvres.
Le titre avance comme une confession intime entre deux êtres.
L'instrumentation, aux claviers particulièrement discrets, laisse grande place à l'expression vocale.
En passant le seuil de cette intimité, on entend 'Is there anything you want to know about me?', une envie de se livrer... ('What was, was not')
...qui va loin puisque le titre suivant découvre 'Naked in the sun'.
Frappant de coups profonds, le morceau chaloupe, en bordures décalées trip-hop marquées d'explosions. Un constat navrant : 'I'm so tired with the bullshit!'
Extrêmement sensuelle par sa voix presque royale dans un champ de cordes caressantes, la compo traverse un nuage atmosphérique déroutant avant de réapparaitre renforcée.
On entre ensuite dans un trip à la James Bond girl et proche d'une BO tout aussi couronnée.
Echo dans les percussions puissantes et claviers à sons de cordes ou en vrombissements dramatisent les motifs de 'Best damn days'.
La tendance électro se fait plus prégnante. Le clavier tintinnabule délicatement.
La rythmique d'abord sourde, va ensuite, chercher sur 'Temptation' un côté massif rappelant le dance floor, tendance Kylie Minogue.
La voix multiplie les couches sur le refrain. Toutefois, les arrangements jouent sur du velours passant du son synthétique à celui de cordes avec beaucoup d'élégance.
Interlude derrière un piano/guitare inquiétant, Caro susurre au creux de l'oreille : 'Are you going bigger, I'm going smaller... my heart 's getting colder...'.
Les percussions, signées dans un écho trip-hop, assombrissent 'I'm not sorry'. Tant qu'à faire appel à Adrian Utley, autant creuser le sillon ambient.
Le flux se ressent dans un balancement lascif qui rend la piste distinguée et ensorcelante.
Violons célestes, puis une guitare, dans un son désolé avec e-bow, sentiment confirmé par la basse et la rythmique électronique en fond.
La voix, d'un grand raffinement, jamais ne force. Les claviers évanescents l'entourent d'un cocon protecteur.
Caroline a beau se confier... 'You Don't Even Know Me' reste la conclusion décevante... '... and I wait wait wait for a bet bet bet better day'.
L'ambiance éthérée laisse flotter une mélancolie touchante. Quel standing!
Un rythme carré et un gimmick simpliste au piano démarrent en rampe de lancement d'un chant aristocratique.
'Waste me' ne gâche rien, par sa délicatesse parfaitement guidée, sur une mélodie qui finit par épaissir.
Si j'étais dans l'industrie cinématographique, je n'hésiterais pas un instant à retenir ce type de chanson envoûtante.
On croit d'ailleurs reconnaitre un cymbalum (au son de machine à sous) rappelant la musique de la série Amicalement Vôtre.
Un roulement parfaitement huilé habille cette plage de petits bruits chatouillant l'oreille. Un ensemble de détails rendent ce morceau captivant jusqu'au bout.
Un synthé à vibrations sombres et une grosse rythmique basse s'interrompent pour laisser passer la voix, quasi a capella, sur un piano léger.
Le morceau 'Someone new' glisse, en alternant les 2 positions précédentes, la cadence la plus marquée nous emportant vers la danse.
'Nothing new' (après 'Someone new') faudrait savoir! Derrière une brise de violons, il ne reste qu'un piano et la voix, rejoints plus loin par une nappe au clavier et des coups percutants.
Puis Koen de Witte, du groupe Solomon, apporte sa voix basse pour un bref duo.
Conclusion 'You Will Never Make Me Cry Again' affirmée par une voix résolue sur un rythme discoïde aussi régulier que des battements de cœur tranquilles.
Quelques chœurs gospel pleurent au loin, un synthé versatile se faufile sans faire trop de bruit.
Jonction par 'A price to pay' où la voix de Caro hurle : 'I won't talk about my heartbreaks, I won't talk about my sorrows... I'm a rebel in the skies...'
La batterie ruisselante d'écho laisse passer quelques éclairs de claviers évanescents. Le rebond de la basse finit par nous évoquer Portishead.
Lorsque l'instrumentation s'enrichit d'un piano en crachin, d'un saxophone sombre et d'envolées aux violons, le style devient plus aristocratique.
Le mouvement souple de la piste correspond totalement à son titre félin 'Catwalk'. 'I need you', répété en boucle dans un souffle, prend des allures alanguies que Marylin n'aurait pas reniées.
'Mmm' imite un baiser. La guitare, à peine effleurée, ne fait pas d'ombre aux vocaux.
Une doux rythme finit par s'exprimer à l'avant d'un bruit de frottement de cordes.
Rien ne semble perturber le chant angélique finalement gonflé de chœurs avant de finir dépouillé.
Je crois avoir déjà tout dit.
Sous couvert de douce psychothérapie, ce disque réussit à faire danser, trembler, respirer et finalement à embarquer.
Une lueur divine pas loin du ciel!
Tracks :
1. The Room
2. What Was, Was Not
3. Naked in the Sun
4. Best Damn Day
5. Temptation
6. Memento
7. I'm Not Sorry
8. You Don't Even Know Me
9. Waste Me
10. Someone New
11. Nothing New (ft. Koen De Witte)
12. You Will Never Make Me Cry Again
13. A Price To Pay
14. Catwalk
15. Mmm
Produit par David Kosten (Keane, Bat For Lashes, Chris Martin...), Eg White (Florence + The Machine), Wieger Hoogendorp, Robert Biesewig et Wouter Hardy