L'enseignement de Ramana Maharshi invite à "plonger dans le Soi" (âtma-mârgana). Cette voie "directe" ou "droite" (ârjava) est ainsi résumée en sanskrit par Ramana :
hṛdaya-kuhara-madhye kevalaṃ brahma-mātraṃ
hy aham aham iti sākṣād ātma-rūpeṇa bhāti /
hṛdi viśa manasā svaṃ cinvatā majjatā vā
pavana-calana-rodhāt ātma-niṣṭho bhava tvam //
L'absolu pur et simple
brille simplement et directement
au centre de la caverne du cœur,
en tant que soi-même,
"je suis je".
Plonge dans le cœur
avec le mental, par toi-même,
en méditant ou en t'immergeant.
Le souffle suspendu, vis en toi même à jamais.
L'expression ahama-ahamtayâ n'a pas de traduction évidente. S'agit-il de "je.. je..." ? Mais qu'est-ce que cela voudrait dire ? Ou bien de "je suis je", plus conforme à l'usage sanskrit. Cette dernière interprétation, que je choisi, ressemble à celle du shivaïsme du Cachemire, and l'expérience de la non-dualité est décrite justement par cette même expression aham aham, "je suis je".
David Godman tend vers cette interprétation dans deux articles très pertinents :
Sur le sens de l'expression aham aham
Sur "je suis" comme nom de Dieu
Je suis tombé sur une autre occurrence de cette expression, rare à ma connaissance en dehors de Ramana et du shivaïsme du Cachemire : l'Essence de l'enseignement des Upanishads (Sarva-vedânta-siddhânta-sâra-samgraha), une œuvre en un milliers de versets, attribuée aujourd'hui à Shankara Bhagavatpâda, mais en réalité œuvre d'un Shankara disciple d'Advayânanda.Dans le verset 614b, on lit en effet :gaṅgā-bhaṅga-paramparāsu jalavat sattā-anuvṛtta-ātmanastiṣṭhaty eva sadā sthirā aham-aham ity ekātmatā sākṣiṇaḥ(Les cognitions) se succèdent telles les vagues sur le Ganges. Mais l'existence du Soi est continue, comme celle de l'eau (dans les vagues). Il est est toujours présent. L'unique identité est stable en tant que "je suis je".qui appartient au témoin (des "vagues" des cognitions).