I
Brûlent nos amis
Incomplètes sont leurs cendres
Ils sont comme les saints
Que nous vénérons en secret
Leur feu est pur et lent
Et s’étend en cercles de forces
Et lorsqu’ils nous quittent enfin
Ils laissent en nous
Dans le cercle
De leur disparition
Un feu que nous éprouvons
Jusqu’à la perte
II
Aux heures de doute
Que donnons-nous
À nos amis
Sinon un bout de chanson à boire
Et un peu d’or volé au temps
Sinon un bras pour traverser une rue
Dans le plein midi
Et une lame pour trancher
En toute équité
L’impossible litige
III
Laissons se déposer
Au fond de nous
Les images de nos amis disparus
Leur chute lente et imperceptible
Est une chute d’images
Une descente en flammes
Où une rose
Brûle les degrés
De l’Enfer
Et traverse notre nuit
Pour illuminer notre coeur divisé
IV
La plus humble prière
Et un ami
Pour mourir
Sont la mesure incertaine
De toute chose
Le point d’élévation
Où nous finissons
Par disparaître complètement
Pour nous établir
Au sommet
De ce que nous sommes
Dangereusement
***
Paul Vallée (Ayer’s Cliff 1970-2002)