Au début des années 2010, Djo, trentenaire parisien en séparation avec sa compagne (la magnifique et lumineuse Ophélie Bau), est livreur et vit temporairement chez sa mère, où il tente d'accueillir sa fille une semaine sur deux.
La question du logement est déjà complexe chez cette famille dont le salon se transforme toutes les nuits en dortoir, mais lorsqu’une tante de Djo fuyant le conflit ivoirien, débarque un soir paniquée avec ses trois enfants, la situation devient de plus en plus critique.
A la recherche d’une solution, face aux demandes de plus en plus nombreuses et au contact d’un promoteur immobilier pas forcément des plus nets, Djo devient marchand de sommeil.
Le Marchand de sable premier long métrage d'un Steve Achiepo, qu'on a notamment vu acteur chez Richard Berry dans "Tout, tout de suite" * est une oeuvre étonnante, alliant film de genre et problématique sociale peu traitée au cinéma.
Le film met en effet en scène une activité organisée, un peu gérée comme une mafia, avec des expulsions manu militari de squatteurs exploités aussi bien par des individus sans vergogne que par tout un système.
Le long métrage d'Achiepo s’inscrit à la fois une peinture du monde d'aujourd'hui aussi bien sociale que politique, tout en optant pour un cinéma proche du cinéma de genre, avec une montée en tension remarquablement tenue. Le Marchand de Sable regorge de scènes d'une grande puissance visuelle, incarnées par des personnages qui sortent des archétypes et questionnent avec intelligence la question morale soulevée par le sujet
Car, en saisissant toute la complexité de la situation, Steve Achiepo dresse un constat troublant sur un dysfonctionnement qui entraine le fait que passer de l'autre coté de la légalité se révèle une solution in fine plus fiable que celles proposées par l’Etat, représentée par une Ophélie Bau saissisante en assistante sociale impuissante.
Le film revêt sous certains angles les codes du thriller, où la vie d’autrui dépend d’enjeux à suspense. Sous un autre angle, il y a du drame familial plus intime, où un couple séparé doit continuer à avancer.
A la fois lyrique et intime Le Marchand de sable est porté par un sens du romanesque, et même de la tragédie, qui lui permet de s'éléver et de toucher à l’universel.
Poussée par cette recherche d'objectivité et d'une maitrise narrative qui peuvent évoquer la démarche d'un Jimmy Laporal-Trésor pour son épatant Rascals, Steve Achiepo livre avec Le Marchand de Sable un thriller politique à la mise en scène particulièrement brillante
Le tout sublimé par le travail de Sébastien Goepfert à la photographie, et porté par un très beau casting, en haut duquel l’excellent Moussa Mansaly assume avec force et fragilité en même temps son premier grand rôle sur grand écran.
Un grand film, révélation du dernier festival du film de société de Royan , à ne pas rater pour sa sortie en salles.
LE MARCHAND DE SABLE****
Film de Steve Achiepo
avec Moussa Mansaly, Aïssa Maïga, Ophélie Bau, et Benoît Magimel |
*un Richard Berry qui devait jouer au départ dans Le Marchand de sable le rôle du promoteur véreux repris par Benoit Magimel suite à la fameuse histoire familiale et judiciaire le concernant.
Le 15 février au cinéma
En salles mercredi prochain, Le Marchand de sable de Steve Achiepo à la fois lyrique et intime, est amené par un souffle qui permet de prendre de la distance sur le sujet sociétal et de toucher à l’universel. pic.twitter.com/jVHP9QSBJs
— Baz'art (@blog_bazart) February 9, 2023