Elle n'avait plus de voix, elle était ses yeux, cela valait la peine d'être lui pour être regardé comme ça - l'humanité entière n'était-elle pas rachetée à la seule condition qu'une créature céleste ait, l'espace d'une minute, de tels yeux pour quelqu'un ?
Déjà il entrait dans son étreinte, et elle recevait son souffle, je vais te dire un grand secret, je t'attendais depuis tellement plus longtemps que mon temps de vie, tant de millénaires pour arriver jusqu'à toi, que tes mains se referment sur mon visage, je sais enfin pourquoi je respire, même si je ne respire plus en cette seconde, je vais te dire un grand secret, il est plus facile de mourir que de vivre, c'est pourquoi je vivrai pour toi, mon amour, car tous les vrais amoureux citent Aragon sans le savoir, ou en le sachant.
Amélie Nothomb, Biographie de la faim
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