Les consommateurs qui souhaitent que leur apport contribue véritablement et directement à des projets verts n'ont généralement d'autre choix que de prendre des participations lors des rondes de financement des entreprises en croissance. Malheureusement, cette option, même quand elle est accessible à monsieur- ou madame-tout-le-monde (par exemple grâce à l'investissement participatif), n'est pas toujours adaptée à leurs objectifs, entre autres eu égard à ses risques de perte en capital ou d'illiquidité.
L'instrument qu'ont concocté les deux partenaires, baptisé SG Tikehau Dette Privée, offre une alternative nettement plus sécurisée (indice SRI de 4 sur 7) et liquide en mettant à la portée du plus grand nombre (à partir de 5 000 euros) une gamme de produits historiquement réservée aux structures institutionnelles. Il s'agit donc d'assembler un fonds commun de placement dont le sous-jacent est constitué d'un portefeuille de dettes privées – c'est-à-dire, en résumé, des obligations placées sur un marché de gré-à-gré.
La dimension environnementale du dispositif est alors matérialisée par la promesse d'une sélection rigoureuse des sociétés financées de la sorte et (en tous cas j'espère, car rien ne le confirme formellement) des ambitions qu'elles affichent sur l'usage des sommes qu'elles collectent. Deux axes principaux sont mis en avant : d'une part, l'ancrage territorial, avec une cible privilégiée de PME et d'ETI françaises et européennes, et, d'autre part, les engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Afin d'évaluer objectivement leur sincérité, les emprunteurs sont soumis à des contraintes spécifiques. En amont de l'opération de financement, ils doivent signer leur inscription dans une trajectoire de décarbonation conforme à une méthodologie reconnue. Puis, pendant tout le cycle de vie du contrat, un audit indépendant sera mené annuellement en vue de vérifier la tenue des objectifs fixés… avec une incidence potentielle sur les conditions accordées (le taux d'intérêt applicable, essentiellement).
Indépendamment de la confiance des souscripteurs envers le gestionnaire quant au strict respect des critères de développement durable édictés, je ne peux que regretter l'absence de toute clause de transparence dans la description de la solution. Dans un contexte de greenwashing outrageux permanent, il serait pourtant bienvenu, pour ne pas dire indispensable, de garantir la publication systématique et détaillée des financements réalisés ainsi que des résultats des diagnostics et contrôles effectués.
En tout état de cause, la nouveauté déployée par Tikehau et Société Générale constitue un pas important non seulement pour la démocratisation de l'investissement à impact auprès des citoyens les plus engagés mais également pour ses vertus pédagogiques à l'intention d'une population beaucoup plus étendue. Dans la jungle des communications plus ou moins biaisées, la possibilité d'identifier des démarches dont la portée environnementale est sans ambiguïté (surtout si elle est transparente) est critique.