Par quoi commencer ? On ne lui a pas laissé beaucoup de temps. Écrire à sa fille. Une lettre, une seule. Et plus jamais. Écrire pour qu’elle sache, un jour, qui était sa mère, ce qui l’a amenée à la perdre. Pour qu’elle, l’enfant, vive. « Mais quand tu es / sortie de mon ventre , / je savais déjà / que je t’avais / perdue ». Ces mots qui veulent dire l’amour. Et la perte. « Ils te diront que j’étais folle ». Mais « ils » ne savent pas. L’enfant, elle, voudra savoir qui était sa mère. Et elle saura. Et pourra vivre. Être elle-même. Sans la honte.
Le texte de ce roman épistolaire d'aujourd'hui, fait de lettres sans réponse, est versifié. Cette forme, ce n'est pas pour faire joli, c'est parce que la prose du roman n'aurait pas rendu compte de la tentative de dire la profondeur de la blessure, l'intimité de l'indicible. Et l'amour d'une mère à qui on prend sa fille, à moins qu'elle n'ait tout fait pour que sa fille puisse vivre. Et aimer.