Au nom du feu est certes un roman de Pierre Béguin, mais il est fortement inspiré de notes de son narrateur, Alfred Luginbühl (1918-1995), prises peu avant sa mort.
Il y a deux périodes racontées en alternance dans ce récit: de 1925 à 1942 d'une part, de 1942 à 1946 d'autre part, la première période expliquant la seconde, progressivement.
Le point d'inflexion des deux périodes est le 8 mars 1942, où, en uniforme de lieutenant, Alfred déserte la Suisse pour rejoindre la Waffen SS afin de combattre le communisme.
Entre 1925 et 1942, des événements très personnels expliquent pourquoi il a pris cette décision, l'élément déclencheur étant, à son début, sa récupération par sa mère naturelle.
À sa naissance, Rosa, l'a placé dans une famille adoptive, sa vraie famille, celle qui l'a élevé. Elle le récupère non pas par instinct maternel, mais pour en faire un domestique.
Il quitte donc Merliguen, canton de Berne, pour Montreux, canton de Vaud, où sa mère puis son beau-père lui infligent des sévices corporels qui nourrissent sa révolte et sa haine.
À partir de 1942, Alfred, qui a tout de suite déclaré ne jamais vouloir combattre contre son pays, se bat avec les troupes allemandes en Finlande contre les troupes soviétiques.
Les combats sont rapportés avec un grand luxe de détail, de même que les captivités, lors desquelles se révèle la vraie nature des hommes, qui n'ont pas tous son sens de l'honneur.
Alfred a un grand instinct de survie, sans doute parce que son adversaire est à sa taille: lui-même. Face aux enfermements, il aura multiplié d'abord les fugues, puis les évasions.
La personnalité d'Alfred est complexe, mais il réagit face à ses malheurs en apprenant de ses échecs et en comprenant qu'on ne peut être libre qu'en se pardonnant à soi-même.
Francis Richard
Au nom du feu, Pierre Béguin, 376 pages, Bernard Campiche Editeur
Livres précédents:
Condamné au bénéfice du doute (2016)
Et le mort se mit à parler (2017)