Écrits entre deux langues, ces poèmes d’un étrangère parmi les étrangers parlent sans doute mieux que quiconque de Babelville, le Belleville de Paris, d’où on voit tout Paris depuis le haut du Parc, le quartier où s’est dressée il y a environ 150 ans la dernière barricade de la Commune. Roxana Paez habite dans le quartier. Chaque poème en raconte le quotidien. On y rencontre une population d’une grande diversité, habitant, discutant, commerçant, jouant, aimant, vivant dans les rues dont les noms évoquent une part de l’histoire de la ville, d’un quartier de la capitale, peut-être un des derniers quartiers populaires. Les langues s’y croisent, s’y rencontrent, échangent. « La poésie est un pont ». Pas de nostalgie d’une banlieue annexée par la ville, d’un quartier qui a échappé au Baron Haussmann, et une graine de pissenlit passe ici et là.
(…)
Nous sommes sortis de plusieurs rêves,
et à la librairie tu m’as donné un livre sur telle imagination en folie
et moi je t’ai donné Retour au pays natal.
Papillons, fleurs, Noirs.
Maintenant c’est à moi de te recevoir,
de découper un melon, des feuilles de menthe,
du miel uruguayen.
Nous sommes sortis de plusieurs rêves mais nous
continuons
de rêver le nôtre.
(...)
AQUI ALLA
ICI LÀ
Une belle préface ouvre ce livre. Elle est signée de Geneviève Huttin, dont la voix nous revient ainsi, quelques années après sa disparition. C’est aussi que ce livre, bilingue, est l’endroit de la rencontre, de vivants et de morts, tou.te.s vivant.e.s, venu.e.s du monde entier ici, à Belleville, rue Vilin, Passage de la Fonderie, rue Saint-Maur, rue Jean-Pierre Timbaud, Maison des Métallos, impasse de la Baleine.