Par Henry Bonner.
Comme écrit mon associée Simone Wapler : « La perte de pouvoir d’achat est un phénomène monétaire et politique. Le dollar n’est pas fort, il est seulement moins faible que d’autres devises. La seule monnaie « apatride » qui ne soit pas gouvernée par la politique reste l’or. »
Les médias nous content actuellement que le dollar est fort. Les autres monnaies – yen, livre, euro – achètent moins de dollars qu’auparavant, plus précisément depuis que la Fed a commencé à relever ses taux d’intérêt. Le dollar serait donc une monnaie forte. L’embêtant est que cette monnaie forte achète moins de choses. Dit autrement son pouvoir d’achat diminue.
Commençons par deux graphiques de l’évolution du pouvoir d’achat du dollar. Lorsque le pouvoir d’achat baisse un billet ou une pièce permet d’acheter moins de choses. Comme le « pouvoir d’achat » en monnaie enregistre une baisse continue depuis un siècle, il serait plus juste de dire « érosion monétaire ».
Un pouvoir d’achat qui fond comme neige au soleil
Voici d’abord l’évolution de la baisse du pouvoir d’achat d’un consommateur américain habitant dans une grande ville depuis 1913, date de ces premières statistiques.
Évolution du pouvoir d’achat du dollar de 1913 à novembre 2022
Après deux guerres mondiales, le pouvoir d’achat du dollar a été divisé par 2,5, passant d’un peu plus de 1000 à 400.
Ensuite, sans guerre mondiale, la glissade a continué. Entre les années 1950 et 1980, le pouvoir d’achat passe de 400 à 100. Nouvelle division par 4.
Après 1980, ce graphique donne l’illusion que la débâcle est terminée. Cette illusion se dissipe lorsqu’on adapte l’échelle pour y voir un peu plus clair.
Évolution du pouvoir d’achat du dollar de 1980 à novembre 2022
De 130 en 1980, le pouvoir d’achat du dollar se réduit à 33,6 en novembre 2022 (date de la dernière statistique de la Réserve fédérale). Une nouvelle division par 3,87…
Le dollar n’est donc pas une monnaie forte. D’ailleurs, les taux directeurs décidés par la Fed sont en dessous de l’inflation : en souscrivant à un emprunt en dollars, vous recevez aujourd’hui 4,50 % d’intérêt mais l’indice de hausse des prix se situe à 7,10 %. Si le citoyen urbain américain décide de ne pas consommer tout de suite, il perd du pouvoir d’achat…
L’érosion se poursuit donc pour le dollar. Simplement, elle est moins rapide que celle que subissent les autres monnaies. Les citoyens urbains du vaste monde sont encore moins bien lotis et notamment ceux dont la monnaie est l’euro.
La baisse du pouvoir d’achat est la conséquence de l’inflation monétaire
Tous les banquiers centraux jurent la main sur le cœur qu’ils ont le souci de la valeur de la monnaie qu’ils gèrent et de la stabilité des prix.
C’est leur « mandat », disent-ils.
Voici ce que vous pouvez lire sur la page d’accueil de la Banque centrale européenne :
« Notre principale mission est de maintenir la stabilité des prix. Pour ce faire nous veillons à ce que l’inflation reste faible, stable et prévisible afin de vous aider à planifier vos dépenses et votre épargne ».
Quelle aimable farce ! Reprenons point par point ce couplet.
« Maintenir la stabilité des prix » : la Banque centrale européenne détermine-t-elle les prix ? Décrète-t-elle le prix d’un baril de pétrole, d’une tonne de riz, de l’acier, du cuivre ? Fixe-t-elle salaires et prix de vente ? Non.
« Pour ce faire nous veillons à ce que l’inflation reste faible, stable et prévisible » : en toute rigueur, l’inflation n’est pas la hausse des prix, l’inflation est l’augmentation de la masse monétaire. L’inflation est forte, contrairement à ce qu’affirme la BCE.
Évolution de la masse monétaire de la zone Euro depuis 20 ans
La quantité de monnaie en circulation a presque quadruplé. Dans le même temps, la production de biens et services dans la zone euro n’a fait que doubler. Le rythme de la croissance monétaire est quatre fois plus élevé que le rythme de la croissance de la production de biens et services monnayables. Davantage de monnaie pour acheter les mêmes choses conduit nécessairement à augmenter le prix de ces choses.
« vous aider à planifier vos dépenses et votre épargne » : on ne voit pas en quoi l’augmentation arbitraire et injustifiée de la masse monétaire nous aide à planifier nos dépenses. Quant à l’épargne, avec des taux d’intérêt nuls et administrés, le besoin de la planifier n’existe plus.
Le financement d’un capitalisme du gaspillage
Les banquiers centraux se moquent de nous. Ils sont en réalité au service d’un capitalisme dévoyé. Ils ne savent faire qu’une seule chose : créer de la monnaie qui est utilisée pour financer des objectifs politiques : dépenses sociales à des fins de clientélisme politique, orientations vers des investissements non rentables (énergies renouvelables, véhicules électriques, isolement de l’habitat, applications de normes inutiles,…). Ces investissements ne sont pas décidés par des clients libres de choisir mais contraints et forcés par la loi.
L’avilissement de la monnaie est une tendance longue, c’est pourquoi nous conseillons de placer une partie de votre épargne à long terme en or. Souvenons-nous que les banques centrales conservent toujours de l’or dans leurs coffres. La dématérialisation de la monnaie n’est donc pas totale.
Lorsque vous contemplez un graphique historique de l’évolution de l’or (cours en euro ou en dollar), vous pouvez constater que c’est une monnaie « apatride » qui échappe à l’érosion des devises.
Évolution du cours de l’or en euro
Ainsi, il vous fallait 300 euros en 2004 pour acquérir une once d’or.
En 2022, il vous faut 1740 euros.
La valeur de l’or a plus que quintuplé, compensant l’érosion de la monnaie due à la création monétaire de la Banque centrale européenne.
Certes, l’évolution du cours de l’or n’est pas aussi régulière que celle de la masse monétaire comme en témoigne la période 2012-2018. Mais le rattrapage finit toujours par se produire. Les banquiers centraux peuvent créer de la monnaie mais pas du pain, de l’essence, de l’électricité, de la viande, des légumes, des maisons,… ou de l’or.
Comme pour les énergies fossiles, nous restons confiants dans cette tendance longue.