La conque du Salagou, modeste ruisseau de 10ème ou 12ème catégorie hydrographique, avait certes de merveilleux autours, proches de la pourpre impériale, avant l'heure où l'homme moderne décida de la métamorphoser en plan d'eau. Si les prosaïques projets des concepteurs n'atteignirent pas tous leur but, le site y trouva tout de même une apothéose et une gloire touristique rapide. Les amoureux de la nature, les poètes, les peintres et les photographes y puisent le ravissement et l'inspiration. Et, tout artificiel qu'il soit, c'est vrai qu'il est beau ...
Cette roche aux teintes de sang coagulé et de vin hors d'âge n'a pas moins de 250 millions d'années : l'ère primaire ! Le barrage, lui, est en place depuis 1968 seulement. Entre temps, quelques dinosaures ont laissé les traces de leur passage, pas très loin de là..
Le Conseil Général Héraultais vota la construction du barrage du Salagou en 1959. La mise en eau est cause de déchirements et d'immersions de villages et de hameaux. L'entêtement d'un berger plus une décision de dernière minute firent que la côte prévue à 145 fut ramenée à 139. Le hameau de Celles était sauvé et devenait presqu'île. Depuis, les noires pierres basaltiques de ses maisons ont connu d'autres alertes, les caméras du cinéma et d'innombrables reproductions photographiques.
L'actuel visiteur du Salagou ne pense sans doute pas à ce que représente de chamboulements la création d'un barrage et d'une retenue d'eau. Un village perdu dans l'aridité de la garrigue se retrouve entouré de campings et de pêcheurs. Le berger voit ses pâtures disparaître et la cave du viticulteur n'a plus aucune utilité. Là où il fallait cinq petites minutes pour rejoindre un point, il faut faire un long détour. Et l'indication du vieux panneau Michelin tombe à l'eau. C'est le cas de le dire.
S'il est une terre où le passé ressurgit à tout instant sous les pas, c'est bien celle aux abords du Lac du Salagou. Cabrières est l'un des rares lieux de la planète où l'on trouve des trilobites, curieux invertébrés fossilisés qui furent les premiers habitants de notre vieille sphère, voilà 600 millions d'années. A deux pas de là, ce sont les dinosaures et autres monstrueux reptibles qui en plusieurs endroits ont laissé leurs empreintes sur le roc, à La lieude ou plus haut, du côté de Lodève au Grézac. Quelques spéciments finirent même dans les collections de Georges SAND.
Unsclas-du-Bosc, relais templier sur l'itinéraire de St Jacques de Compostelle et son cimetière, révèla d'autres curiosités : une collection de stèles discoïdales en 1955 qui se trouvent actuellement au Musée Fleury à LODEVE.