Troisième galette des coreux férus de culture sud-américaine pré-hispanique sur le thème de l’invasion par l’Ancien Continent des terres maya.
Tout commence par une intro digne du film 1492, avec ces bruits de vagues couverts par un chant grégorien, et une montée en puissance, signant l’arrivée des conquistadores en pays maya (l’actuel Mexique). « Valladolid » (ville duYucatàn), à la rythmique lourde, retrace la triste réalité de l’invasion et de l’écrasement idéologique perpétré par les envahisseurs espagnols, sous de fallacieux prétextes religieux et d’infériorité culturelle… Crimes perpétrés malheureusement maintes et maintes fois que ce soit ensuite avec les pélerins en Amérique du Nord, les missionnaires en Afrique…
« Forced Conversion », un des titres les plus « doux » de l’album, reprend le thème de la conversion au catholicisme comme seule porte de salut. « The Madman » conte la folie de l’homme blanc à la recherche de cette fameuse Eldorado et cette soif de l’or qui a attiré tant d’espagnols et de portugais en ce début de XVIe siècle, pillant sans vergogne villages et temples et fondant les œuvres désormais irrémédiablement perdues de ces civilisations maya, inca… Quelques notes de flûte de pan bienvenue viennent apporter une touche d’exotisme.
« Heart of Darkness », où le quotidien des conquistadores qui, sans les victimiser, quittaient malgré tout un foyer pour partir dans des contrées inconnues et inexplorées, en une traversée meurtrière, s’enfouissant dans des jungles pullulant de moustiques, dans des températures et des humidités extrêmes ; et en proie aux assauts répétés des autochtones bien décidés à ne pas se laisser faire ! « Road to the Altar », ou quand les envahisseurs perdent tout espoir et tout repère… « 1521 », la chute de Mexico-Tenochtitlan, capitale de l’empire aztèque, sur laquelle Cortés fonda l’actuelle Mexico. « Bocoga », où l’histoire, malheureusement commune, d’un dirigeant indigène capturé et libérable contre rançon ou torturés… La soif de l’or encore et toujours. « Des Cannibales » surprend par son chant en français une première pour le quintette francilien !
« Anacaona », où la triste fin d’une cacique (chef de tribu), mise à mort au début du XVIe siècle, mais aussi poétesse et compositrice reconnue à travers les Caraïbes. « Inherited Chaos » conclut l’album sur des riffs tonitruants.
On notera une production irréprochable, un son net et sans bavure (on dirait du Jens Bögren – genre je m’y connais) ; quelques notes éparses de guitare acoustique, de flûte de pan, pour faire « couleur locale », (le petit plus « Périglioni ») et un invité de taille en la personne de Philippe Courtois de l’Argilière (Misanthrope) sur le titre « Des Cannibales » – dont on reconnaît le râle caractéristique, texte tiré d’un essai de Montaigne, s’il vous plait.
Amusant de noter que la voix de Cris lorsqu’il ne growle pas, ressemble à celle de Nicolas Saint Morand, aka RMS Hreidmarr (ex. Anorexia Nervosa, CNK) !
L’album, même s’il est très homogène, propose des rythmiques tantôt lourdes, tantôt effrénées ; le sujet est maîtrisé, rien à redire !
Tracklisting
- Leading the Lost Ones
- Valladolid
- Forced Conversion
- The Madman
- Heart of Darkness
- Road to the Altar
- 1521
- Bocoga
- Des Cannibales
- Anacaona
- Inherited Chaos
Discographie
2013 – Eleven (EP)
2015 – The Kiss of Coatlicue
2018 – Nine Levels
2022 – Compelle Intrare
Si vous avez aimé…
Cemican – In Ohtli Teoyohtica In Miquiztli (2019)
Loudblast – Manifesto (2020)
Nile – Vile Nilotic Rites (2019)