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"Boris 1985", l'enquête de Douna Loup

Publié le 16 janvier 2023 par Podcastjournal @Podcast_Journal
Celui-ci, Boris Weisfeiler, a disparu début janvier 1985 dans le Chili du général Augusto Pinochet. Près de quarante ans plus tard, sa petite-nièce cherche à savoir ce qu’il est arrivé à ce lointain parent qu’elle n’a pas connu mais dont sa grand-mère Jacqueline lui a beaucoup parlé. Elle fait revivre ce "fantôme", un des 3.200 morts ou disparus de la dictature qui a duré de 1973 à 1990.

Né le 19 avril 1941 en Union soviétique, Boris Weisfeiler s'est exilé aux États-Unis en 1975 et a été naturalisé en 1981. Professeur de mathématiques à la Pennsylvania State University, il est connu pour ses travaux et les douzaines d'articles qu’il a publiés sur ses recherches. Cet homme brillant et solitaire était passionné de randonnées. A Noël 1984, il s'envole pour le Chili et disparaît mystérieusement lors d'une excursion. Douna Loup déclare  "L’histoire de Boris, c'est une petite histoire dans la grande". Cette quadragénaire qui a déjà publié deux romans fait alterner dans son récit détails historiques et autres plus quotidiens; elle fait aussi part de ce qui a été le déclic de sa quête. Un jour de janvier 2018, elle s’intéresse plus particulièrement à la disparition de Boris Weisfeiler. Elle vient d’écouter la chanson "Vino del Mar" écrite en hommage à Marta Ugarte Román, secrétaire du parti communiste chilien. Son corps avait été retrouvé le 9 septembre 1976 sur la plage "La Ballena" à quelque 200 km au nord de Santiago, elle avait été torturée et exécutée par la police secrète puis précipitée d’un hélicoptère, Le prénom de Boris lui vient alors "immédiatement en tête".

Pour mener son enquête, elle s’appuie sur des documents déclassifiés, des témoignages et des extraits des carnets personnels de son grand-oncle, ce qui aide le lecteur à se familiariser avec la vie de cet homme mais aussi avec la réalité chilienne de ces années-là.
Douna Loup se rend à Boston, où vit Olga, la sœur de Boris avec qui elle correspondait. Cette dernière se battait depuis plus de trois décennies pour savoir la vérité sur la disparition de son frère mais l’affaire avait été classée sans suite par un juge chilien en 2016, faute de preuves. De janvier 2018 à mars 2020, des États-Unis, au Chili et en Russie, Douna Loup interroge des membres de la famille, Veronika, une ex-compagne de Boris ainsi que ses amis. Elle raconte la vie de cet homme de 44 ans dont la trace s’est perdue quelque part au sud de Santiago et qu'elle a longtemps jugé "insaisissable".

"Raconter sa vie, son parcours, c'est une façon de lui rendre hommage" écrira-t-elle. Elle regrette que cette histoire ne soit relatée que sous la forme d'un fait divers, ce "qu'il n'est pas". Au Chili, elle questionne ceux qui ont connu la dictature. Jusqu'au bout de son enquête, elle a tenté d'en savoir davantage sur cette mort. Selon des documents déclassifiés, Boris Weisfeiler aurait été enlevé par les forces de sécurité chiliennes qui l'auraient remis à une étrange secte installée à proximité, la "Colonia Dignidad" ou plus officiellement "Sociedad Benefactora y Educacional Dignidad", "Société de bienfaisance et d'éducation Dignité", une communauté agricole vivant en autarcie, fondée en 1961 par d’anciens nazis et où ont lieu des tortures et des abus de toutes sortes. Selon les rapports chiliens, au moment de sa disparition, Weisfeiler était dans les environs de la "Colonia Dignidad", des déclarations contradictoires donnent des détails impossibles à vérifier, par exemple que Weisfeiler s'était noyé même si son corps n’a jamais été retrouvé. Des pêcheurs locaux ont dit qu'ils avaient campé avec Boris et lui avaient indiqué une direction vers le nord, vers la Colonia. Certains affirment même avoir vu ses empreintes près de la rivière et avoir trouvé son sac à dos et d'autres objets.

Malgré ses multiples recherches qui n'ont pas abouti, Douna Loup en arrive à confier "Aujourd'hui, avec le recul, je crois qu'on ne saura jamais ce qu'il s'est passé". Mais même si la vérité lui échappe, elle déclare "J’ai l'espoir de contribuer à la paix d'Olga et celle de ma famille et, pourquoi pas, à celle des familles de victimes de la dictature". Rédaction internationale En savoir plus sur cet auteur Dernier week-end des vacances. C’est la rentrée et nous nous l’affrontons tous en traînant nos galoches, ne sachant pas trop de quoi elle sera faite. Il y a un an, nous avions encore l’espoir que les problèmes et autres difficultés liés au Covid-19... LES BRÈVES

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