Fondée par un groupe d'utilisateurs de l'Aéroport Marseille Provence, Air France KLM, Amadeus, Renault Group, la SNCF et le groupe ADP (Aéroport de Paris), EONA-X vise à créer une plateforme d'échange de données, sécurisée et souveraine entre les professionnels européens de la mobilité, du transport et du tourisme. Grâce à cette initiative, les entreprises du secteur pourront accéder plus facilement à l'information, et les touristes et voyageurs profiteront de nouveaux services de mobilité multimodaux à forte valeur ajoutée. Le tout en se passant des services des poids lourds du Web.
Issue des travaux menés dans le cadre du projet européen GAIA-X, EONA-X ne souhaite cependant pas se limiter à une plateforme de données sectorielle (Data Space). Les membres fondateurs comptent en effet travailler rapidement sur des cas d'usages concrets. Ils ont par ailleurs déjà imaginé le scénario d'un Bruxellois voulant se rendre à Paris pour les JO 2024.
" Il prendrait ainsi un train Thalys ou SNCF, puis une fois arrivé il commanderait un VTC ou louerait un véhicule pour se rendre au Stade de France. Après avoir passé une nuit à l'hôtel, il poursuivrait sa visite du pays en se rendant à Marseille par exemple. Ce premier cas d'usage prendrait en compte toutes les variables liées aux conditions d'un voyage (perturbations, horaires) et aux besoins du voyageur (mobilité réduite, points d'Intérêts à l'arrivée) ", précise l'opérateur de technologies digitales pour les entreprises et expert de la mobilité Hub One.
Imaginer des cas concrets, c'est bien. Mais il faut aussi se confronter à la réalité d'un monde où règne la loi du marché. EONA-X a donc comme premier défi d'inciter au partage des données. Si posséder des informations exclusives est généralement synonyme d'avantage concurrentiel, les acteurs du tourisme, de la mobilité et du transport vont néanmoins devoir outrepasser leurs propres intérêts pour développer un écosystème facilitant la circulation des données. Un réseau sécurisé d'informations qu'il faut donc accepter de partager avec, parfois, des concurrents. GAIA-X fait face à un changement de paradigme délicat à opérer.
Deuxième défi : mettre en œuvre le cadre technique et juridique initié par GAIA-X. Très conceptuel et théorique, ce projet comptait initialement créer un " super cloud européen ". En vain. Il s'oriente désormais vers un système en réseau sécurisé reliant divers fournisseurs de services cloud. Les membres de GAIA-X compte toutefois établir des principes (ouverture, transparence et confiance), des règles et des normes que les initiatives sectorielles, telle EONA-X, devront respecter.
Dans la mesure où EONA-X ambitionne d'être le volet " opérationnel " de GAIA-X, les entreprises inscrites sur la plateforme pourront définir leurs conditions entourant le partage des données. Elles auront par exemple la possibilité de demander la certification ISO 27001 sur la sécurité de systèmes d'informations ou encore la conformité au RGPD sur la protection des données
Les fondateurs de l'association EONA-X ont identifié des limites pouvant mettre à mal leurs projets. La première incertitude concerne la portabilité et la souveraineté des données partagées dans un réseau sécurisé . Pour que tout se passe pour le mieux, le Responsable adjoint de la conformité d'EONA-X Luca Sarlo a notamment indiqué que " l'échange de données pourrait se faire via des smart contracts, sur une architecture data mesh ". Grâce à ce modèle, l'exécution du contrat serait assurée par un protocole informatique infalsifiable (similaire à la technologie blockchain). " Chaque entité serait en charge de ses données, de leur mise à disposition et de leur mise à jour ", ajoute Luca Sarlo.
Le second doute concerne l'influence des géants américains et asiatiques du web. GAIA-X, et par extension EONA-X est né d'un premier objectif : devenir une alternative européenne aux services cloud des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) et BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi).
" Mais l'histoire récente a montré qu'il était souvent difficile de s'en passer, tant les entreprises européennes étaient habituées à travailler avec elles et que le niveau de fonctionnalités offert était élevé. Les membres d'EONA-X n'auront pas d'autres choix que de se mettre d'accord sur la position à tenir face à ces grands acteurs du numérique, devenus incontournables avec le temps, pour répondre aux enjeux de souveraineté des données ", conclut Hub One.