Voici enfin la réponse claire et précise publiée le 12 août sur le quotidien La Croix à votre sempiternelle question : "Pourquoi je paie encore mon essence, ou mon gazole, aussi cher à la pompe, alors que le brut baisse depuis juillet ? Pourquoi le prix de mon billet d'avion ne répercute-t-il pas plus vite la baisse du cours du baril de pétrole même si déjà certains tour-opérateurs ont annoncé une baisse effective de la surcharge carburant comme Marmara sur son blog ?"
Voici en intégralité l'article de La Croix :
" Pourquoi le prix de l'essence ne baisse-t-il pas autant que le cours du pétrole ?
Par Olivier Appert, Président de l'Institut français du pétrole ( IFP)
La répercussion du prix du baril brut sur celui du carburant à la pompe est un sujet politiquement sensible. On l'a bien vu en novembre dernier quand, face à la flambée du brut qui venait de dépasser les 90 dollars, la ministre de l'économie Christine Lagarde a réuni les pétroliers français pour leur demander de retarder l'impact de cette hausse et modérer l'augmentation des prix des carburants. Quand le coût de la matière brut baisse, les pétroliers sont également soumis à la pression de l'opinion publique qui désire une répercussion immédiate sur leurs tarifs.
Il faut cependant signaler qu'en France, comme dans la plupart des pays industrialisés, les variations dans un sens ou un autre du tarif des carburants sont loin d'être proportionnelles à celles des prix du brut. En effet, les taxes fiscales représentent entre 50 et 60 % du prix à la vente. L'une, la TVA, est bien proportionnelle au coût du produit. Mais l'autre, la taxe intérieure sur les produits pétroliers ( TIPP) qui représente une part importante de la fiscalité,est fixe et ne varie donc pas avec le prix du pétrole. Cette taxe joue ainsi un rôle essentiel d'amortisseur entre les prix du pétrole et ceux des carburants à la pompe. Prenez par exemple un baril à 100 dollars et un litre de super à1,46 €. Si la matière brute augmente de 30 %, le prix du super ne monte qu'à 1,50 € le litre. ce mécanisme d'amortissement joue bien entendu aussi le sens de la baisse. En revanche, les variations sont plus brutales pour le gazole car la TIPP qui le concerne est importante que pour le super. Cela peut décevoir le consommateur qui, lorsqu'il entend que le coût du pétrole a diminué de 20 %, espère qu'il dépensera d'autant moins.
Par ailleurs, en ce qui concerne le temps d'ajustement des tarifs à la pompe par rapport au brut, il faut tenir
compte d' un effet stock. Quand une compagnie pétrolière, comme Total par exemple, achète du brut, il s'écoule entre un et deux mois avant que le carburant ne soit acheté par un automobiliste. Le prix affiché à la pompe est donc lié à celui du brut observé un ou deux mois en arrière. Pour les grandes surfaces, en revanche, la réaction à la hausse ou à la baisse est plus immédiate puisqu'elles achètent directement un produit fini sur le marché international. En fait, la concurrence entre les deux filières de distribution oblige souvent les pétroliers à accélérer les baisses.De toute manière, l'impact de la baisse du baril risque d'être limité dans les semaines à venir. On assiste à un renforcement du dollar par rapport à l'euro.Or, le dollar est la monnaie dans laquelle se font les transactions pétrolières. Un euro fort a limité de fait les augmentations à la pompe dans les pays européens lors de la flambée du brut. Un dollar plus fort risque donc à son tour de freiner la baisse des carburants. "
Propos recueillis par Michel Waintrop